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Entre déceptions et impatience : Une analyse critique de la situation du pays. Par Moustapha Kassé, Pr d’économie, UCAD

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Depuis plus d’un an, la scène politique sénégalaise n’arrive pas à sortir de la campagne présidentielle à cause de plusieurs éléments à la fois polluants et obstruant l’horizon : un parti au pouvoir qui se déchire au lieu de préparer son leadership sur l’échiquier politique, une opposition d’invectives à la fois nostalgique et empêtrée dans des procès de prédation financière de ses dirigeants, des alliés de la majorité présidentielle engagés dans d’âpres disputes de positionnement ou d’accaparement de sinécures et enfin un gouvernement qui communique si mal sur son agenda et ses réalisations comme s’il pouvait faire durablement des choses que son opinion publique ne comprend pas simplement, parce qu’on ne lui explique pas.

Cet ensemble de problèmes se déroule sur fond d’urgences sociales relatives aux conditions de vie et de travail, à la triptyque infernale chômage(particulièrement des jeunes), précarité et pauvreté et aux défis de taille pour les résoudre concernant premièrement, les politiques sectorielles (industrie, agriculture, services, Tic et l’économie numérique), deuxièmement, le cadrage macroéconomique et macro financier pertinent pour réaliser le Yoonu yokkuté, troisièmement, les aspects de financement et quatrièmement, l’implication du secteur privé et la mobilisation des autres acteurs du champ social.
Ces problèmes sont peu discutés du fait de l’absence de débats éclairants, conséquence d’une part, de la faillite totale des organisations de gauche dont la vocation est de porter des grandes idées de progrès et d’autre part, de la léthargie de l’intelligentsia. Cette défaillance a fortement contribué à l’affaiblissement de notre presse au quotidien qui consacre très peu d’espace aux analyses scientifiques encore moins aux réflexions prospectives. Ce faisant, elle se condamne à servir de supports aux passes d’arme entre politiciens et autres bonimenteurs et à brasser les faits divers et autres commérages qui rythment la vie sociale et administrative du pays. Senghor avait vu juste quand il raillait «Radio cancan et ses cancaneries».
C’est dans ce contexte que survient l’«Appel à la reconstruction de la grande famille libérale» lancé par le Président A. Wade, appel qui, malheureusement, marque un second ratage d’une sortie honorable. Ce document, publié par la presse est économiquement, politiquement et socialement à la fois partiel, partial et truffé de contrevérités et cela nonobstant les outrances haineuses et les appels à la déstabilisation. On y vante orgueilleusement des réalisations sans aucun bénéfice d’inventaire.

I/ Les déceptions des 3 décennies perdues du développement : 1980-2012.

Au moment de l’indépendance, il a été mis en place (après bien de péripéties politiques diverses) un Etat développeur fort qui devait conduire des politiques sectorielles adéquates, capables d’impulser la croissance et le développement et de répondre aux demandes d’emploi, de protection sociale, de santé, d’éducation, de logement, avec une implication des acteurs. Au niveau de l’agriculture, les dynamiques régionales de croissance étaient impulsées par diverses sociétés qui valorisent les potentialités locales comme la Saed, la Somivac, la Sodeva, la Sodefitex, la Sodagri, la Sonacos et l’Oncad. Le monde rural était encadré et regroupé en coopératives appuyées par des programmes de modernisation (facteurs modernes de production, semences sélectionnées, machinés agricoles, etc.) et un crédit agricole spécifique (Cncas). Le système industriel reposait sur quatre piliers : les industries agroalimentaires (Nsoa, Socosac, Soboa, Socas, Css, Senelait, Bata, Siv, Seib, Sotiba Sympafric, Sotexka, etc.), les industries de valorisation des matières premières (phosphate (Ics), ciment (Sococim), raffinerie de pétrole (Sar), Iransenco, minerais de fer (Miferso) etc., les industries de la façade maritime (Pad, Dakar Marine pour les réparations navales, pêche maritime et artisanale et des réceptacles touristiques dans toutes les zones à vocation touristique) et les industries du bâtiment. Un début d’industrialisation automobile (voiturette Gaïndé) et des usines de montage étaient mises en place.
Les services étaient particulièrement développés dans les domaines surtout des transports (réseau routier, ferroviaire et aéroportuaire) l’assurance et la réassurance, des communications et télécommunications (Sonatel). Des entreprises de promotion des exportations furent aussi lancées (la Zfid, Fidak, Asepex, Trade Point). Dans le secteur social, des sociétés étaient mises en place comme la Sicap, l’Ohlm, la Caisse de sécurité sociale, la Caisse de sécurité alimentaire, la Caisse de stabilisation et de péréquation des prix, etc. L’électricité et l’eau étaient confiées à la Senelec et la Sones. Tout cet édifice était accompagné par un système bancaire et financier diversifié : la Bnds, l’Usb, la Bcs, des banques d’investissement comme Banque sénégalo-koweitienne, la Sofisedit et le début de la microfinance. La Sonepi fut créée pour réaliser des études de marché et des prises de participation au niveau des Pme/Pmi.
La planification fut adoptée avec l’objectif de maîtriser de manière cumulative et irréversible le processus d’accumulation productive et le développement soutenu de l’économie nationale. De telles politiques  économiques et sociales avaient conduit les pays asiatiques à l’émergence. Elles ont été systématiquement liquidées par l’aveuglement et l’entêtement des recettes néolibérales sous prétexte de construction d’un capitalisme local.

