A Kaolack, Fatick, Bambey, Mbacké, ou Diourbel entre autres, les détenus sont transportés par les Ndiaga Ndiaye pour rejoindre les tribunaux. Menottes aux poings, ils sont régulièrement trimbalés dans les rues pour aller assister à leur procès. Un véritable désordre dans un pays de droit.
Depuis sa prise de fonction, les dossiers à diligenter se multiplient dans son bureau niché au 9ème étage du Building administratif. En se rendant ce matin à la Maison d’arrêt et de correction de Rebeuss, au Camp pénal de Liberté 6, au Fort B et au Cap manuel, il aura l’opportunité de constater les conditions de détention des prisonniers. De toutes les façons, elles ne sont pas reluisantes et ne s’améliorent pas malgré le combat des organisations de défense des droits de l’Homme.
Aujourd’hui, l’actualité est cristallisée par l’incident d’avant-hier qui a secoué une frange de l’opinion consternée par cette image qui montre un détenu menotté et marchant dans la rue. «C’est une atteinte à la dignité humaine», s’est indigné le président de la Ligue sénégalaise des droits humains (Lsdh). D’après Me Assane Dioma Ndiaye, l’administration pénitentiaire est «dans le dénuement total». Ce qui contraint ses travailleurs de faire recours à certaines méthodes comme celle-ci pour assurer le fonctionnement de la justice. «Dakar dispose au moins de ce luxe», raille-t-il. Le seul véhicule dédié à cette tâche qui, étant tombé en panne avant-hier, a repris hier ses rotations.
A Kaolack, à Fatick entre autres, les procureurs sont obligés de faire appel aux associations des transporteurs en commun pour «transporter les détenus». Dans ces villes, il est fréquent de voir les détenus s’entasser dans les « Ndiaga Ndiaye » et traverser la ville. Il faut aussi savoir que dans ces villes, les détenus sont trimbalés dans les rues en «totale violation» de leur droit et sous les regards inquisiteurs. Menottes aux poings. «On les fait traverser les marchés avec les menottes sous une escorte. C’est une atteinte à leur dignité», dit un interlocuteur qui travaille dans l’administration pénitentiaire. Les tribunaux, contraints de vider les piles de dossiers qui s’entassent, font recours à tous les moyens pour vider les contentieux judiciaires. «Parfois, il s’agit de nécessité parce que les conditions ne sont pas réunies. Comme nous n’avons pas une logistique suffisante, nous sommes obligés de bricoler», se décharge-t-on.
Il est, note Me Assane Dioma Ndiaye, regrettable que les maisons d’arrêt et de correction ne disposent pas de moyens de transport adaptés pour respecter davantage la dignité humaine et respecter les droits des détenus. Selon le président de la Ligue sénégalaise des droits de l’Homme, il est urgent de renforcer et d’améliorer les conditions de travail de l’administration pénitentiaire. Cette amélioration souhaitée, estime-t-il, renforcerait la situation des détenus et sécurisera le personnel pénitentiaire «souvent sanctionné en cas d’évasion alors qu’on ne leur permet pas d’exécuter correctement leur tâche».
Ancien défenseur des droits de l’Homme, le ministre de la Justice ne peut pas rester insensible à tous ces problèmes qui assaillent ce secteur. Dès sa prise de fonction, il a été occupé par la révolte des détenus de la prison de Liberté 6 qui dénonçaient des cas de torture. L’administration pénitentiaire avait démenti ces informations en soutenant que les «prisonniers détenaient dans leurs cellules des téléphones portables et du chanvre indien». Une enquête commanditée par le ministère de la Justice avait révélé qu’on avait saisi du chanvre indien et aussi 250 portables.
Diourbel, Mbacké, Bambey : Le mal vivre des détenus
Les prisons du Baol n’échappent pas aux impairs de la logistique. Il est vrai que l’incident d’avant-hier a jeté l’émoi dans l’opinion. Mais, ces pratiques sont presque banales dans les régions où ces manquements sont intégrés dans le fonctionnement de la justice. Comme si de rien n’était. Alors que Mbacké et Diourbel disposent de vieux véhicules avec plus de dix ans d’âge, la ville de Bambey est dépourvue de ce moyen de transport. Dans ces villes, les détenus aussi sont transportés à bord de taxis, de cars Ndiaga Ndiaye ou bien même à pieds, menottés. Sous le regard des populations, ils sont trimballés dans les rues pour rejoindre le tribunal qui doit statuer sur leur cas.
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