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Doudou Sidibe «L’emergence du M23 traduit l’echec de l’opposition traditionnelle»

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Ancien membre du mouvement étudiant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et journaliste aux défunts quotidiens Le Matin et L’Info 7, Doudou Sidibé est, aujourd’hui, au cœur de la stratégie politique de ce qu’il est convenu d’appeler la Mouvance présidentielle dans l’Hexagone. De passage dans la capitale française, pour les besoins de la Conférence internationale sur la Libye, notre reporter a fait avec lui un tour d’horizon des questions qui agitent, à quelques encablures de l’élection présidentielle de 2012, le Landerneau politique sénégalais.

Présentez-vous à nos lecteurs.Permettez-moi tout d’abord de saluer vos lecteurs et de féliciter l’équipe de votre journal pour avoir enrichi le paysage médiatique sénégalais à travers cette parution. Pour répondre à votre question, c’est toujours difficile de se présenter soi-même, mais puisque c’est un exercice auquel je ne peux pas échapper, je vais donc m’y conformer. Sur le plan professionnel, je suis enseignant-chercheur à Negocia, une Grande école de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, qui englobe aussi ESCP Europe, HEC et d’autres. Titulaire d’un doctorat en sciences politiques, mention relations internationales, j’enseigne aussi la communication politique à l’université de Paris-Est-Marne-La vallée. J’ai a été auparavant Chercheur-Visitant au CPASS (Center for Peace and Security Studies) à l’université de Georgetown à Washington. J’ai eu à publier deux ouvrages : «Stratégies de résolution des conflits en Afrique : le cas de la République Démocratique du Congo, Allemagne, Editions Universitaires Européennes, 2010, 500 pages» et «Démocratie et Alternance politique au Sénégal, Paris L’Harmattan, 2006, 229 pages». Sur le plan politique, je dirige la Fédération Nationale des Cadres Libéraux (FNCL) de France après avoir été, depuis la création en France de la Cellule Initiatives et Stratégies (CIS) en 2004, le chargé de l’information et de la communication. J’ai été, par ailleurs, pendant plusieurs années, membre du Mouvement des élèves et étudiants libéraux (MEEL) de France et membre fondateur de l’Union des Jeunesses Travaillistes et Libérales (UJTL).

Vous êtes le responsable en France de la Fédération nationale des cadres libéraux, qui a phagocyté la CIS, la CNCL et une autre structure. Comment managez-vous ce cadre avant-gardiste dans la politique du PDS ?

Je privilégie dans mon management le dialogue et la concertation. Si j’ai une idée, j’en parle, autour de moi d’abord, avant de la proposer en réunion pour discussion. Et je prends toujours compte des remarques des autres si elles sont objectives. Vous savez, quand on a le sentiment d’avoir participé à la réflexion en amont, on est plus dynamique dans l’exécution car on s’approprie l’idée, on la fait sienne. Avec ce style de management, j’ai toutes les chances de prendre une bonne décision, largement partagée et soutenue par tout un groupe.

Quelle est la place d’une structure de cadres dans un parti de masse comme le PDS ?

Les cadres ont un rôle prépondérant à jouer dans un parti politique. Les deux mamelles nourricières d’un parti politique sont : le recrutement et la formation. La massification d’un parti doit être suivie par la formation et l’encadrement. Et c’est là où les cadres doivent jouer un grand rôle car, de nos jours, beaucoup adhèrent à un parti politique sans pour autant maîtriser l’idéologie, les objectifs du parti et le rôle du militant. Les cadres participent, par ailleurs, à la réflexion et à la conception du projet politique mais aussi à la vulgarisation des idées de son parti. Il y a aussi un point fondamental, c’est la défense des idées de son parti. A quoi sert un cadre, s’il n’est pas capable de défendre les idées de son parti ? A quoi sert un cadre s’il n’est pas capable d’être une force de proposition ? Le cadre du PDS échappe aussi à ce rôle que j’ai décrit plus haut pour un cadre de manière générale. Je pense que nous, les cadres libéraux, nous devons nous investir utilement dans une campagne d’explication du bilan du Président Abdoulaye Wade.

Comment expliquez-vous les querelles qui ont miné, jusque dans un passé récent, les structures de cadres libéraux ?

Vous savez, dans toutes les structures qui regroupent des individus, il y a des contradictions. C’est l’ordre normal des choses. Carl Schmitt disait ceci : « La politique, c’est la constellation d’intérêts contradictoires ». Le tout, c’est de pouvoir taire les querelles à temps et de se réunir autour de l’essentiel, quand il faut. Aujourd’hui, les responsables des différentes structures de cadres ont mesuré les enjeux de l’élection présidentielle de 2012 et ont décidé de surseoir à l’adversité pour se retrouver dans une seule structure dirigée actuellement par le frère Serigne Mboup. C’est tout à leur honneur. La seule bataille politique qui vaille aujourd’hui, c’est celle du maintien du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) au pouvoir pour que l’alternance continue de changer le visage du Sénégal après 40 ans de règne désastreux du Parti Socialiste (Ps).