1°) Les politiques néolibérales des années 80 ont bloqué l’économie productive.

La crise mondiale des années 80 (fin de la convertibilité du dollar le 15 août 1971 et le premier choc pétrolier) va déséquilibrer et accentuer les difficultés internes et externes du Sénégal : explosion des importations (produits alimentaires et énergétiques), amplification des déficits de la balance des paiements, massification de l’endettement, dégradation de la compétitivité,  distorsions entre structures de production et structures de consommation. Face à la montée de ces déséquilibres, le Sénégal est transformé en champ d’expérimentation des politiques d’ajustement structurel : Programme de stabilisation à court terme (1979-1980) ; Plan à moyen terme de redressement économique et financier  (Pref) 1980-1985 ; Programme d’ajustement structurel à moyen et long terme (Pamlt) 1985-1992 ; Plan d’urgence mort-né de 1993 ; Plan post dévaluation 1994-1999).
Ces programmes fondés sur la trilogie libéralisation, privatisation et dérégulation visant à construire un capitalisme local sans Etat providence, ont arrêté tous les moteurs du système productif par démantèlement des politiques sectorielles et des entreprises appelées  à les réaliser (plus d’une centaine). En détruisant toutes ces usines, comment va-t-on faire pour résorber le chômage et la pauvreté ?
Au bout du compte, les mécanos du néolibéralisme ont complètement éteint le début d’industrialisation, au moment même où l’extension du système éducatif et la démographie galopante augmentaient, à rythme effréné, les demandes d’emploi. L’agriculture est retournée à l’économie de rente avec l’abandon des options de diversification et de réalisation de l’autosuffisance alimentaire : «importer le riz, c’est moins coûteux que de le produire localement » proclamait, de docte manière, la Banque mondiale. L’agriculture n’est pas seulement bloquée, elle est également déstabilisée par le système des prix imposé par l’ouverture sans protection.
Manifestement, si ces politiques se sont avérées aussi peu efficaces, c’est parce qu’elles ont confondu les moyens avec les fins : la libéralisation, la recherche des grands équilibres, les privatisations sont prises comme des fins plutôt que comme des moyens d’une croissance durable, équitable et démocratique. Les moyens d’intervention de l’Etat sont réduits avec la faiblesse des ressources fiscales. Elles n’ont pas su reconnaître que le renforcement des institutions financières est aussi important pour la stabilité économique que la maîtrise des déficits budgétaires et de la masse monétaire. Elles se sont concentrées sur les privatisations, mais n’ont guère attaché d’importance à l’infrastructure institutionnelle nécessaire au bon fonctionnement des marchés, et particulièrement  de la concurrence.
Le quart de siècle d’ajustement structurel a produit des désastres sociaux qui ont conduit les citoyens à sanctionner, en 2000, le gouvernement socialiste. Du reste, l’alternance a coïncidé avec le mea-culpa et le nouveau credo du développement de la Banque mondiale : le Document stratégique de réduction de la pauvreté rebaptisé  Document de politique économique  du Sénégal.

2°) L’alternance politique de 2000 s’est soldée par 12 années de  clientélisme, de clanisme et de malversations diverses pour s’achever sur un système patrimonial régressif.

