Facebook était toujours mercredi au coeur d’une tourmente mondiale depuis que la société Cambridge Analytica a été accusée d’avoir illégalement acquis les données de 50 millions d’utilisateurs du réseau social.
La société de Mark Zuckerberg s’est dite « scandalisée d’avoir été trompée » par l’utilisation des données de ses utilisateurs par Cambridge Analytica et a dit « comprendre la gravité du problème ».
Devant l’ampleur du scandale, une commission parlementaire britannique a demandé mardi au patron de Facebook de venir s’expliquer devant elle. Et lui a donné jusqu’à lundi pour répondre. Le jeune milliardaire a également été invité à s’exprimer devant le Parlement européen qui va « enquêter pleinement » sur cette « violation inacceptable des droits à la confidentialité des données ».
Aux Etats-Unis, les procureurs de New York et du Massachusetts ont lancé une enquête sur ce scandale et, selon les médias américains, la Commission fédérale du commerce (FTC), un organisme public chargé de veiller à la protection des consommateurs et de la concurrence, a aussi ouvert une enquête.
Les autorités chargées de la protection des données dans l’Union européenne se sont également saisies mardi de l’affaire. Le sujet était au menu d’une réunion de ces autorités à Bruxelles, a indiqué la Commission européenne, dont une représentante devait demander des « clarifications » à Facebook, dont le cours a dégringolé en Bourse.
Dans le viseur des autorités britanniques de protection des données et de la justice américaine, Cambridge Analytica a annoncé mardi la suspension de son patron Alexander Nix, qui s’était vanté d’avoir oeuvré pour Donald Trump en 2016.
Cette décision a été prise à la suite de la publication de « commentaires » de M. Nix enregistrés par la chaîne Channel 4 News, ainsi que d’autres « allégations » formulées à son encontre, qui « ne représentent pas les valeurs » de la société, spécialisée en communication stratégique et analyse de données à grande échelle, a-t-elle expliqué dans un communiqué.
Les commentaires en question sont issus d’une enquête diffusée lundi et mardi par la chaîne britannique, où le patron de Cambridge Analytica apparaît en caméra cachée répondant aux questions d’un reporter à l’identité déguisée.
« Aucune preuve, pas de trace écrite »
Les derniers éléments publiés mardi le montrent ainsi se vantant du rôle joué par son entreprise aux Etats-Unis dans la campagne présidentielle du candidat républicain Donald Trump en 2016. Recherche, analyse, « on a dirigé sa campagne numérique », assure-t-il avant de mettre en avant le système d’e-mails auto-destructeurs qu’il utilise.
« Il n’y a aucune preuve, pas de trace écrite, rien », explique-t-il, affirmant qu’il n’y a pas de danger que les parlementaires américains percent son secret à jour. « Ce sont des hommes politiques, pas des techniciens. Ils ne comprennent pas comment ça marche ».
CA, qui dispose de bureaux au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, est accusé d’avoir récupéré sans leur consentement les données de 50 millions d’utilisateurs de Facebook pour élaborer un logiciel permettant de prédire et d’influencer le vote des électeurs, afin de peser dans la campagne de Donald Trump.
Channel 4 News a également diffusé une interview enregistrée avec Hillary Clinton en octobre 2017.
« Il y avait une campagne d’un genre tout nouveau qui était menée dans le camp d’en face », y explique l’ancienne candidate démocrate en dénonçant « un effort de propagande ». « La vraie question c’est de savoir comment les Russes ont pu cibler aussi précisément les électeurs indécis dans le Wisconsin, le Michigan et la Pennsylvanie », trois Etats remportés par le milliardaire républicain, ajoute-t-elle.
Dans les enregistrements publiés lundi, Alexander Nix suggère également des techniques pour mettre en difficulté un rival politique, comme par exemple le fait d' »envoyer des filles autour de la maison du candidat ». Interrogé dans le quotidien The Times, Alexander Nix a démenti avoir tenté de piéger des hommes politiques. Cambridge Analytica a de son côté « nié fermement » ces accusations.
Au Royaume-Uni, l’Information Commissioner’s Office (ICO), autorité indépendante chargée de réguler le secteur et de protéger les données personnelles, a demandé l’autorisation d’enquêter au sein de CA afin de pouvoir « fouiller les serveurs » et « effectuer une vérification des données ».
Facebook, comme Twitter ou Google, est accusé depuis des mois d’avoir servi à des entités liées à la Russie pour manipuler l’opinion publique, en particulier lors de la campagne présidentielle américaine ou celle du référendum sur le Brexit en 2016. Ils sont aussi régulièrement accusés de ne pas assez protéger les données personnelles de leurs utilisateurs, qui sont la base de leur modèle économique.
Afp