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Du vol de bagages à l’aéroport de Casablanca : Le long périple des sénégalais de la diaspora avec la RAM

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Des piles de bagages embarqués, une grosse porte qui s’enferme. La compagnie Royal Air Maroc (RAM), pour son vol régulier, transporte, le plus souvent, plusieurs colis, avec à son bord, le sort de nombre de personnes anonymes, d’entrepreneurs et de compagnies de fret. Ce mois de novembre, plusieurs plaintes ont atterri sur sa table avec comme seule visée, un vol de bagages à l’aéroport de Casablanca. Curieuse coïncidence : ils concernent tous des matériels électroniques, entre téléphones dernier cri et ordinateurs de nouvelle génération. Il cible, aussi, un grand nombre de compatriotes, établis au Canada. Ces derniers, désemparés, se sont confiés à Xalima…dans un ultime sursaut pour la survie de leurs affaires. Au moment où la RAM s’est murée dans un silence insondable…

Des rendez-vous manqués qui chamboulent plus d’un agenda. La RAM, gigantesque appareil, en apparence bien maitrisé, avec un personnel qualifié à bord, « engloutit » ainsi l’espoir d’une centaine de personnes… avec, à la clé, des pertes d’argent inestimables qui installent l’angoisse dans le rang des sénégalais, établis à Montréal, Québec, entre autres villes, et qui s’activent, régulièrement, dans l’acheminement de bagages au Sénégal. Cette situation, qui ne semble pas nouveau, est d’autant plus préoccupante qu’au mois d’octobre dernier, une dénonciation a été faite au sein de l’Assemblée nationale marocaine.

L’explosion du nombre de bagages et de valises perdus de nombreux voyageurs arrivant, en particulier lors des vols de la compagnie, à l’aéroport international Mohammed V de Casablanca, préoccupe Hassan Oumribte, député du Parti du progrès et du socialisme (PPS).

Le parlementaire marocain a, notamment, interpellé le ministre du Transport et de l’Équipement sur les pertes des bagages et les valises dans les aéroports du royaume. « Si habituellement le voyageur récupère ses bagages dès son arrivée, certains attendent de longues heures, qui se transforment parfois en plusieurs jours, ou sont surpris d’apprendre leur perte », a précisé Hassan Oumribte, dans sa question. Face à cette situation, « le voyage devient une épreuve pénible à la recherche des bagages, et une souffrance au lieu d’un moment de détente et de plaisir à retrouver proches et amis, allant même jusqu’à devenir une malédiction pour les voyageurs qui souhaitent passer leurs vacances loin de l’aéroport d’arrivée », a-t-il déploré.

Des faits récurrents qui touchent, aujourd’hui, les sénégalais de la diaspora dont la plupart utilise, expressément, la RAM pour acheminer leurs bagages à partir du Canada.

La compagnie devra, dès lors, faire face au tas de réclamations au moment où, invitée à donner sa version des faits par la rédaction de Xalima, elle s’est murée dans le silence.

Des valises qui repassent sous le contrôle…de voleurs anonymes

A l’aéroport de Casablanca, les escales de la RAM donnent tous leurs airs. Des créneaux qui profiteraient tout le temps à des voleurs, plus ou moins, méticuleux qui ciblent et ouvrent les valises, les cartons et autres paquets, contenant tout le matériel électronique.  Et rien n’est épargné !

A Montréal, l’heure est grave pour A. S., un résident sénégalais, bien connu dans le milieu du fret. Sa compagnie, en toute légalité, a conduit plusieurs opérations d’acheminement de bagages au Sénégal depuis sa création, il y a quelques années. Mais, ces derniers temps, et particulièrement en 2024, l’entreprise a connu de nombreuses pertes de bagages. « Ce mois de novembre, mes services ont perdu près de 100 pièces d’électroniques, pour la plupart des téléphones portables, notamment des IPhone 15 Pro max subtilisés à l’aéroport de Casablanca et c’est juste très regrettable », déplore l’enseignant reconverti, qui se voit aujourd’hui devoir rembourser à ses clients plusieurs millions, précisément une manne financière de 40 millions CFA. Loin de se décourager et à défaut de lancer des poursuites contre les services de la RAM qui s’avère être son partenaire, A.S. a préféré les interpeller et signaler ce énième vol qui, cette fois, s’affiche comme un gros coup…qu’il n’arrive pas à expliquer mais compte bien régler à sa manière.

Une mafia bien organisée ?

Si A.S prend les choses par les pincettes et espère une solution à l’amiable, d’autres victimes sont certains d’être les cibles d’un vol organisé… dont il impute la responsabilité à la RAM. « Les valises, les caisses, contenant tout le matériel électronique, semblent passer sous un contrôle tout particulier. Après, elles sont soigneusement refermées et arrivent vides à destination », explique cet autre manager aguerri à la tâche qui pense, après tout, à « une mafia bien organisée ».

Toujours est-il qu’ils ne comptent pas croiser les bras et entament, pour la plupart, des procédures à l’encontre de la RAM. C’est le cas de Mme Ndoya Dieng. Cette entrepreneure, s’activant dans le système GP à Montréal, a vu son monde basculer après une perte de bagages déclarée, au mois d’octobre, alors que tout le matériel électronique, composé de 11 ordinateurs et une vingtaine de téléphones qu’elle avait fait acheminer à Dakar, a disparu.

