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Dans le PTB pour Dakar : Le Sénégal en miniature des banlieusards

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Le Ptb est aussi un moyen pour découvrir certaines réalités de Dakar. Il y a des quartiers entiers mal lotis et entièrement inondés. Il y a un marché à même les rails à hauteur de Thiaroye. Il y a des habitats spontanés le long des rails. Il y a aussi la poussière soulevée par les rames et le bruit occasionné par la mécanique, la canicule, etc.

Le Ptb est un monde a part où l’on découvre le temps d’un voyage une partie de nous-mêmes, de notre société. « Le Soleil » a voyagé a bord pour le faire découvrir.

Pour les banlieusards, le Petit train bleu (Ptb) est une autre alternative pour se rendre à Dakar. Seulement ce train, qui fait la navette entre le centre-ville et la proche et lointaine banlieue, est souvent trop petit pour ses usagers. On est au mois d’octobre. Il est lundi matin. A Rufisque, sur le Boulevard Maurice Guèye, l’autre nom de cette partie de la Route nationale qui traverse la vieille ville, les ‘’commuters’’ – travailleurs obligés de faire l’aller-retour chaque jour – attendent inlassablement les cars en partance pour la capitale. Avec la concentration à Dakar de quasiment toutes les activités, se déplacer reste le plus clair du temps un casse-tête chinois. Surtout pour les banlieusards ou les citadins des villes voisines, comme Rufisque. Pour le moment, le chemin de fer – le Petit train bleu (Ptb) – est l’alternative à la route. A deux centaines de mètres de la Route nationale, le bâtiment de la gare ferroviaire trône encore majestueusement.

L’architecture coloniale renseigne à suffisance sur l’âge de la bâtisse. Juste derrière, s’amoncèlent le long des rails de la ferraille et des wagons hors d’usage. Des cheminots s’affairent autour de quelques-uns. Accroché à l’extrémité de la charpente, un tableau blanc avec des écrits noirs indique le lieu-dit. Quelques passagers attendent le prochain train. L’intérieur de la vieille bâtisse n’est pas simplement vétuste. Il est aussi poussiéreux et couvert de toiles d’araignée. Quelques garde-fous délimitent l’accès du principal guichet de la gare.

En attendant l’arrivée du Ptb, les passagers ont encore le temps d’acheter des billets. Certains voyageurs prennent, à partir de Rufisque, l’autorail en provenance de Thiès pour Dakar.

« Pour l’autorail, le billet est à 500 francs Cfa, les wagons sont climatisés et il est beaucoup plus rapide », informe le guichetier sur place. Il quitte Rufisque à 8 heures 10 minutes. Pour le dernier départ de la matinée du Ptb, il faut encore patienter une quarantaine de minutes. Et, le ticket pour Dakar coûte 200 francs Cfa.

Un hall de gare qui date de l’époque coloniale

Le temps s’écoule. Les clients sont de plus en plus nombreux. Au bout de l’attente, la sirène rugit, puis le grondement de la locomotive annonce l’arrivée du Ptb. Le roulement de ce reptile mécanique sur les rails fait trembler la terre sous les pieds. A l’arrêt, le peu de passagers restants dans les wagons n’ont pas assez de temps pour vider les lieux. Ils sont assaillis par des clients tout pressés de trouver des places assises. Mais à ce moment de la matinée, l’enjeu n’est pas de taille puisque « Rufisque est le point de départ et la majorité de ceux qui travaillent à Dakar ont pris les trains plus tôt dans la matinée », mentionne un habitué du Ptb.

En moins de deux minutes, les quelques passagers se sont engouffrés dans le dernier train de la matinée en partance pour la capitale. L’engin peut alors poursuivre l’aiguillage pour permettre à la locomotive qui vient d’arriver de se placer à l’autre bout, pour recommencer le voyage dans le sens inverse, Rufisque-Dakar. L’intérieur du Ptb est spacieux et bien aéré. Il y a des ventilateurs géants suspendus au toit, mais aussi des accessoires pour accrocher sacs et autres bagages. Il y a une rangée de fauteuils à chacun des deux cotés des rames. Après les deux rangés, il y a des soutènements horizontaux et verticaux pour les voyageurs debout. Entre le tout, il y a un couloir où l’on peut voir, le long du train, ce qui s’y passe. Les portes entre les rames sont ouvertes et la foule, qui se bousculait tantôt pour entrer dans le véhicule, n’a pas pu occuper toutes les places assises.