L’avènement de Maître Wade avait suscité d’énormes espoirs : l’enthousiasme et la  mobilisation populaire donnaient aux pouvoirs publics la capacité de construire un véritable new deal. Au cours du premier mandat, des efforts ont été réalisés dans plusieurs secteurs avec  la mise en place de l’Agence chargée de la promotion de l’investissement et des grands travaux (Apix) qui procède à une mobilisation de ressources substantielles, mais largement insuffisantes comparativement à des pays comme le Ghana. Le cadre macroéconomique a été amélioré, mais certains déficits persistent : au niveau des finances publiques, de la balance commerciale et de l’endettement interne comme externe. Des investissements ont été réalisés dans les infrastructures, mais elles sont restées mal réparties et coûteuses (Corniche et les voies de dégagement, autoroute à péage longue de 34 km  et aéroport de Diass) si bien le déficit infrastructurel estimé à 20% du Pib (Banque mondiale) n’est point résorbé. Des efforts ont été consacrés à la formation des ressources humaines, mais sans réforme consistante du système éducatif et formation avec beaucoup d’effets d’éviction sur les ressources affectées. Les accès aux services publics sont restés largement insatisfaisants. Au demeurant, la mauvaise allocation des ressources en faveur des secteurs productifs porteurs d’emplois et de génération de revenus n’a point animé, la croissance.
Tout cela éloigne le pays de l’atteinte des Objectifs du millénaire pour le développement. Le coût des facteurs, notamment l’électricité, plombe complètement la vie des entreprises et des particuliers. Aucune politique sérieuse de promotion  du secteur privé et des Pme/Pmi n’est élaborée alors même que le Président se proclame comme un libéral.
Dans ce contexte, les rangs des déçus du wadisme se sont élargis à la quasi-totalité du gotha politique. Le mécontentement se généralise, le malaise social gangrène toutes les couches sociales, le Peuple sénégalais est de nouveau monté à l’assaut du pouvoir avec la jeunesse aux avant-postes. La seconde alternance se dessine à l’horizon de la Présidentielle du 26 février 2012 pour celui qui clamait  que  son «départ créerait au Sénégal un chaos pire que celui de la Côte d’Ivoire». Une nouvelle aspiration au changement, à la rupture est désormais inscrite dans l’agenda populaire.
Au terme de 12 années d’exercice d’un pouvoir sans partage, le Président Abdoulaye Wade, s’est attelé, à partir de 2007, à implanter progressivement un système patrimonial qui se caractérise par un gonflement du budget de la Présidence, un gigantisme ministériel à partir d’une fragmentation des champs de compétence, un accroissement des agences, une boulimie foncière, etc. Il s’installe alors une véritable entreprise de déconstruction des institutions. Deux phénomènes apparaissent et  finiront par perdre le régime.
En premier lieu, durant cette période, un profond malaise social s’est emparé de toutes les couches populaires au premier rang desquelles la jeunesse. Le triptyque chômage, précarité et pauvreté s’est approfondi. Près de deux ménages sur trois (64%) ne sont ni chômeurs ni précaires, mais pauvres (des adultes sans revenu). La situation de cette catégorie s’est aggravée au cours des cinq dernières années du régime. Le coût de la vie a atteint des niveaux inacceptables et les inégalités sociales se sont creusées : moins de 10% de la population contrôlent plus de 80% de la richesse nationale.
En second lieu, progressivement, un modèle d’Etat bonapartiste s’installe sous prétexte de construire un système économique émergent. On a vanté, dans les arcanes du Palais présidentiel, l’efficacité de la «dictature éclairée» de type Ben Ali. Il s’est alors instauré une politique patrimoniale avec un pouvoir patriarcal fortement centralisé, exercé par un chef charismatique qui gouverne par le canal de sa famille, de ses fidèles, de ses serviteurs et d’une clientèle captive. La gestion est assimilée à celle d’un «père de famille» qui amalgame les affaires personnelles et les affaires publiques, administratives  et judiciaires. Le Trésor public se confond quasiment avec la caisse du chef tandis que les stations de pouvoir se transforment en instruments d’accumulation qui permettent à ceux qui les exercent d’extraire et de redistribuer les  ressources et le patrimoine national.
Dans un tel système, l’argent des malversations financières, de la corruption et du blanchissement, va contribuer à donner l’apparence d’une augmentation de la masse monétaire, en fait, il s’est agi de faire disparaître l’argent sale dans des circuits non officiels et des méandres de circuits incontrôlables.
Ce système est fortement décrié. En mars 2012, l’opposition politique a réussi un consensus national sans pour autant conclure un programme de gouvernement allant bien au-delà des recettes concoctées à la «Concertation nationale». Toutes les éminentes personnalités, qui ont formé le Benno bokk yaakaar, ont allègrement traversé le cinquantenaire de notre indépendance. Elles devraient observer une posture autocritique pour que le pays ne retombe pas dans le mal développement : elles en ont l’expérience et la compétence. Mais il n’en fut rien. Arrêtons les platitudes du genre alternance générationnelle : le problème est ailleurs, il est de savoir si ces personnalités auront la volonté politique, au moment où le Peuple s’impatiente, de s’atteler sans fioriture à se mettre ensemble, derrière le président de la République, pour la résolution des urgences sociales ?

II/ La deuxième alternance, en éveillant un nouvel espoir, ne résoudra pas le désastre et la rupture sociale en un tour de main

Au Sénégal, comme partout ailleurs en Afrique, les politiques se proposent de bâtir l’émergence dont on ne fixe ni la signification ni le contenu, ni les moyens ni le temps de réalisation. Observons que l’émergence économique ne se mesure ni par le niveau d’un taux de croissance ni par celui du Pib per capita. Il est à la fois un projet politique, économique et social qui implique la soutenabilité et la durabilité des options économiques et financières mises en œuvre par un Etat qui s’assigne comme objectif de construire une économie nationale autocentrée en s’appuyant sur les ressources naturelles, humaines et technologiques et cela pour répondre aux besoins fondamentaux de ses populations.
L’amorce de l’émergence commence par une appréciation des crises, des ruptures et des faiblesses structurelles de notre économie nationale lesquelles freinent la croissance et le développement. Pour cela, il faut remonter à la racine, c’est-à-dire à l’organisation socio-économique qui repose sur des facteurs caractéristiques comme la forte sensibilité de la croissance aux variations de la production et de l’exportation des produits de rente principalement d’origine agricole et minière ; le système prédateur de prélèvement et d’utilisation insuffisamment productive des ressources tirées de la rente et des apports externes (aide et endettement) ; la répartition inégale du revenu national au profit d’une minorité sociale caractérisée par une hyperconsommation de biens de luxe importés ; la vulnérabilité chronique de l’économie à l’égard de variables exogènes comme le climat, les cours mondiaux des matières premières, les taux d’intérêt, l’aide publique au développement ; les multiples comportements antiéconomiques de beaucoup d’acteurs.
Pour surmonter ces handicaps, il faut un Etat fort et actif capable d’impulser et d’organiser la société, de créer les externalités positives au niveau des infrastructures de base (routes, énergie, école, assainissement), de guider et coordonner les politiques sectorielles (industrielles, agricoles et des services technologiques et financiers pour accroître l’offre de production), des institutions d’encadrement et de gestion du développement, de promouvoir, appuyer et associer le secteur privé, de défendre un patriotisme économique clairvoyant et enfin de mettre en œuvre une politique sociale fondée sur la justice sociale et l’égalité des chances. Les chantiers sont phénoménaux pour faire reculer les souffrances, la pauvreté, la précarité et créer des emplois massifs pour absorber les produits massifs du système éducatif et de formation.

