Chers concitoyens, permettez-moi, en tant que travailleur social, de partager avec vous sur le projet de « retrait des enfants de la rue ».
A l’entame de mes propos, vous constatez qu’à travers ma question introductive, je m’assume dans mon rôle d’intervenant social consistant à conscientiser, éveiller et proposer des actions en vue d’un mieux-être social.
Au paravent, il n’est pas évident que l’enfant, souvent traité comme objet de droit, soit considéré, et par tous, comme un sujet de droit et, à ce titre, a le droit d’en jouir comme tout le monde.
Dès lors, l’on peut se demander qui est l’enfant et quels sont ses droits ?
C’est vraiment désolant qu’on veuille assimiler l’enfant au « talibé » (élève coranique) même si l’on a du mal à faire accepter à la plupart des sénégalais que tous les « enfants-mendiants » ne sont pas que des « talibés ».
Si la Convention des Droits de l’Enfant (CDE), en son article premier, le définit comme étant un « être humain âgé de moins de dix-huit (- 18) ans », il est, sur le plan psychopédagogique, considéré comme « n’étant pas un petit Homme mais un petit d’Homme ».
Mais, la définition de l’enfance ne saurait être de façon universelle puisque chaque communauté a sa façon de la percevoir.
Toutefois, compte tenu du processus de développement de l’enfant, nous pouvons distinguer trois (3) principales étapes de l’enfance, avec, pour chacune, des besoins/droits dont la liste n’est pas exhaustive:
- La petite enfance (de 0 à 6 ans) durant laquelle l’on s’attend à, plus que la satisfaction des besoins/droits de l’enfant, l’obligation du respect à ses droits à l’alimentation, la santé, l’habillement, la protection, l’affection, la sécurité, l’identité (la déclaration à la naissance), l’éducation etc. ;
- L’enfance (de 7 à 12 ans), tranche d’âge à laquelle l’enfant, en plus de ses droits précités pour la petite enfance, à des droits à la famille, à l’expression, à l’information, au jeu et aux loisirs, à la participation, à la confiance, à la socialisation … ;
- L’adolescence (de 13 à – 18 ans) ou l’âge des droits à l’automatisation, à la responsabilisation, à l’affirmation, à l’émancipation, au respect, à l’éducation sexuelle etc.
La satisfaction de l’ensemble de ces droits participe à la transformation ou au développement physique, mental, psychologique et sociologique de l’enfant.
Cependant, la question est de savoir si l’enfant peut, à lui seul, satisfaire tous ses droits ?
La réponse est évidemment non, et l’adulte, la famille, la société, mais aussi et surtout l’Etat ont l’obligation de les lui assurer.
C’est sous cet angle que nous devons apprécier à sa juste valeur l’initiative courageuse de l’Etat d’engager le « retrait des enfants de la rue ».
En effet, si nous acceptons tous que le processus de socialisation de l’enfant connaisse différentes étapes et peut faire l’objet de plusieurs options, fondamentalement par rapport à son droit à l’éducation, nous devons également nous convenir que la place de l’enfant ne saurait être la rue. Leur présence dans la rue est tellement fréquente et récurrente que l’on a du mal à distinguer les enfants dans la rue des enfants de la rue.
En tout état de cause, plus ils sont dans la rue, moins ils sont dans les lieux où ils doivent acquérir du savoir, du savoir-faire et du savoir-être.
A ce propos, nous ne passerons pas sous silence la question liée à la mendicité, plus précisément, sa place et son rôle dans la formation de l’enfant-talibé (élève coranique) dont elle participe à la construction de la personnalité en lui inculquant des valeurs cardinales comme l’humilité, la patience, la tolérance, le respect de la différence …
Aussi, devons-nous admettre que beaucoup d’enfants-talibés, pour satisfaire leur droit à l’alimentation, se trouvent dans l’obligation d’aller mendier, et jadis, de maison en maison, aujourd’hui, de plus en plus, dans la rue, en quête d’argent de préférence.
Egalement, la satisfaction de ce besoin fondamental pour tous les ménages, l’alimentation, une des six (6) dimensions de l’étalon de mesure du niveau de vie des populations en micro-analyse (en plus de l’habillement, l’habitat, l’éducation, la santé et les conditions de travail), pousse bon nombre de familles à envoyer et, des fois maintenir leurs enfants dans la rue, comme sources de revenus.
Nous voyons alors, nous n’irons pas jusqu’à préconiser de faire la typologie de la provenance des enfants trouvés dans la rue, mais force est d’admettre qu’il n’est pas question de laisser ce constat regrettable qui a déjà pris une ampleur assez importante, de se transformer en fait social au point de nous recommander de ne pas chercher à lui trouver une solution, des solutions autant pour moi.
Pour tout adulte, en voyant un enfant en grande fréquence dans la rue, il faudrait avoir le courage de se dire et dire à qui de droit ce que l’on pense et ce que l’on sent si on n’est pas en mesure d’agir autrement.
Pour chaque famille concernée, la résolution de problème partant d’abord de la reconnaissance du problème, il sera recommandé de se concerter à propos du ou des enfants de la famille en situation d’enfants dans ou de la rue, afin d’identifier toutes les solutions possibles, d’en choisir une et la mettre en œuvre avec un esprit de groupe et une dynamique collective incluant au maximum tous les membres de la famille.