Les clients montent toujours dans les wagons. En attendant l’heure de départ, certains passagers, après avoir pris place, descendent des wagons pour quelque raison obscure. Des colporteurs en profitent pour proposer mouchoirs, cure-dents et bonbons aux passagers, jusque dans leur siège. Ici et là, les gens discutent.

Après quelques minutes de stationnement, la sirène peut siffler le nouveau départ du Ptb. Le dernier voyage de la matinée pour Dakar. A nouveau, le reptile mécanique serpente sur les rails. « Avec le train, on a moins de problèmes », soutient Lucien Senghor. « Depuis longtemps » ce rufisquois d’adoption emprunte le train pour se rendre à Dakar. C’est aussi la situation d’Astou Coulibaly. Cette mère de famille emprunte le train « depuis 1974 ». A l’en croire, « c’est plus rapide que les cars de transport en commun ». Seulement, explique-t-elle, en période d’hivernage, il arrive que le train soit bloqué à cause des eaux. Elle soutient, avec Lucien Senghor, qu’à l’occasion des grands événements, le train enregistre des surcharges extraordinaires.

Ce matin, c’est à partir de Fass Mbao que le Ptb a commencé à devenir trop petit pour ses occupants d’un voyage. Babacar Seck, chef de quartier de la cité Assurance à la Zone d’aménagement concertée (Zac) de Mbao explique : « Fass Mbao est un arrêt stratégique du Ptb. Les gens viennent de Boune, de Yeumbeul et de Keur Massar pour prendre, à partir de cet arrêt, le train ». Il trouve que c’est normal qu’il y ait des surcharges. D’autant plus que pour bon nombre de banlieusards, « le chemin de fer est, avec est la Route nationale, la seule voie pour aller à Dakar ».

En moins d’une minute, le train engloutit la foule de banlieusards qui l’attendait impatiemment. L’engin ronronnant poursuit sa course vers Dakar. Les passagers peinent à se trouver des places. Tous les sièges assis sont occupés. Ils sont prévus pour une personne, pourtant chacun est occupé par deux. Certains passagers s’accrochent aux soutènements.

Un voyage de découverte plutôt harassant

Une gouaille populaire ! Et les discussions vont bon train, portant sur tout et sur rien. Un adolescent s’amuse avec la sonnerie de son téléphone cellulaire dans le train bondé de monde où les gens subissent la canicule. Un groupe de jeunes gens discute passionnément sur l’actualité et la réalité. Ils parlent des problèmes de la banlieue, du transport, du coût de la vie, de l’emploi, des élections de 2012, de la mouvance présidentielle, de l’opposition, de Karim Wade, du monde rural, de l’exode rural, de la pluie, du consommer local. Deux dames ont failli en venir aux mains. La première soutenait que le riz de la vallée n’est pas de bonne qualité ; la seconde le contraire.

« Pour se développer, il faut qu’on consomme ce qu’on produit », lance une voix masculine. Une autre voix répond : « certes, mais faudrait-il encore que les décideurs commencent par donner l’exemple ».

Les discussions se poursuivent, pendant que l’engin poursuit son chemin. L’absence d’embouteillages amoindrit la peine liée au surnombre de passagers ; surtout en cette période de chaleur.

A Colobane, le train crache une bonne partie des voyageurs qu’il avait ingurgités le long de son parcours. Comme des gens pressés, les voyageurs du matin se précipitent vers leurs destinations. Ici, c’est une méga fourmilière humaine qui a pris une forme autre, beaucoup plus importante à la gare ferroviaire de Cyrnos. Contrairement à l’arrêt de Colobane encadré par deux ponts limitant les déplacements, à Cyrnos la dispersion des ‘’commuters’’ fait penser à un pétard qui éclate. Multidirectionnelle ! Depuis quelques années, les voyages du Ptb en direction de Dakar se terminent ici. L’accès des rames est, depuis les travaux du parc culturel du Sénégal, limité à l’avant-dernier arrêt de la gare. Alors, juste après la descente, la masse humaine se précipite vers les bus stationnés en amont pour acheminer les passagers vers leur destination finale, au centre-ville, au Port ou vers les autres quartiers de Dakar.
lesoleil.sn

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