1°) Le premier chantier est de faire de la relance des politiques sectorielles un enjeu national prioritaire.

L’accroissement de l’offre de production de biens et services est une priorité qui appelle la mise en place de politiques sectorielles audacieuses et concertées de valorisation des importants ; atouts dont dispose le pays. C’est dans ce cadre qu’il faut développer une nouvelle politique industrielle audacieuse fortement articulée en amont et en aval à l’agriculture et qui valorise les ressources du sol et sous-sol afin d’exploiter toutes les chaînes de valeur et de rendre la croissance durable. La politique agricole doit définir et appliquer une nouvelle stratégie permettant l’instauration d’une agriculture performante et intensive et le développement de la société rurale avec un paysan de type nouveau qui possède et contrôle son espace, s’organise sur une base autonome, cherche à peser sur l’échiquier politique et dispose de techniques culturales, de matériels biologiques, de facteurs modernes de production. Ces conditions permettront l’avènement d’une véritable révolution agricole rendant possible une amélioration des productivités par actif rural et par surface cultivée. Si on avait réussi une politique vivrière cohérente et de lutte contre la consommation extravertie par modification des habitudes de consommation et de reconquête des marchés urbains, cela nous aurait permis, ces deux décennies passées, d’économiser plus de 1 500 milliards de francs Cfa qui représentent le coût des importations de riz, de blé et de lait. Ces ressources auraient renforcé la base de la production agricole, créé des milliers d’emplois et couvert une large part du déficit de la balance des paiements. Enfin, il faut exploiter les énormes possibilités de développement de l’économie des services, des technologies de l’information et des télécommunications et de la recherche/développement.
Au total, en raison de la faiblesse structurelle des liaisons intersectorielles caractérisant l’économie nationale, les politiques d’offre doivent avoir un centre d’impulsion et de régulation qui ne peut être que l’Etat en partenariat organique avec le secteur privé (Partenariat Public Privé repensé). Nous devons tous éviter de faire du chef de l’Etat un homme-orchestre qui sache tout, fasse tout, décide de tout, mais un chef d’orchestre qui choisit la partition et les exécutants  dans un mouvement d’ensemble.

2°) Le deuxième chantier, la création impérative de fortes institutions servant d’outils de gestion et d’encadrement du  développement.

Tout n’est pas d’avoir de bonne stratégie, il faut aussi disposer d’instruments fiables de mise en œuvre des politiques économiques et sociales. Cela relève du domaine des institutions qui sont une combinaison de contraintes mises en place par l’Etat pour structurer toutes les relations entre les acteurs impliqués dans le développement. Elles sont faites de contraintes formelles (règles, lois, constitution) et de contraintes informelles (normes de comportement, conventions, codes de conduite, etc.). Autrement dit, cette combinaison définit les instruments qui modèlent les performances économiques. Elle définit aussi les structures incitatives de l’économie et celles de la société notamment les comportements et attitudes des citoyens à l’égard de l’Etat et du service public, du travail productif, du progrès matériel et de l’épargne, du temps et de la corruption. Ces attitudes et comportements permettent de réduire les coûts de transactions, d’économiser de l’information et de rationaliser les problèmes de coordination.

3°) Le troisième chantier est la résolution des chaînons manquants des politiques économiques : le patriotisme économique, la préférence nationale et l’éradication du modèle de consommation extraverti avec ses effets de propagation.

Le patriotisme économique est le comportement spécifique du consommateur, des entreprises et des pouvoirs publics consistant à favoriser le bien ou le service produit au sein de la Nation. Ce concept vise à élargir les préférences nationales à la défense des intérêts économiques nationaux. Tous les pays développés (Etats-Unis, France compris) le pratiquent avec l’objectif majeur de protéger leur système productif et leurs entreprises nationales (D. Devillepin, Obama, la crise des panneaux solaires chinois).
Aujourd’hui, plusieurs activités principalement dans l’agro-industrie (le riz, l’huile, les oignons, la tomate, le sucre, le textile, etc.) sont mises en péril par le lobby des importateurs véreux qui ruinent le système productif national avec la complicité du système bancaire commercial. Il est temps de freiner ces activités de ce secteur des importateurs qui n’investissent ni dans l’industrie ni dans l’agriculture, ni dans les services et qui détournent une bonne partie des ressources financières nationales à des fins spéculatives. Ce sont de véritables sangsues qui sont en passe de transformer le pays en un énorme bazar, un dépotoir de toutes les pacotilles et friperie du monde.

4°) Quatrième chantier est faire de l’entreprise le levier de la croissance et du développement.