Cela dit, comment se porte le Pds en France ?

Je mentirai si je vous dis que tout est rose pour le Pds en France. Depuis un certain temps, les querelles de chapelle avaient pris le dessus. Chacun voulait être khalife à la place du khalife sans pour autant passer par les voies normales. Ceux qui nous ont rejoints sont devenus très pressés de ramasser des dividendes, alors qu’ils n’ont pas encore fait leurs armes. Ceux qui étaient là depuis très longtemps ont beaucoup servi le parti, mais il ne faut pas qu’ils oublient qu’ils doivent faire de la place aux nouveaux venus, et surtout leur donner la place qu’ils méritent. Ils n’ont pas assez pris la mesure de l’évolution du parti, sinon ils auraient anticipé sur les problèmes causés par la massification du parti pour mieux intégrer les nouveaux venus. Churchill disait ceci : «Il faut prendre le changement par la main avant qu’il ne vous prenne par la gorge». Voilà un peu le problème fondamental du Pds en France. Pour pallier ce problème, le président Wade a envoyé un commissaire politique pour faire un travail d’identification et de validation des secteurs afin de renouveler la fédération. Ce travail ne pouvant pas aboutir avant les élections, nous sommes condamnés à nous entendre pour aller ensemble aux élections. J’avoue qu’à l’heure où je vous parle, c’est cette ambiance d’échange, de rassemblement, d’unité et de partage qui règne dans le parti, mais il y a encore quelques réglages à faire.

Il se dit que l’Alliance pour la République (Apr) de Macky Sall a miné de l’intérieur le Pds dans l’Hexagone. Qu’en est-il ?

Si je comprends bien votre question, vous voulez dire qu’il y a encore des éléments favorables à Macky Sall, qui sont dans le parti en France. Je pense qu’il ne faut pas se fier aux rumeurs. Ceux qui véhiculent ces rumeurs sont dans la logique d’une guerre psychologique. Ceux qui étaient avec Macky Sall se sont très tôt manifestés et sont partis en toute responsabilité. Si on choisit de rester au PDS, c’est parce que l’on y croit. Je suppose alors que les militants qui sont restés croient aux idéaux du parti et sont fidèles au Secrétaire Général, Abdoulaye Wade. Aujourd’hui, personne ne peut détourner les militants du PDS au profit de qui que ce soit. Le PDS est majoritaire en France, l’élection présidentielle est une occasion pour le prouver en gagnant comme dans le passé.

La présidentielle de 2012 approche à grands pas ? Avez-vous déjà concocté un plan pour aller à cette échéance que d’aucuns qualifient de capitale ?

Bien sûr que oui. Nous avons l’intention de dérouler, dans les prochains jours, un important programme d’animation du parti. Nous avons en vue l’organisation de grandes conférences débats pour vulgariser les réalisations de l’alternance et qui seront animées par des personnalités politiques d’envergure venant de Dakar. Nous voulons aussi organiser des «Cafés politiques» qui consistent à aller vers les Sénégalais pour les sensibiliser avec des projections de vidéos sur les réalisations du Président Abdoulaye Wade. Aucun coin de la France ne sera épargné. C’est important que les Sénégalais voient comment le Président a transformé le Sénégal dans tous les domaines. Voilà, de manière ramassée, une partie de ce que nous comptons faire. Pour l’autre partie, on la dévoilera au moment opportun.

En tant que juriste, quelle analyse faites-vous du lancinant débat sur la légalité de la candidature de Me Wade ?

Cette question a fait couler beaucoup d’encre et de salive. Chaque camp a mobilisé des arguments pour défendre sa position. Je pense que le plus sage, aujourd’hui, c’est de transcender ces positions partisanes et de laisser le soin au Conseil constitutionnel de dire le droit, rien que le droit. Il faut que les Sénégalais en général et les politiques en particulier aient confiance en leurs Institutions. Ce qui contribue à les consolider et à les rendre plus crédibles. Toute démocratie a besoin d’Institutions solides car les individus sont appelés à passer alors que les Institutions demeurent. Le meilleur héritage que nos aînés peuvent laisser aux générations futures, ce sont des institutions fortes. Donc, pour moi, il est impératif que l’on arrête d’exercer une pression dangereuse sur les membres du Conseil constitutionnel en les menaçant ou en essayant tout simplement de les influencer avec des arguments qui ne tiennent pas la route.

