Il semblait s’être donné pour mission de faire partir le Dg pour prendre sa place à la Bnde. Malheureusement, il n’a pas été suivi dans ses manœuvres par certains actionnaires, notamment par l’Etat majoritaire. L’ancien ministre Amadou Kane en a donc tiré les conséquences et remis hier sa démission. Il se donne ainsi le temps de s’occuper de ses autres affaires.
Sa fin rappelle celle d’un autre putschiste au petit pied qui a fait l’actualité ces derniers jours, dans un pays pas trop lointain du Sénégal. Mais lui au moins a eu le loisir de rédiger sa lettre de démission. Le président du Conseil d’administration de la Banque nationale de développement de l’économie (Bnde), M. Amadou Kane, a démissionné hier de ses fonctions d’administrateur de ladite banque, et par voie de conséquence, de celles de Pca. S’il n’a pas, dans sa correspondance aux administrateurs, donné les raisons qui l’ont poussé à déposer les armes, tout le monde aura compris que le fait que le ministre de l’Economie et des finances l’ait désavoué en demandant le report de la réunion du Conseil d’administration que lui M. Kane avait convoqué pour le jeudi 1er septembre dernier, mettait à nu ses manœuvres visant, à tout le moins, à déstabiliser la banque, ou au mieux, à en transformer les fondements pour la dévoyer de sa mission originale.
Comme Diendéré, Amadou Kane a donc tiré les conséquences de son aventure et déposé les armes avant que les conséquences ne deviennent trop tragiques pour lui. Même si en partant, il a tenté de se donner le beau rôle, en souhaitant que la Bnde puisse poursuivre «avec succès sa mission de financement de notre économie, avec les Pme-Pmi comme cœur de cible, dans le respect des normes bancaires». Mais personne n’est dupe pour autant.
La banque est positive, le Pca veut un audit
Les lecteurs du journal Le Quotidien se rappellent que cette publication a dévoilé la stratégie mise en place par celui qui vient de démissionner -avec effet immédiat- de son poste de Pca pour faire sauter son directeur général. Alors qu’il n’est séparé de ce dernier que par un plancher d’étage, le Pca n’a pas jugé utile de demander des comptes au directeur général de la banque sur des griefs qu’il nourrissait à l’égard de sa gestion. Il a plutôt préféré le contourner en produisant une lettre adressée au Conseil d’administration, citant des éléments à charge contre le travail de M. Thierno Seydou Nourou Sy et ses collaborateurs, et demandant un audit.
D’autres administrateurs ainsi que des employés de la banque ont estimé que les résultats de l’institution étaient suffisamment positifs pour battre en brèche cette demande qui, en plus, avait l’inconvénient, alors que la banque est encore très jeune, de lancer un message négatif à l’endroit des clients et des différents partenaires. C’est ainsi que le Dg est également monté au créneau pour signifier au Conseil que s’il faisait droit à la demande du Pca, il ne lui resterait d’autre option que de remettre sa démission. Et nombre de gens se sont alors rappelé la volonté jamais dissimulée dès le départ de M. Kane de prendre les rênes de la Bnde. Mais les gens savaient également que l’ancien Dg de la Bicis n’a jamais masqué son aversion à financer les Pme, estimant que ce ne pouvait être un créneau porteur pour une banque, préférant à la place ce qu’il a eu à faire pendant plus de trente ans dans les filiales de la Bnp Paribas. Et cette manière de voir rejoint parfaitement les souhaits de certains actionnaires qui, ayant des besoins d’argent pour leurs propres affaires, ont voulu pouvoir avoir la possibilité de se servir dans les caisses de «leur» banque.
Risques de conflits d’intérêts
Mais cette option n’était pas celle qui a présidé à la transformation du Fonds de promotion économique (Fpe) en banque de financement des Pme, depuis Abdoulaye Wade jusqu’à Macky Sall. Et en tant que premier ministre de l’Economie et des finances de Macky Sall, Amadou Kane avait été à la manœuvre du processus qui a abouti à l’agrément de la Bnde, en passant par le tour de table pour lui trouver des actionnaires, ainsi qu’un partenaire stratégique solide et crédible. Et même si le choix du Dg lui avait été quasiment imposé par son Premier ministre, il n’avait pas rejeté la candidature de M. Sy. Même si par moments il avait lâché comme sous forme de boutade que si l’on ne trouvait personne pour le poste, lui était «disposé à (se) sacrifier». Laissant de côté les questions d’éthique et les conflits d’intérêts que cela aurait engendrés.
D’autres sinécures
Quoi qu’il en soit, en partant, Amadou Kane ne perd pas tout. Outre le fait de sortir la tête haute d’une situation qui devenait quasiment intenable pour lui, l’ancien Pca pourra toujours se consoler avec sa planque à la Banque africaine de développement (Bad), où Macky Sall l’avait casé au titre su Sénégal. En plus, il aura maintenant plus de temps pour s’occuper de ses propres «affaires», notamment de son cabinet de consultance pour lequel il a longtemps sollicité des marchés de l’Etat. Cela, sans compter bien sûr ses indemnités de départ…
Le Quotidien