Les entreprises doivent conquérir d’abord le marché intérieur et chercher à intégrer, ensuite et sans aucune frilosité, l’économie mondiale. Elles doivent être portées par une stratégie commerciale qui implique une stratégie de production axée sur l’innovation permanente, la technologie et la souplesse d’adaptation. Alors, il convient de lever les principales contraintes à l’expansion du tissu entrepreneurial fait de Pme/Pmi. Celles-ci sont au nombre de trois : les contraintes sociologiques, juridiques et réglementaires (caractère familial, lourdeur des formalités administratives, etc.), les contraintes économiques et financières (faible apport, faible taux de bancarisation, trop forte concentration des prêts sur un nombre limité de secteurs, faibles crédits long terme, capacités limitées du système financier décentralisé). Il serait totalement absurde de douter un seul instant du rôle prépondérant de  l’Etat dans ces domaines ; il doit aider au renforcement des systèmes financiers de proximité afin que chaque catégorie d’entrepreneur privé puisse s’adresser à une institution financière adaptée à ses besoins.
Préparer l’avenir, c’est favoriser l’essor des Pme/Pmi, de leur naissance, à leur croissance et éventuellement à leur mort. Il faut mettre en cohérence les politiques macroéconomiques du gouvernement avec celles microéconomiques des milliers d’entreprises.

5°) Le cinquième chantier est relatif à l’établissement d’une politique sociale et de répartition du revenu pour atténuer la rupture sociale.

L’enjeu fondamental est celui du choix d’une nouvelle politique sociale et de redistribution des revenus qui maximise les potentialités endogènes du développement. L’ampleur du phénomène commande d’en avoir une vision d’ensemble très claire en vue de l’élaboration d’une stratégie cohérente et globale qui va bien au-delà de la mise en place de réseaux de lutte et de solidarité qui accompagnent la pauvreté sans vraiment la réduire. Pour relever ce défi, il faut repenser complètement les finalités du développement en alliant davantage l’efficacité économique et la justice sociale (l’équité) et en renforçant la sécurité sociale au moment où les filets traditionnels de protection se délitent.

6°) Définir une stratégie des relations avec les partenaires pour la promotion des politiques sectorielles.

Plusieurs pays africains élaborent une telle stratégie pour exploiter judicieusement toutes les offres de partenariat : Namibie, Maurice, Botswana, Cap-Vert, Maroc, etc. Ces pays établissent des partenariats de production, de joint venture ou de délocalisation qu’ils inscrivent dans leur plan de développement. Le Maroc offre une illustration, ainsi, pour réduire le déficit commercial et contrebalancer ses importations vis-à-vis de la Chine, les autorités ont fixé, avec des opérateurs économiques chinois, un ensemble de programmes qui augmentent les capacités de production et développent les infrastructures. C’est ce que les Chinois eux-mêmes font avec les multinationales. Il est également possible de nouer un partenariat gagnant-gagnant par la mise en place de Zones économiques spéciales.  Aujourd’hui, les conditions sont réunies pour  le Sénégal de tirer profit de partenariats plus fructueux, plus variés, davantage tournés vers ses propres options de développement économique et social.

7°) S’atteler à modifier les comportements et attitudes des Sénégalais face au développement.

Notre politique économique est freinée ou ralentie par des structures sociales, politiques et surtout mentales. Ces dernières forment «l’outillage mental» qui  comprend les croyances, les idéologies et les représentations qui ont cours dans la société. Elles commandent ou orientent l’activité économique. Trois attitudes apparaissent importantes dans le développement : attitude à l’égard du progrès matériel (le progrès comme vecteur du changement social), attitude à l’égard du temps (le temps un bien rare qu’il faut aménager et qui a un prix) et l’attitude à l’égard de l’accumulation (l’argent comme source de consommation immédiate, moyen de prestige ou instrument de progrès économique par le biais de l’épargne et l’investissement). Ces trois attitudes façonnent les comportements ruineux pour l’environnement économique et social. Elles se matérialisent dans les nombreuses fêtes, les cérémonies familiales dispendieuses, l’absentéisme qui sont des gaspillages par dilapidation des surplus des familles. Il faut dégager les valeurs favorables au développement pour chacune de ces attitudes et les proposer dans des programmes de changement des mentalités.

En conclusion

Toute cette analyse montre que nous avons des défis monstrueux en termes de croissance, de création d’emplois, de réduction de la pauvreté. Faire du Sénégal un pays émergent cela ne tombe pas du ciel : il faut travailler avec rigueur et nous inscrire dans le moyen et long terme. Quels que soient les orientations et les moyens que met en place une société démocratique pour maîtriser son développement, elle ne peut les faire accepter que si les objectifs sont ressentis comme prioritaires par la majorité des populations, mieux si on arrive à transformer en programmes leurs espérances. Cette dynamique est porteuse de progrès économique et social, d’innovation et de créativité. Elle doit être appuyée par une mobilisation des populations et des acteurs économiques au service de l’intérêt national. L’asymétrie d’information et le déficit de communication peuvent être source d’inefficience ou de paralysie, voire de déstabilisation. Nous sommes dans la bonne voie, il suffit de persévérer avec plus d’audace politique et de vision stratégique.

