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Effets d’une instabilité gouvernemental chronique : Les bailleurs de fonds en mal de repères

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En matière de remaniements ministériels, il est difficile de faire mieux que Wade. Si en interne, cette valse permet de régler quelque équation politique ponctuelle, sur le plan de la coopération bi et multilatérale, elle n’est pas sans donner le vertige aux partenaires du Sénégal.

Six Premiers ministres, dix ministres du Commerce, huit ministres de la Santé, huit ministres de la Culture… En matière de remaniements ministériels, il est difficile de battre le record de Wade. On peut même écrire, sans risque d’être démenti, que ce record tutoie ceux de la quatrième République française et des cabinets italiens où les changements de gouvernement relèvent, presque, d’un banal fait divers. Une des conséquences de cette instabilité gouvernementale, c’est que les institutions multilatérales de coopération peinent à trouver un interlocuteur au Sénégal. Confidence d’un fonctionnaire d’une organisation multilatérale : ‘Avant d’appeler au Sénégal pour parler à un ministre ou lui envoyer un courrier, l’on est obligé de se renseigner sur sa présence ou non dans le gouvernement, celle dudit ministère dans l’architecture gouvernementale, l’intitulé du ministère, etc.’. Une prudence révélatrice d’un manque de lisibilité institutionnelle qui déroute même les plus fins observateurs de l’évolution gouvernementale au Sénégal. Ainsi, le dernier remaniement en date consacre le saucissonnage en deux ou plusieurs ministères de portefeuilles qui auraient dû, raisonnablement, relever d’un seul titulaire. Exemple : les départements occupés par les deux ministres d’Etat Awa Ndiaye et Ndèye Khady Diop. La première est chargée du genre, des relations avec les associations féminines africaines et étrangères. Tandis que la seconde va s’occuper de la famille, des Groupements féminins et de la Petite enfance.

Dans un rapport intitulé ‘Relations de l’Union européenne avec le Sénégal’, cette dernière note que notre pays ‘jouit d’une stabilité politique et institutionnelle notable. Mais l’instabilité gouvernementale et l’éparpillement des départements ministériels en charge de la coopération ont rendu difficile le dialogue sur les politiques sectorielles et affecté l’efficacité des stratégies de développement avec la Communauté européenne. Cette instabilité gouvernementale qui s’est manifestée depuis l’élection de 2000, s’est poursuivie en 2005’. Et même au-delà, puisqu’entre 2005 et maintenant, Wade a nommé trois Premiers ministres et plusieurs ministres. Pis, la coopération financière internationale relève, désormais, de deux départements qui ne sont pas loin de se marcher sur les pattes : l’Asie moins le Japon à Karim, l’Occident plus ce même pays à Abdoulaye Diop. Une incongruité qui a été, en son temps, fortement dénoncée par les milieux avisés. Sans que cela ne fasse bouger, d’un seul iota, le maître du pouvoir régalien de nomination.

Cette valse des ministres et des premiers d’entre eux fait qu’en la matière, en dix ans de gouvernance, Me Wade en a nommé plus que Senghor et Diouf réunis. Alors, si la seule conséquence visible de cette situation est que l’alternance a été la plus grande pourvoyeuse de ministres, il reste qu’en amont, l’instabilité découle d’un ensemble de facteurs politiques (ouverture à des partis alliés, à la société civile, moyen pour calmer les ardeurs guerrières de quelques responsables frustrés, etc.). Mais, si elle permet de régler, en interne, des équations politiques, elle a la lourde conséquence de dérouter les partenaires au développement qui doivent se couper le cheveu en quatre pour seulement trouver un interlocuteur.

Ibrahima ANNE

walf.SN

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