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Décentralisation confisquée, par Mamadou Sy Tounkara

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Le processus de décentralisation amorcé au Sénégal est un échec au vu de résultats tangibles en ce qui concerne le bien-être et le mieux-être des populations. Il n’y a aucune problématique économique, sociale ou environnementale qui ait été prise en charge avec succès par les collectivités locales sénégalaises (communes, communes d’arrondissements, communautés rurales). Aucune collectivité ne peut présenter un bilan luisant sur les domaines de compétence qui leur ont été transférés : environnement et gestion des ressources naturelles ; santé, population et action sociale ; jeunesse, sports et loisirs ; culture ; éducation ; planification ; aménagement du territoire ; urbanisme et habitat. Des camisoles manifestement trop grandes pour elles. L’Etat central était en phase de « désengagement » imposé par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international et les avait refilées en 1996 à des exécutifs locaux non préparés et créés sur fond de visées politiciennes.
La règle est simple. Seuls les politiciens professionnels peuvent être élus et prétendre aux postes de décisions. Verrouillage systématique. Le citoyen ordinaire est exclu d’office. Il n’est permis à aucun citoyen simple de vouloir être un exécutif local s’il n’est affilié à un parti politique. Les grands partis et les coalitions de partis accaparent tout. Cette confiscation de la décentralisation par les politiciens est, en grande partie, responsable de cet échec programmé. N’importe quel novice s’intéressant à la projection et à la prospective pouvait faire la chronique et l’annonce de cet échec.
Et pour cause, le développement local n’est pas affaire de politiciens. C’est une affaire sérieuse, très sérieuse. Le développement local est une science et des pratiques d’engagement objectives éloignées du tâtonnement et de la gabegie. Il suppose de la stratégie, de la planification, de l’exécution méthodique, du suivi-évaluation. Bref, une culture du résultat appréciable pour le citoyen d’aujourd’hui et les générations futures. C’est, bien-sûr, diamétralement opposé à la logique politicienne basée sur la prédation, le clientélisme, le copinage et le népotisme. Quel est le pourcentage d’élus locaux ayant appris, ne serait-ce que les rudiments du développement local ? Comment peut-on être performant dans l’ignorance et la ruse politicienne ? Comment peut-on développer une collectivité locale avec un personnel politicien ? Comment peut-on faire ce développement lorsque 90% du budget passe par la trappe des frais de fonctionnement ?
Hélas, l’Acte 3 de la décentralisation ne posera pas les jalons nécessaires vers de vraies collectivités locales de développement : mettre le citoyen ordinaire ayant de l’expertise au cœur du processus décisionnel et barrer la route aux politiciens ignorants et prédateurs. Une seule alternative alors : attendre l’Acte 4.
Mamadou Sy Tounkara

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