Pr. Mamadou Moustapha Kassé

Université Cheikh Anta DIOP
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion
Doyen Honoraire de la FASEG

4 Commentaires

  1. un vrai couard ce professeur Kasse ancien du PS puis du PDS au gre du pouvoir en place. Ne sachant rien du droit constitutionnel, il a défendu Wade danstous es medias en nous produisant meme un texte trufe de contrevérités. Mais il fallait qu il montre a Wade qu il le soutenait qu importe la verite ou mensonge. Au début du regne de Macky, il sest fait rare puis a commencer a s approcher de Macky par des demandes d audience en passant par Moustapha cisse lo et en le défendant meme dans une interview ou il disait que c est tôt de blâmer Macky qui pour lui est courageux et honnête. Mais Macky n a pas prete attention a ce qu il disait. Et la il nous sort ce texte en guise d attaque pour se faire appeler. Tous ceux qui on ont cotoye savent qu ill est vide et na jamais actualise ses connaissance depuis sa soutenance de doctorat. Il s exprime mal et ne sait que reciter les grandes therories.Unv rai opportuniste qui a toujours savoir geres ses intérêts. Cher prof le senegal a change

  2. Voici les louanges qu’il chantait à Wade en 2011 à vous de juger avec notre gant intellectuel qui fait un appel au pieds à Maky-


    Manifestement, «le Sénégal constitue un véritable îlot exceptionnel de stabilité et de progrès qu’il faut préserver à tout prix pour rassurer les rares investisseurs qui manifestent encore quelques intérêts à l’Afrique de l’ouest et qui font que le pays est l’enfant gâté de l’aide extérieure». Cette déclaration de Madame Anne Miroux de la CNUCED est aujourd’hui sérieusement remise en cause. En effet, depuis le 23 juin, notre pays tangue dangereusement : les acteurs politiques fourbissent les armes pour un combat dont les termes guerriers doivent inquiéter plus d’un patriote soucieux de la préservation de la paix. A la une des journaux, les titres sont expressifs d’une guerre civile annoncée : œil pour œil, loi du talion, riposte physique, psychose de chaos, affrontement frontal, mobilisation de milices et de gardes de corps. Les appels à la violence se multiplient sous des formes diverses à peine voilées. Parallèlement, les achats d’armes légères, les agressions verbales et les outrances s’accroissent chaque jour.
    En pareil cas, ces éléments et bien d’autres constituent, bel et bien, les signes précurseurs d’un grave danger qui pointe à l’horizon politique. Il se profile une confrontation dont les auteurs ne semblent pas mesurer avec lucidité et responsabilité toutes les conséquences pour un pays dont le principal fonds de commerce est sa démocratie, sa stabilité, sa paix sociale, la qualité de ses ressources humaines et celle de ses valeurs socio-culturelles comme le dissoo (dialogue), le maslaha (consensus) et la paix (jaam). Or, ces facteurs sont sérieusement parasités. Jamais le pays n’a eu autant de frayeur particulièrement face à la soudaineté et à la sévérité des violentes émeutes de l’électricité du 27 juin qui ont introduit une nouvelle configuration des manifestations jadis bruyantes mais pacifiques.
    Les diverses mises en scène qui nous sont servies commencent à dépasser les bornes d’une simple théâtralité politique dans laquelle les acteurs jouent à se faire peur. Dans ce contexte, toutes les forces sociales au premier rang desquelles les intellectuels producteurs, régulateurs sociaux et défenseurs des idées comme moteur de l’activité humaine, doivent cesser de garder le silence, au risque de trahir leur mission fondamentale. Ce groupe social qui n’appartient ni à des systèmes clos, ni à des organisations partisanes, dans ces moments de crise et de désarroi, doivent s’investir pour jouer sa partition dans la recherche de la paix sociale.
    Quelles sont les vraies questions qui agitent la société politique sénégalaise ? Existe-t-il des solutions pour un retour de la stabilité afin que le pays puisse aller vers des élections libres, transparentes et apaisées en 2012 ?

    I/ Aux sources de la crispation : des questions essentielles non débattues ni par les élites, ni par les politiques.