Pour les communautés, il importe, à travers les organisations communautaires de base, d’initier et promouvoir, à titre démonstratif pour une généralisation progressive, des actions de retour à la solidarité et l’entraide qui, à la longue, contribueront significativement à la réhabilitation de la prise en charge communautaire des problèmes et préoccupations familiaux et des autres institutions sociales comme les « daras » qui ont une place et un rôle extrêmement importants dans l’éducation des enfants de notre pays.
Pour les collectivités locales, afin de jouer pleinement leur rôle dans le changement, non des comportements mais des situations de risques qui favorisent la situation indésirable des enfants de la rue, il est aujourd’hui plus que jamais impératif que, en rapport avec les services techniques compétents, les organisations communautaires de base et les autres co-acteurs concernés, sur fonds propres comme sur les fonds de dotation, notamment les crédits alloués pour l’éducation, la jeunesse les sports et les loisirs, l’action sociale, des projets et programmes novateurs soient conçus, financés, mis en œuvre, suivis et évalués.
Pour l’Etat, nous tenons à contribuer à la clarification de ce qui suit :
- Le Ministère en charge de l’enfance est certes un département concerné et préoccupé par le phénomène des enfants de la rue, tout comme d’ailleurs la Délégation générale à la Protection sociale et à la Solidarité nationale ; mais, il faut surtout actionner le Ministère de la Santé et de l’Action sociale, à travers la Direction générale de l’Action sociale, pour les raisons suivantes :
- Le « retrait des enfants de la rue » est perçu par beaucoup de sénégalais, et des fois même présenté et défendu par des acteurs étatiques, comme une simple lutte contre la mendicité en général, et contre celle des « talibés » en particulier ; ce slogan très accrocheur risque de ne pas enregistrer les effets escomptés, alors qu’en marketing social, il est ici très à propos puisqu’il s’agit d’une cause non réformiste, encore moins révolutionnaire, mais d’une vraie cause d’aide ; et les agents de changement les plus appropriés se trouvent être les travailleurs sociaux et le MSAS est le département qui en disposerait le plus en ce moment ;
- La mendicité est développée comme mécanisme de survie par les populations en situation de pauvreté, de précarité ou même de vulnérabilité et les enfants de la rue, utilisés par les familles ou d’autres institutions sociales en situation de besoin, sont déjà exposés à plusieurs risques à tel enseigne que l’on devrait privilégier, à la place de mesures répressives, une approche professionnelle visant la décristallisation de leur situation psychologique et sociologique indésirable pour déclencher le mouvement vers une nouvelle situation dans laquelle il faudra les recristalliser ;
- Tout changement devra faire face à des formes de résistance qui, en somme, se résument en trois (3) types, les résistances liées au projet de changement, d’autres liées à l’agent de changement et enfin celles liées au mode d’implantation du changement ; et les agents de l’Etat devant assurer auprès des enfants eux-mêmes, de leurs familles et des autres institutions sociales, des organisations communautaires de base, des collectivités locales, le portage de ce « retrait des enfants de la rue » sont, certes en nombre insuffisant, mais présents sur la quasi-totalité du territoire national à travers les Services régionaux de l’Action sociale (SRAS), les Services départementaux de l’Action sociale (SDAS) et les Centres de Promotion et de Réinsertion sociale ( CPRS) respectivement chargés de la coordination, la supervision et l’exécution de la politique de l’Etat en matière d’Action sociale avec malheureusement des crédits budgétaires extrêmement insuffisants.
- Il est vrai qu’en toute action, fut-elle de la part de l’Etat, Puissance publique par Excellence, la prise en compte de la perception par les autres est importante pour apporter les mesures correctives nécessaires ; cependant, il faut, par l’analyse causale, chercher à identifier, en dessous de la partie visible de l’iceberg, les causes soujascentes et les causes profondes du maintien des enfants dans la rue et, pour ce faire, à défaut de convoquer les assises de l’enfance, ne faudrait-il pas verser dans le panier du dialogue social national, la problématique des enfants de la rue pour recueillir le maximum de propositions de solutions de la part de tous les acteurs ; et, à cet effet, la place des acteurs sociaux comme les représentants des acteurs particulièrement concernés par cette question y serait utile.
Mouhamadou Rassoul Diagne
Travailleur social
1er Secrétaire élu du Conseil départemental de Tivaouane
Email : [email protected]
Le Sénégal est un pays de moins de 13% de musulmans, pourtant nous faisons comme si nous étions les seuls musulmans au monde ! Comment les autres peuples musulmans qui pourtant, ont plus d’érudits qui sortent des grandes écoles du Caire, d’Islamabad et d’ailleurs font-ils pour que leurs enfants mémorisent le coran et comment deviennent-ils après des érudits ? Ces enfants d’autres peuples mendieraient-ils dans les rues pour avoir de quoi manger ? Ceux qui leurs enseignent le coran leur exigent-il de ramener de l’argent ? Qu’on ne nous racontent pas des histoires qui ne tiennent pas face à l’analyse lucide !
Le Sénégal est un pas de moins 5% de non musulmans et 95% de musulmans SUR 14 MILLIONS D’HABITANTS, pourtant…..