XALIMANEWS- Le phénomène « Barça ou Barsaq » refait surface au Sénégal et inquiète plus d’un .Il est très difficile de dénombrer le nombre de jeunes, morts dans le désert ou en Atlantique en voulant rallier l’Europe. Depuis le début du mois d’octobre, il ne se passe un jour sans que l’on ne voit des vidéos montrant des pirogues remplies de jeunes échouer aux larges des côtes sénégalaises ou mauritaniennes. Selon un communiqué de l’État du Sénégal, 14 bateaux transportant 663 migrants ont quitté le Sénégal pour les îles Canaries. En 18 jours (entre le 7 et le 25 octobre), la marine sénégalaise a intercepté 5 pirogues en partance pour l’Europe. Au total, 388 personnes ont été secourues. Et pour l’OIM ( Organisation internationale de la migration) le tiers des pirogues qui ont quitté les côtes sénégalais pour les îles Canaries ont subi un accident ou un naufrage. Au moins 400 morts ont été dénombrés en moins de 2 mois (Parmi eux des étudiants, et Doudou un jeune footballeur de 14 ans embarqué par son père qui voulait qui aille faire carrière en Italie).
Certains trouvent que cette forme de revolte qui pousse les jeunes à se suicider est imputable à l’État qui en est entièrement responsable puisqu’il avait la possibilité d’endiguer ce mal depuis le début mais il a laissé le phénomène empirer. d’ailleurs, ce 13 Novembre est décrété journée de Deuil national en hommage aux victimes de l’émigration irrégulière par des sénégalais sur les réseaux sociaux. Ces derniers pointent du doigt le silence des autorités face à ce phénomène.
Malgré la création des tructures comme l’ANPEJ, la DER (soupçonnées de clientélisme politique), le mal continue. Les jeunes porteurs de projets ne sont pas soutenus comme il se devrait. L’État, pour se dédouaner joue avec les mots et parle de problème d’employabilité à la place de problème d’emploi.
Les jeunes qui peinaient déjà à trouver un emploi sont laissés à eux même avec l’arrivée de la pandémie à Covid-19. Ceux qui allaient en mer ne peuvent plus se nourrir avec leur activité qui est la pêche puisqu’il n’y a plus de poissons à cause des bateaux étrangers qui pillent nos produits halieutiques. Et pour eux, leur seule voie de salut se trouve être l’Europe qu’ils doivent rallier par tous les moyens.
Il urge, ainsi de réorienter les jeunes, de les sensibiliser sur le fait que l’Europe n’est plus l’Eldorado ce qui fait que, une fois sur place, les candidats à la migration s’adonnent à la prostitution ou au trafic de drogue. Ce qui explique le nombre croissant de sénégalais détenus dans les prisons en Europe (Le Sénégal compte au total 10 mille 564 détenus à la date du 26 novembre 2018).
L’exemple des nigérians et des guinéens résidant au Sénégal qui parviennent à tirer leur épinglepingle du jeu est parfois agité. Ainsi, il est reproché à ces jeunes candidats à la migration de sous estimer certains métiers, d’être pressés et de manquer de patriotisme. Ce qu’ils refusent d’accepter.
La criminalisation de la migration irrégulière est préconisée mais ceux qui la prônent sont sans savoir que ces jeunes sont arrivés à un stade de leur vie où ils préfèrent mourir que de rester au Sénégal et regarder, impuissants, leurs parents vivre dans la misère. Donc, il urge de trouver une alternative en mettant en place les mécanismes de répartition (de manière rationnelle) des richesses du pays et en encourageant les jeunes à investir dans l’agriculture et l’artisanat par exemple et de gérer le problème de la réinsertion des migrants de retour. Ce qui est incontournable puisque les autorités espagnoles (qui, pourtant avaient besoin de main d’oeuvre puisqu’avec la pandémie, il y a eu beaucoup de décès) ont décidé de fermer les camps qui accueillent les migrants et pour monter leur fermeté, des vols ont été organisés pour le rapatriement des migrants qui arrivent par pirogues. 738 Sénégalais seraient arrivés en Espagne entre le 6 et le 8 novembre, ce qui explique cette décision radicale des autorités espagnoles.
Plusieurs organisations qui luttent contre la migration irrégulière ont vu le jour au Sénégal. Et la dernière en date est le collectif « Lou Waral Lii » qui regroupe une trentaine d’organisations. Les membres de ce collectif dénoncent avec la plus grande énergie le fait que les autorités veuillent criminaliser le phénomène de la migration irrégulière. Pour eux, l’État est le seul responsable et qu’en réalité, » l’absence d’une politique migratoire se traduit par du pilotage à vue et transforme le pays en gouffre à milliards obtenus de la coopération internationale ».