    Faut-il le rappeler, dans une démocratie, le débat est à la fois utile et crédibilisant surtout quand il se déroule sans aucune entrave entre des acteurs soucieux de révéler la vérité et de faire partager leurs expériences aux citoyens dans le respect scrupuleux des lois et règlement de la République. Il peut éclairer sur la situation réelle du pays et la manière dont il est géré ainsi que les performances et contreperformances des politiques appliquées. Il est un bon indicateur d’appréciation de la qualité des acteurs du jeu démocratique qui est en fait un jeu transactionnel régi par les règles d’une compétition bornée par les lois et règlements.
    L’absence de débats, de confrontation des idées, de concertation et de recherche de dialogue a totalement cristallisé beaucoup de frustrations qui n’attendaient que la moindre étincelle pour exploser. La 17ème révision constitutionnelle autour du ticket présidentiel, le 23 juin, a introduit, justement cette rupture totale de charge au niveau du jeu politique. Elle a été le déclic d’une mobilisation contestataire qui a surpris par son ampleur, sa profondeur et sa diversité. Sur plusieurs points ce mouvement rappelle celui de mai 68. Pourtant, le 19 mars a été un signe annonciateur qui n’a pas été sérieusement décrypté. On peut dire avec certitude que le séisme du 23 juin est la conséquence d’une trop longue absence de débat large, d’un manque de concertation et des fautes lourdes de communication sur le projet de ticket présidentiel. Tous ces éléments ont structuré avec une rapidité déconcertante une nouvelle conscience citoyenne. La boîte de pandore étant ouverte, le débat sur la candidature du Président Abdoulaye Wade s’est invité au point de créer un effet de fixation qui va obstruer beaucoup de problèmes et lancer la dynamique de la campagne présidentielle. Il me semble que jusqu’aujourd’hui, il manque encore une lecture lucide des événements des 23 et 27 juin (émeutes de l’électricité).
    Dans un article que j’avais publié, dans la période préélectorale de 2007, dans le Quotidien Walfadjri, il m’était apparu que « plusieurs raisons de taille militent massivement en faveur de la constitution d’un vaste consensus politique autour des idées Maître Wade». Parmi celles-ci, j’en avais souligné et analysé au moins trois: d’abord la dimension de l’homme politique, ensuite ses ambitions affichées pour un Sénégal nouveau dans une Afrique promise à « un grand destin » et enfin les incertitudes qui calfeutrent et obstruent la lisibilité de l’après Wade». J’avais axé mon argumentaire autour de trois idées clefs : La première raison concerne son âge avancé que l’Opposition caricature comme un handicap. Pour ma part, je pensais alors que cet âge avancé est une grande chance si la classe politique sait en faire un bon usage. Comme étant l’une des dernières grandes figures historiques de l’Afrique de l’Ouest francophone, son ambition ne serait certainement pas de s’incruster au pouvoir. La seconde raison est relative aux ambitions et succès économiques et sociaux remportés par l’alternance. Les travaux herculéens d’envergure attestent une claire volonté de marquer son passage en laissant à la postérité une œuvre indélébile». La troisième raison est que « le Président peut être l’arbitre et le régulateur de la vie politique d’autant plus qu’il a clairement déclaré qu’il ne briguera pas un troisième mandat. Cette déclaration lui confère de facto une excellente posture d’un arbitre au dessus de tout soupçon et capable da faire réaliser au pays une seconde transition démocratique calme et apaisée qui conjure d’avec les éventuels soubresauts de la recomposition de l’espace politique».
    Les arguments développés pour la validité de sa candidature, et notamment le troisième, me semblent, aujourd’hui, revenus en surface pour soulever des débats passionnés au double plan juridique et politique. Après les différentes péripéties, le débat ne se déroule pas encore avec toute la sérénité requise ; bien au contraire, il prend même des relents de guerre civile verbale avec un affermissement des positions. Il faut alors le ramener d’abord au niveau des scientifiques du droit, donc entre constitutionnalistes et cela en dehors des dérapages et des outrances qui sont les fosses dans lesquelles il faut éviter de tomber car cela risque d’ébranler sérieusement les fondements de notre démocratie en tout point exemplaire. Si les divergences persistent, alors Il existe bel et bien en République le pouvoir d’arbitrage des juges qui est, dans le cas d’espèce, le Conseil Constitutionnel dont l’attribution majeure est de lire le droit sur la question. Il doit en être ainsi pour ceux qui acceptent de vivre en République sur le sacro saint principe de la séparation des pouvoirs. Il est évident qu’en parlant de l’institution Conseil Constitutionnel, des précédents dramatiques et de triste mémoire apparaissent : la démission historique non encore élucidée du Juge sénégalais Kéba Mbaye et le syndrome de la proclamation des résultats électoraux par mon ami le Doyen Yao Ndré qui a brûlé la Côte d’Ivoire. Bien entendu, ces deux exemples ont introduit suspicion et scepticisme. Dès lors, que faire pour dissiper ces ruptures de confiance ? Dans pareille contexture, quel que soit le verdict des juges, les risques de troubles graves demeurent énormes. Cette impasse ne peut se résoudre que par le dialogue préalable entre les protagonistes significatifs, sérieux et sincères.

    II/ L’impérative nécessité de retisser la confiance et de bâtir des ponts entre tous les acteurs politiques et la société civile pour sortir de l’impasse.

    Dans un ouvrage célèbre Kenneth Arrow définissait la confiance comme une «institution invisible au même titre que les règles de droit ou les principes éthiques». En effet, si chacun voit midi à sa porte, peu de progrès pourront être réalisés dans la gestion d’un bien collectif comme l’élection présidentielle. En bâtissant des ponts entre les acteurs, en retissant les liens de confiance, il est possible de promouvoir des comportements responsables et de conforter un consensus bâti sur l’écoute, l’éthique de responsabilité et le patriotisme.
    Le dialogue et la concertation dans des instances appropriées et restreintes et en dehors de toute médiatisation tonitruante peuvent rétablir la confiance en vue de trouver une solution de paix et éviter les confrontations. Puissent nos dirigeants comprendre le message et proposer non la division mais le regroupement de nos forces dans l’intérêt de tous et surtout des plus faibles d’entre nous.
    Au sortir des années 60, dans une période de crispation extrême de la vie politique, nous avions imposé un débat sur le « consensus national » et non le «compromis historique». Egalement, quand le paysage politique s’était sérieusement embrassé, en 1983, j’avais proposé au Président Diouf une note sur l’impérative nécessité de la mise en œuvre d’une Majorité Présidentielle : l’idée était trop neuve pour ne pas susciter des attaques spécieuses dans ma formation politique. En effet, Il fallait oser entreprendre le passage d’une démocratie centralisatrice et exclusiviste vers une démocratie participative qui intègre diversités et minorités. Cette proposition devait offrir des garanties pour une cohabitation pacifique entre les partis politiques les plus significatifs.
    Malgré l’âpreté des confrontations intellectuelles, ces idées avaient permis d’apaiser le climat politique et de résoudre quelques équations politiques brûlantes. Nous avion pris de très lourdes tuiles et traité comme un agent d’une prétendue cinquième colonne : qu’importe c’était la contrepartie de notre mission car comme disait un poète grec : «si je ne brûle pas, si tu ne brûles pas, si nous ne brûlons pas, alors d’où viendra la lumière».

