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Devoirs de rentrée – Par Abdoulaye Ndiaga SYLLA

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« L’homme de bien situe la justice au-dessus de tout. Un homme qui a la bravoure mais qui ignore la justice sera un rebelle. Et si en plus il est médiocre, alors il ne sera qu’un brigand »
Confucius

L’an 2000 ouvrait un nouveau millénaire et consacrait au Sénégal, quarante années après son indépendance, l’alternance politique avec l’accession de Me Abdoulaye Wade à la présidence de la République. Douze ans après, la carte politique a changé. La transhumance de caciques socialistes vers les prairies libérales, les convergences établies entre des formations communistes, nationalistes, panafricanistes et l’adversaire d’hier, porte étendard du socialisme démocratique, l’irruption de nouveaux acteurs, l’affirmation d’une nouvelle citoyenneté sur les flancs des organisations syndicales, des confréries religieuses, ont sensiblement modifié la donne. Dans un monde qui a connu de fortes mutations, 2012 sera, pour le Sénégal, l’année de l’affaissement ou des ruptures longtemps attendues. Avec les deux modes de gouvernance administrés au pays de 1960 à 2000 et de 2000 à 2012, il est permis d’espérer que le choix de la majorité sera celui de la raison et non du cœur.

Dans ce contexte particulier, l’homme qui assume aujourd’hui la plus haute charge de l’Etat a, pour l’heure, choisi de solliciter les suffrages de ses compatriotes. Une lecture des articles 27 (La durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. Cette disposition ne peut être révisée que par une loi référendaire) et dans les dispositions transitoires, de l’article 104 (Le président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme. Toutes les autres dispositions de la présente Constitution lui sont applicables) de la Constitution votée par référendum le 7 janvier 2001, lui interdit de s’aligner pour briguer un nouveau mandat. Un autre déchiffrage valide sa candidature. Question d’interprétation. S’il se sent en capacité de prolonger son bail au Palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor, personne ne peut lui contester le droit d’exprimer le vœu de s’engager, pour la septième fois (un record), dans la course. Sera-t-il retenu sur la liste des concurrents arrêtée par le Conseil constitutionnel vingt neuf jours avant le rendez-vous du 26 février 2012? Il appartient au Cinq Sages de cette juridiction des élections, et à eux seuls, assez outillés pour trancher, d’en décider. Il reste que si l’article 104 figurant dans les dispositions transitoires avait été rédigé d’une autre encre et avec des termes ne laissant place à aucune équivoque, le débat serait autre que celui alimenté depuis des mois.

Sortir de cette précampagne électorale pourrie par tant de bruit et de fureur, de peurs alimentées dans le pays pour connaître des offres politiques, des projets de société, relève d’une pressante urgence. Si les adversaires de Me Abdoulaye Wade, comme ses partisans, jouent sur le double registre du juridique et du politique, en mettant la pression sur le Conseil constitutionnel et en tentant de manipuler l’opinion, il leur faudra assumer devant l’histoire tout ce qui adviendra si le pays sombre dans le chaos. L’acte sera alors prémédité et la trahison de notre choix à vivre ensemble sur cette terre que nous avons en partage, établie. Si la raison ne vient pas visiter la classe politique, le Sénégal donneur de leçons de démocratie en Afrique, se retrouvera sur la liste des derniers de la classe. Les logiques d’appareil – l’histoire l’a montré à suffisance – ne peuvent être que meurtrières dans les périodes de surenchère politicienne, comme c’est le cas aujourd’hui.

Le champ politique, dans ses dimensions gouvernementale et tribunicienne, a du mal à nourrir un militantisme généreux et engagé à illustrer l’idéal servant de plateforme pour la conquête ou la conservation démocratique du pouvoir. Le camp présidentiel s’abîme dans un immobilisme qui consacre la toute puissance d’une Constante et la volatilité de Variables décidés à assumer ad vitam aeternam cette posture peu valorisante. Qu’adviendra t-il du Parti démocratique sénégalais (Pds) et de ses alliés si la candidature de Me Abdoulaye Wade est invalidée ? La réponse coule de source. La Constante écartée, les Variables en mal d’Invariant pouvant servir de repère vont fluctuer ou disparaître de la scène politique. N’empêche, la majorité présidentielle, pour ce qu’on en sait au moment d’écrire ces lignes, a décidé de prendre le risque. Grand bien lui fasse !

«Benno Siggil Sénégal» divisé sur l’unité qui devait être son substrat, s’auto flagelle en cherchant une improbable candidature unique qui finira par ruiner sa cohésion. Il lui faudra revoir ses gammes et comprendre que la pluralité des candidatures de leaders politiques de formations assez représentatives sur l’échiquier national et de personnalités de la société civile reconnues pour leur compétence, leur crédibilité et leur engagement matinal au service du bien public est sa meilleure chance d’avoir un porte-drapeau au second tour et un report des voix aidant, des raisons d’espérer gagner. Comme le fit un certain Abdoulaye Wade avec le Front pour l’alternance (Fal), remis au goût du jour, sous un nouvel habillage par la coalition. C’est à croire que le traumatisme né de la présidentielle de 2007, mal préparée, n’a pas encore libéré les esprits des vaincus. Croire que le coup réussi aux élections locales de 2009 peut servir de référent dans l’élaboration de la stratégie, c’est se tromper d’époque et de consultation. Le coefficient personnel valorisé par un appareil prime, dans la rencontre entre une femme, un homme et son peuple , ce à quoi se résume l’élection présidentielle, sur le groupe, l’équipe dans des élections locales. Le maire, le président de Conseil régional, rural et les membres des bureaux ne sont pas élus directement au suffrage universel.

L’éthique de responsabilité qu’il faut bien convoquer dans cette controverse pouvoir-opposition sur la recevabilité ou non de la candidature de Wade et – pourquoi l’écarter – d’un ou d’autres candidats pour d’autres raisons, commande aux protagonistes de se conformer à la procédure. Le Conseil constitutionnel, seul arbitre en la matière, est bien cette juridiction des élections qui reçoit les candidatures et dresse la liste des postulants habilités à prendre part à la consultation populaire. On ne peut, simple question de cohérence en la matière entre le dire et le faire, accepter, comme le stipule la loi, que toutes les candidatures lui soient soumises et rejeter la validation ou l’invalidation fondée en droit. L’honnêteté commande, lorsqu’on est dans de telles dispositions d’esprit, de récuser le Conseil constitutionnel, de se tenir hors de la compétition électorale et laisser ainsi le champ libre à l’adversaire qu’on voulait voir disqualifié.

La parenthèse des navétanes en passe d’être close, il est temps que les lignes bougent. Le dialogue politique étant rompu, il faut, tout en veillant à respecter le calendrier électoral, faire appel à des facilitateurs, personnalités marquantes de la société civile dans toute sa diversité, pour installer un Conseil de sages. Un pacte signé, par tous les candidats déclarés s’engageant, devant un Conseil de sages représentatif de la nation, à respecter le verdict du Conseil constitutionnel, est le minimum à attendre de républicains, si tant est qu’ils se montrent dignes de diriger le pays.

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