La crise en tant que telle a duré moins de quarante-huit heures. Mais une campagne de communication, d’intoxication et de dénigrement, a joué un rôle capital dans la bataille. Les protagonistes se sont disputé le contrôle de Radio-Sénégal, média, voire arme stratégique pour l’issue de la bataille finale.
Le 17 décembre, dès 14 heures, Mamadou Dia, épaulé par Alioune Tall, un fidèle titulaire du portefeuille de l’information, ordonne la censure sur les ondes. Lundi après-midi, le ministre de l’Information fait diffuser un message dans lequel il annonce une allocution du président du Conseil à 20 heures. Mais, coup de théâtre.
A l’heure indiquée, c’est le président Senghor qui s’adresse aux Sénégalais. Son adresse connaît un incident. Le discours est interrompu, et c’est une voix qui termina l’adresse. Quelques minutes plus tard, une autre voix déclame à la radio : « voici la déclaration du président du Conseil ». On entend la voix de Mamadou Dia qui explique comment son gouvernement « est amené à prendre, en vertu de la loi sur l’état d’urgence, des mesures exceptionnelles pour la sauvegarde de la République pour faire face à une tentative de subversion ».
L’émission qui est à nouveau interrompue ne reprendra plus. Pendant ce temps, l’immeuble de la radiodiffusion nationale est entourée par des forces de gendarmerie favorables à Mamadou Dia. Ces dernières sont elles-mêmes encerclées par les parachutistes fidèles à Léopold Sédar Senghor. La radio est toujours aphone pendant que la rumeur colporte une fuite de Mamadou Dia. La situation passe peu à peu sous contrôle du camp de Senghor.
C’est qu’ainsi qu’un peu après minuit, un décret lu sur les ondes annonce la nomination de Me Doudou Thiam comme Commissaire provisoire à l’Intérieur, avec autorité sur les forces de Défense et de Sécurité. Aux premières heures du mardi 18 décembre, la radio nationale annonce que la gendarmerie et la police se sont ralliées au Président de la République.