    En conclusion

    Pour une démocratie adulte, l’élection présidentielle est un temps fort qui structure la vie politique pour le quinquennat à venir. Il est tout à fait convenant, voire impératif que tous les citoyens libres qui se sentent la vocation se lancent dans la course sans contrainte majeure, surtout financière. J’ai ma vie durant lutté contre toutes les discriminations par l’argent. Je demeure convaincu que sans les internats de l’époque et la Cité Universitaire confortable des années 60 (que certains dirigeants de l’Union Générale des Etudiants d’Afrique Occidentale (UGEAO) présentaient comme de la corruption), nos pays n’auraient certainement pas capitalisé cette brillante élite qui a bénéficié de ces structures. Toutefois, les acteurs politiques doivent, pour être crédibles, dédramatiser l’élection présidentielle et œuvrer pour qu’elle puisse se dérouler de manière libre, transparente et accessible en respectant scrupuleusement les lois et règlements de la République.
    Rien, absolument rien ne peut excuser le manquement de toutes les forces sociales à l’appel au dialogue pour trouver une solution au blocage actuel: leur démission ou leur pessimisme serait en porte à faux avec la nature profonde de la société sénégalaise dont toutes les composantes manifestent à toutes les occasions leur vouloir vivre ensemble et en paix.
    Après le relatif échec du fameux M6, composé de six éminentes personnalités indépendantes auto mobilisées, pour promouvoir le dialogue entre pouvoir et opposition, il existe encore des pistes plausibles qui peuvent être exploitées à condition de mettre préalablement hors jeu les thuriféraires et les faucons des deux bords.
    La sortie du Ramadan est un moment propice. Du reste, cette opportunité avait été saisie en 2007, par la RADDHO, pour lancer son appel solennel au Président de la République afin qu’il examine avec lucidité la nécessité d’instaurer un Pacte républicain qui contribuerait à la décrispation politique pour aborder dans la paix, la sérénité et la stabilité les redoutables enjeux électoraux. Aujourd’hui, nous sommes dans une situation de gravité et d’urgence, car coincés par des échéances imminentes. Ce même appel, doit être réitéré en direction de l’ensemble de la classe politique sénégalaise afin qu’elle puisse trouver une éthique de responsabilité en vue de préserver le pays de soubresauts qui risquent d’assombrir l’avenir. Le consensus politique national devient un impératif, un passage quasi obligé. Des personnes crédibles, les autorités religieuses, morales, intellectuelles, dont regorge le pays, doivent se pencher sur la situation et entreprendre des initiatives hardies dans la recherche d’un compromis salvateur d’apaisement et de paix. Le vrai danger serait de ne rien essayer. L’avenir de la démocratie est à ce prix ! C’est devenu une obligation car comme disait Martin Luther King, il «Vient un temps où le silence est une trahison». Alors nous seront tous coupables.

    Par Professeur Moustapha Kassé
    Doyen Honoraire.

    • Je ne vois nulle part où les louages de Wade sont chantées dans ce texte et, quand bien même l’aurait-il fait, le débat ne se situe pas à ce niveau. Loin de là. Interpellez ce monsieur sur le contenu de son analyse et ressortez nous des contrevérités sur ses propos….
      Il est temps qu’on pose de vrais débats d’idées plutôt que de vouloir tout le temps jeter l’oppobre sur l’autre par ce qu’il ne partage pas la même vision politique que vous et c’est ca qui retarde notre pays aujourd’hui.

  3. Thieye prof voici ce que tu disais en 2011 ton bienfaiteur d’alors:

    Dans un article que j’avais publié, dans la période préélectorale de 2007, dans le Quotidien Walfadjri, il m’était apparu que « plusieurs raisons de taille militent massivement en faveur de la constitution d’un vaste consensus politique autour des idées Maître Wade». Parmi celles-ci, j’en avais souligné et analysé au moins trois: d’abord la dimension de l’homme politique, ensuite ses ambitions affichées pour un Sénégal nouveau dans une Afrique promise à « un grand destin » et enfin les incertitudes qui calfeutrent et obstruent la lisibilité de l’après Wade». J’avais axé mon argumentaire autour de trois idées clefs : La première raison concerne son âge avancé que l’Opposition caricature comme un handicap. Pour ma part, je pensais alors que cet âge avancé est une grande chance si la classe politique sait en faire un bon usage. Comme étant l’une des dernières grandes figures historiques de l’Afrique de l’Ouest francophone, son ambition ne serait certainement pas de s’incruster au pouvoir. La seconde raison est relative aux ambitions et succès économiques et sociaux remportés par l’alternance. Les travaux herculéens d’envergure attestent une claire volonté de marquer son passage en laissant à la postérité une œuvre indélébile»

    Par Professeur Moustapha Kassé
    Doyen Honoraire.

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