Quelle est votre position sur un autre débat, tout aussi actuel au Pds, selon lequel le moment est venu, au-delà de la bataille juridique sur la validité ou non de sa candidature, pour Me Wade de passer la main ?

C’est une question qui effleure les esprits des libéraux car un jour ou l’autre, il sera amené à passer la main. Et je sais que le Président connaît, avec un timing très précis, quand il devra passer la main car, un jour, je lui ai entendu dire que le gouvernement est une école de formation de futurs d’hommes d’Etat. Donc, il sait qu’il y a des hommes et des femmes qui ont acquis de l’expérience sous son parapluie et qui sont capables de prendre la relève pour continuer à explorer les voies qu’il a déjà tracées. Mais, je pense que ce débat n’est pas opportun, même si on sait qu’il se posera un jour.

Il y a eu, au Sénégal, ce qu’on a appelé les événements des 23 et 27 juin.
Qu’est-ce que cela vous a inspiré ?

Il y a deux lectures que je peux faire pour la journée du 23 juin. D’abord, il faut se dire que le peuple est incontestablement un contre-pouvoir et le 23 juin, il a exercé son rôle de contre-pouvoir. En démocratie, les contre-pouvoirs sont nécessaires car c’est le pouvoir qui doit arrêter le pouvoir. Ensuite, le geste du Président Wade qui consiste à retirer le projet de loi pour privilégier la paix sociale est à saluer et montre qu’il est un vrai démocrate. Un tel geste n’existe que dans les grandes démocraties. Au Japon en 1985, le Premier ministre Yasuhiro Nakasone a dû retirer un projet de loi sur la réglementation du secret d’Etat sous la pression du peuple qui tenait à la liberté d’information. En France, le Président Jacques Chirac était obligé, en 2006, d’abroger la loi sur le Cpe (Contrat première embauche), sous la pression d’une jeunesse déterminée. Si on regarde de prés ce qui s’est passé au Sénégal, on peut dire que c’est la démocratie sénégalaise qui a finalement triomphé.

Quid de la folle nuit du 27 juin ?

Concernant la journée du 27 juin, communément appelée les émeutes de l’électricité, je peux dire aussi que les populations ont le droit de réclamer quelque chose qui est indispensable à leur vie quotidienne. Les coupures d’électricité sont préjudiciables à l’économie du pays. Je pense maintenant qu’avec le plan Takkal, qui est un plan jugé crédible par les bailleurs de fonds, il y a des raisons de croire que ce problème sera bientôt un mauvais souvenir. En effet, je ne peux parler de ces événements sans pour autant condamner les actes de violence qui les ont accompagnés. La violence, c’est l’incrédulité aux mots. Il faudra croire aux vertus cardinales du dialogue et de la concertation. On peut se faire entendre de différentes manières, sans s’adonner à la violence. Le bien public est sacré. Le gouvernement devrait être très ferme avec les casseurs pour que cette situation ne se reproduise plus. La sécurité de tous les Sénégalais n’est pas négociable. Le droit de manifester ne doit pas rimer avec insécurité. Je termine par souhaiter qu’il y ait des élections apaisées comme le Sénégal a l’habitude d’en organiser, car personne n’a intérêt que notre cher pays rejoigne les pays de la sous-région qui connaissent un conflit armé suite à un contentieux électoral.

Le mouvement M23 et la Société civile promettent de mener la vie dure au Président Wade en France. Que comptez-vous faire pour les contrecarrer ?

Ici en France, il n’existe pas de M23. La Société civile qui est là est profondément politisée car on retrouve presque les mêmes responsables dans les associations et les partis politiques. Si on parle alors du Sénégal, je pense que l’émergence du M23 et la montée de la société civile témoignent de l’échec des partis d’opposition qui sont incapables de jouer convenablement leur rôle. Maintenant, que pouvons-nous faire pour les contrecarrer ? C’est simple. Il suffit d’occuper le terrain en permanence et de répondre à la demande sociale.

En tant que Sénégalais qui a réussi à faire son trou à l’étranger, pensez-vous rentrer, un jour, pour servir votre pays?

A votre avis, si je suis engagé en politique, c’est pourquoi ? C’est justement pour servir mon pays, c’est pour rendre à mon pays tout ce qu’il m’a donné. Je suis profondément patriote. Mais pour l’instant, l’occasion ne s’est pas encore présentée. L’avenir nous dira.

PAPA SOULEYMANE KANDJI (LE PAYS)
ENVOYE SPECIAL A PARIS

PiccMi.Com –

 

4 Commentaires

  1. L’opposition tient présentement ce pouvoir de trahison nationale à la gorge et cet individu perdu dans ses projections vient décreter la mort de l’oppositon,vous ne perdez absolument rien pour attendre….

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