« Le plus patent, c’est qu’il ne touche qu’au matériel électronique, il n’y avait jamais eu de vol d’autres bagages ; peut-être un retard pour les valises contenant d’autres affaires. Mais sur ce cargo, contenant 5 valises, seule celle qui transportait les téléphones, a été ouverte et plastifiée à nouveau après que tout soit vidé », déplore Mme Dieng qui, scandalisée, a fait une réclamation le même jour, le 15 octobre 2024.

Vers un périple judiciaire…sans nom

« Ils (les services de la RAM) n’ont pas hésité à prendre ma réclamation. Ce n’est pas la première fois qu’ils sont confrontés à ce genre de situation. Seulement, ils ne semblent pas vouloir faire bouger les choses à propos de ces vols qui brisent toute la chaîne et détruit notre business. Nous allons devoir nous plier pour rembourser le coût des téléphones et ordinateurs à leurs propriétaires. Ces derniers ne nous laissent aucun répit depuis le début », a ajouté la GP, soulignant, par ailleurs, avoir porté plainte au Sénégal et engagé un avocat pour leur servir une mise en demeure. Très remontée par la situation, elle ne compte pas lâcher l’affaire au moment où la RAM traîne encore et semble imperturbable.

Une attitude que ne comprend pas, non plus, une autre compatriote, victime du « tracas » qui est devenu le lot quotidien des usagers de la RAM. Bijou Hamel se demande pourquoi les services de la RAM ne sont pas, pour le moins, inquiets dans tout ce tohu bohu et juste, au moment où dans son cas, après avoir perdu plusieurs millions, elle finit par s’engager à rembourser ses clients qui s’impatientent. « Finalement, nous travaillons pour rembourser. Ce n’est pas intéressant mais nous n’avons pas le choix. Par contre, la RAM nous doit des explications d’autant que nous avons fourni tous les documents qu’ils nous ont demandés pour la réclamation », confie la jeune dame qui annonce, également, une plainte à Dakar.

Toujours est-il que, rappelle un expert, la législation, au niveau des aéroports internationaux, demande aux usagers, de faire peser les bagages destinés à l’acheminement et de déclarer un embarquement « commercial » s’il dépasse le niveau de bagages « personnel ». Cela éviterait tout amalgame et profiterait, aujourd’hui, aux victimes en facilitant les procédures, éventuellement pour les poursuites judiciaires. Ce n’est pas le cas de tout le monde mais, à côté des entreprises de fret, déclarées et bien structurées, d’aucuns font dans l’informel et font acheminer des bagages dans ces conditions. Ce qui, rappelle notre expert, ne justifie point les vols. « Ils (les entrepreneurs) ne sont pas dans l’illégalité mais risquent d’avoir du mal à faire suivre les choses. Cette situation pourrait, tout aussi, profiter aux services de la RAM qui auront brandi ces dispositions pour ne pas donner, éventuellement, de retour à leurs réclamations.

Des révélations fracassantes…

Dans cette tourmente, une révélation vient entailler davantage la plaie béante du vol de bagages à l’aéroport de Casablanca. Assane, gestionnaire d’une autre compagnie de fret, depuis Montréal, conforte l’idée que les services de la RAM doivent prendre leurs responsabilités quant à ces agissements. « En avril dernier, les services de la RAM ont envoyé une note de service pour nous signifier qu’on ne peut plus emballer nos bagages à convoyer dans du film noir alors que jusque-là, nous avons « filmé » en noir. En retour, ils nous imposent d’utiliser du film transparent et c’est en ce moment que les vols ont véritablement commencé à nous fatiguer jusqu’à atteindre un chiffre impressionnant », explique le jeune homme. Précisant, notamment, que ces vols concernent toujours le matériel électronique dont les téléphones en particulier, Assane est persuadé que la RAM pourrait percer l’énigme dans son organisation. D’autant plus que, précise-t-il, pour la suite, la compagnie est intransigeante. « Ils rejettent systématiquement les films noirs. Il y a une fois où les bagages ont été retournés et n’ont pas été convoyés parce que nous avons remis le film noir. Finalement, nous avons été obligés de nous conformer », confie le manager, tracassé par tant de choses.

Et en attendant de percer le mystère sur les vols à Casablanca, ce jeune logisticien compte, désormais, les nombres de jours et d’heures d’escale au niveau de l’aéroport tant redouté car « plus on dure sur place, plus le risque de vol augmente avec la quantité du matériel pris ». Et certains colis n’arrivent jamais à bon port…sauf si l’escale est de très courte durée ou qu’il n’y en a pas du tout. Mystère !

Toujours est-il qu’aux dernières nouvelles, la RAM a suspendu l’acheminement des appareils électroniques. Une nouvelle qui va, certainement, créer des vagues dans le rang des compagnies de fret et autres voyagistes.

Un réaménagement à l’aéroport de Casablanca…

La problématique des vols de bagages, au niveau de l’aéroport de Casablanca, a d’autant plus soulevé des vagues que la tutelle, au niveau du Royaume Chérifien, a réagi. Le 21 novembre dernier, en pleine crise face à des vols récurrents de bagages, l’Office National des Aéroports (ONDA) annonce un changement. Dans le cadre du renforcement des équipements, il s’attaque, notamment, à la problématique des bagages, à l’aéroport de Casablanca, en parachutant une nouvelle tête pour cibler, particulièrement, « un projet d’envergure visant la refonte du système de traitement des bagages et l’optimisation de la zone de livraison est prévu ». L’objectif étant, selon le communiqué, d’améliorer l’expérience des passagers et de préparer l’aéroport aux défis de 2030.

Diouma SOW

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