L’enregistrement de l’émission «Médias d’Afrique» de Radio France internationale (Rfi) organisé hier à l’esplanade de la Bibliothèque universitaire a mis très mal à l’aise le recteur de l’Ucad et le ministre de l’Education, Kalidou Diallo, devant une masse d’étudiants hostiles au discours gouvernemental.
Par Birame FAYE
A priori, l’Etat devait parvenir à convaincre les étudiants venus assister hier en masse à l’enregistrement de l’émission Médias d’Afrique de Rfi devant la Bibliothèque universitaire. Mais les personnalités envoyées par le gouvernement pour prendre part au débat, le recteur de l’Ucad, Abdou Salam Sall, le ministre de l’Education, Kalidou Diallo, connus pour leur hargne syndicale et le journaliste-écrivain Mamadou Albert Sy n’ont pas convaincu le public estudiantin sur le projet éducatif du Sénégal, notamment en ce qui concerne les maux de l’Ucad.
Les étudiants ont émis des huées, dès que l’animateur Alain Foka s’est adressé au recteur. Esseulé, ce dernier rate son entrée en matière. «Vous véhiculez une image négative de l’université», s’émeut M. Sall avant d’ajouter au cours des débats : «La majorité des étudiants sont indigents. Vous croyez qu’avec 5 000 francs, on peut avoir une formation de qualité. Une université nécessite beaucoup de moyens. L’histoire d’une université formatrice de chômeurs est totalement fausse.» Des propos qui irritent davantage.
DES PARCARTES
Le mal est plutôt ailleurs, ressasse Youssou Touré, Secrétaire général de l’Organisation des instituteurs du Sénégal (Ois) sous les applaudissements des apprenants. «C’est faux, quand l’Etat dit qu’il a investi 40% de son budget dans l’Education. Ici, les étudiants sont obligés de se lever à 4h du matin pour suivre les cours à travers les fenêtres. Ceux qui logent ne sont pas moins de dix par chambre. La vérité est que vous avez un recteur qui a échoué, qui n’est pas à la hauteur et qui refuse de le reconnaître.» L’assistance approuve par acclamations.
Suffisant, pour Abdou S. Sall, de travestir l’esprit du débat : «Vous êtes avec Macky Sall.» Galvanisé par le soutien du public, le patron de l’Ois explose : «Vous êtes en train de maquiller votre échec.»
Soudain, des pancartes surgissent devant les invités. Ce sont celles des protestants de la Fac des Lettres qui réclament la restauration de leur amicale, qui avait suscité une grève de la faim, il y a quelques semaines. N’eût été la courtoisie de l’animateur, les choses pouvaient dégénérer, dans la mesure où les étudiants libéraux se préparaient à intervenir. Une passe d’armes a néanmoins eu lieu entre MM. Sall et Touré, au moment de la pause.
A propos de la Fac des Lettres qui compte plus de 25 mille pensionnaires, le ministre Kalidou Diallo déplore le fort taux d’échec. «La plupart des étudiants qui crient, c’est parce qu’ils ne peuvent pas réussir. Je recrute chaque année 1 500 professeurs, mais je suis obligé de prendre des bacheliers», lance-t-il sous la réprobation spontanée des étudiants. Un comportement symptomatique, regrette Mamadou Albert Sy : «Les étudiants ne croient pas à l’enseignement supérieur.»
A son départ, le recteur a été contraint de s’arrêter devant les porteurs de pancartes qui ont momentanément bloqué le passage de son véhicule.
Youssou Touré échappe au lynchage
A la fin de l’émission Médias d’Afrique, le leader de l’Ois, proche de Macky Sall, Youssou Touré, a été intercepté près de son véhicule par un groupe d’individus qui proféraient des insanités à son encontre. Il s’agit des membres du Mouvement des élèves et étudiants libéraux (Meel). Manifestement, ils n’étaient pas contents de la prestation du leader syndical qui a beaucoup gêné le ministre Kalidou Diallo et le recteur Abdou Salam Sall.
Par la suite, le véhicule a été pris d’assaut par une foule. Il a été immobilisé pendant plus de 07 mn. Finalement, le leader du Meel, Toussaint Manga, a persuadé ses camarades libéraux de le libérer.
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