Le président de l’Ajrap (Association des jeunes rapatriés de Thiaroye sur Mer), créée en 2006 et membre de « Lou waral Lii » dit ne pas être surpris par la recrudescence du phénomène puisque depuis 2007, il n’a cessé d’alerter quant au retour du phénomène Barça Barsaq : » même lors du dernier Forum Social mondial organisé à l’Ucad, j’avais dit devant toute l’assemblée présente à la rencontre que les jeunes continueront à prendre les pirogues pour rejoindre les îles Canaries puisqu’ils n’ont pas d’autres alternatives. Il n’ont jamais vu la couleur des milliards que les autorités disent avoir injecté dans la lutte contre la migration irrégulière. Malheureusement on ne prend pas en considération ce que l’on dit. Les temps sont très durs et ceux qui allaient en mer rentrent toujours bredouilles à cause des accords de pêche entre l’État du Sénégal et l’Union européenne qui font qu’il n’y a plus de poissons. Ces pêcheurs qui sont des soutiens de familles n’ont qu’une seule alternative, c’est de quitter le pays au prix de leurs vies », se désole Moustapha Diouf. »Le Sénégal a tout les atouts et les ressources, nous avons une population jeune, la mer, le zircon, le pétrole,… mais, les autorités ne sont intéressées que par la politique. Pendant que les eaux engloutissent les jeunes, ils sont là à parler de remaniement et c’est vraiment dommage. Ils disent qu’il ya du travail pour les jeunes alors qu’il n’en est rien, c’est le bas peuple qui souffre, malheureusement, de leur mal gouvernance », fait-il remarquer.
Très remonté contre les autorités, il plaidera pour la réinsertion des migrants de retour : » on ne nous considère pas et l’État ne nous accompagne pas pourtant nous abattons un travail remarquable dans la formation, la sensibilisation, le suivi et l’insertion des migrants de retour ».
»Que les gens arrêtent de penser que ces jeunes qui prennent les pirogues n’ont rien dans la tête, quelqu’un qui décide de sortir sa famille de la misère est doté d’intelligence et ce n’est pas tout le monde qui peut braver l’océan et longer 4970,5 kilomètres pour aller arriver en Espagne en l’espace de 5 jours avec une pirogue de 23 mètres de long et 2 mètres 500 de large avec 150 à 200 personnes à bord », precise-t-il avant de souligner que si ces jeunes ont choisi ce moment pour partir en masse c’est parce qu’ils sont conscients qu’à partir du mois de janvier, la mer ne sera plus propice pour le voyage.
»Les financements à coût de milliards qu’ils disent octroyer aux jeunes pour les fixer dans leurs localités respectifs ne reviennent malheureusement pas aux ayants droits. Je suis en contact permanent avec ces jeunes qui sont à Thiaroye, Rufisque, Cayar, … que les autorités sont censées aider mais ils n’ont rien reçu. Les autorités ne sont même pas au courant de la misère que vit la jeunesse et ne cessent de se sucrer sur son dos. Le plan Reva en 2006, tout le monde sait que c’est purement politique et ceux qui ont bénéficié des terres sont les militants ou proches et amis de ceux qui l’ont géré. », souligne-t-il très déçu. Il ne manque pas de rappeler qu’il ne cesse de sensibiliser les potentiels candidats à la migration sur le fait que prendre les pirogues pour se rendre en Europe n’est pas la solution: « je ne les encourage jamais à tenter la migration irrégulière bien au contraire, je leur demande de trouver une autre alternative », renseigne-t-il.
Lors du Forum sur la paix ouvert ce jeudi à Paris, le Président Macky Sall s’est prononcé sur ce phénomène. Pour lui l’Etat à lui seul ne peut pas apporter une solution à ce fléau qui gagne du terrain: « c’est de notre responsabilité de créer des conditions pour fixer les jeunes, donner de la formation, de l’emploi même si l’emploi salarial seul ne peut pas prendre en charge tous les besoins de l’Afrique. Mais il faut une inclusion et une solidarité entre les Etats pour apporter des solutions durables», a-t-il soutenu. Espèrons qu’à son retour, il va demander à son gouvernement qui vient d’être formé de se mettre vite au travail afin que cette vague meurtière soit un mauvais souvenir.
Mariama Kobar Saleh (Xalima)
Un article pertinent qui doit retenir l’attention et des commentaires du grand nombre. L’éducation, l’instruction, la formation et l’emploi sont les maitres mots.. Notre pays est jeune et il y a beaucoup à faire dans tous les domaines. Les jeunes guinéens nous en donnent l’exemple Vouloir, c’est pouvoir.