Même quand un sociologue (1) – fut-il contesté dans ses approches et motivations s’offusque contre la tradition de transmission dynastique du pouvoir, il faut savoir raison garder, faire preuve de beaucoup de lucidité et surtout apporter des arguments solides pour conforter ou réfuter sa thèse, en ne se fondant donc que sur le Coran et la Tradition du Prophète (PSL) qui sont les seules références valables pour le musulman :
(59) Ô les croyants ! … Si vous vous disputez en quoi que ce soit, référer vous à Allah et au Messager, si vous croyez en Allah et au Jour dernier. Ce sera bien mieux et de meilleur interprétation (et aboutissement).
(4. Les Femmes : 59 – An-Nisâ’)
Il ne faut pas se voiler la face, l’auteur incriminé vient de toucher un point très névralgique sur notre pratique religieuse – un véritable casse-tête pour la presque totalité des adeptes des confréries de notre pays ! Certes, on peut déplorer une certaine impertinence (insolence) dans la forme (2), mais dans le fond, sa contribution est remarquable et pertinente à plus d’un titre ; et je doute fort qu’un ouléma puisse tenter de réfuter sa thèse sans se fourvoyer ou verser dans l’amalgame.
En vérité, et d’une manière générale, en matière de religion, la race et le critère familial n’entrent pas en considération dans l’appréciation de la noblesse d’un individu ; c’est la piété qui est déterminante :
(13) Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux. Allah est certes Omniscient et Grand-Connaisseur.
(49. Les Appartements privés : 13 – Al-Hujurat)
Certes, le Coran a rapporté un cas typique de dynastie prophétique ; Abraham était prophète ; il a eu deux enfants prophètes (Ismaël et Isaac) et un petit-fils prophète (Joseph = youssouf). Mais il faut considérer ceci comme une exception et non la règle, comme le suggère le Coran :
(26) Nous avons effectivement envoyé Noé et Abraham et accordé à leur descendance la prophétie et le Livre. Certains d’entre eux furent bien-guidés, tandis que beaucoup d’entre eux furent pervers.
(57. Le Fer : 26 – Al-Hadîd)
En outre Dieu a rapporté le récit de l’enfant de Noé – un avertissement explicite pour les descendants de nos illustres ‘’Hommes de Dieu’’ :
(45) [Lorsque le déluge survint] Noé invoqua son Seigneur et dit : « Ô mon Seigneur, certes mon fils est de ma famille et Ta promesse est vérité. Tu es le plus juste des juges ».
(46) Il (Dieu) dit : « Ô Noé, il n’est pas de ta famille car il a commis un acte infâme. Ne me demande pas ce dont tu n’as aucune connaissance. Si Je ne t’exhortais pas, tu serais du nombre des ignorants ».
(47) Alors Noé dit : « Seigneur, je cherche Ta protection contre toute demande de ce dont je n’ai aucune connaissance. Et si Tu me pardonnes pas et ne me fais pas miséricorde, je serais au nombre des perdants ».
(11. Houd : 45-47 – Houd)
En vérité, Dieu avait beaucoup donné à nos illustres prédécesseurs ; il en donnera autant ou plus à leurs continuateurs – qui du reste ne seront pas forcément de leur lignée sanguine -, conformément à sa coutume :
(106) Si Nous abrogeons un verset [(ayat) ou un Signe] ou que Nous le fassions oublier, Nous en apportons un meilleur, ou un semblable. Ne sais-tu pas qu’Allah est Omnipotent ?
(2. La Vache : 106 – Al-Baqarah)
(48) Chaque Signe (ayat) que Nous leur montrions était plus probant que son précédent. Et Nous les saisîmes par châtiment, peut-être reviendront-ils [vers Nous].
(43. L’Ornement : 48 – Az-Zoukhrouf)
Refuser l’éventualité de l’avènement d’un autre Signe divin entraîne toujours la division de la communauté coupable, pour l’affaiblir et faire triompher la vérité, à l’instar des Juifs, et comme le suggère le Coran :
(64) Et les Juifs disent : « La main d’Allah est fermée ! [Dieu ne donnera plus la prophétie à un autre peuple !]». Que leurs propres mains soient fermées, et maudits soient-ils pour l’avoir dit. Au contraire, Ses deux mains sont largement ouvertes : Il distribue Ses dons comme Il veut. Et certes, ce qui a été descendu vers toi (le Coran) de la part de ton Seigneur va faire beaucoup croître parmi eux la rébellion et la mécréance. Nous avons jeté parmi eux l’inimité et la haine jusqu’au Jour de la Résurrection. …
(5. La Table Servie : 64 – Al-Mâ’idah)
Le reproche que nous avons fait à l’auteur de la contribution ne concerne que la forme ; certes, on peut comprendre sa volonté de provoquer, afin de susciter le débat ; mais il gagnerait à faire preuve de plus de tact et de courtoisie quand il aborde des thèmes aussi sensibles, sans toutefois renoncer à ses convictions, conformément à la ligne de conduite édictée par Dieu :
(125) Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés.
(16. Les Abeilles : 125 – An-Nahl)
En outre, il faut que qui œuvre pour la religion, à un niveau ou un autre, comprennent qu’il faut une expertise avérée et une autorisation pour prêcher sans risque de nuire et de créer des effets collatéraux contre-productifs. N’est pas guide qui veut, comme le suggère le Coran :
(23) Nous avons effectivement donné à Moïse le Livre (la Thora) … et l’avons assigné comme guide aux Enfants d’Israël. (24) Et Nous avons désigné parmi eux des dirigeants qui guidaient (les gens) par Notre ordre (ndigal) aussi longtemps qu’ils enduraient et croyaient fermement en Nos versets.
(32. La Prosternation : 23-24 – As-Sajda)
Au demeurant, rappelons que Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif n’a pas légué le khalifat, ni même le titre de Dignitaire (mouqadam) à ses deux illustres fils, démontrant ainsi de façon éloquente que la filiation biologique n’est déterminante dans la Voie de Dieu. Dès lors, Serigne Babacar ne pouvait pas déroger à cette ligne de conduite ; c’est pourquoi, en succédant à son illustre père et maître, Cheikh Seydi El Hadj Malick SY, il déclara à qui voulait l’entendre : « Je ne suis pas là, à cette place, parce que je suis le fils de Maodo ; si j’étais le fils de ‘’Malaw le Bucheron’’, cela ne m’empêcherait pas d’être le khalife de Maodo et celui de Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif ». Il est allé plus loin, en exhortant à son fils aîné de quitter Tivaouane et de ne plus y revenir, même pour ses funérailles, il remettait là en question la tradition tant de succession dynastique que celle de ‘’ville sainte’’.
En vérité, l’instauration de dynasties religieuses constitue une tare qui n’est pas l’exclusivité de notre pays ; elle a été prédite par le Prophète (PSL) et remonte très loin dans l’histoire de l’Islam :
– Safîna a entendu ces propos du Prophète – sur lui la grâce et la paix – : « Le khalifat durera trente années, puis s’établira une royauté (dynastie) ». Safîna ajouta : « Compte les deux années de khalifat d’Abû Bakr, les dix années de celui de ‘Umar, les douze de celui de ’Uthmân et enfin les six de celui de ‘Alî ».
A l’évidence, si la parenté était déterminante dans la succession spirituelle, ‘Ali le cousin et gendre du Prophète (PSL) serait son premier khalife. On peut considérer que les Prophètes et les ‘’Hommes de Dieu’’, d’une manière générale, n’ont pas de descendants, comme le suggère le Coran :
(40) Muhammad n’a jamais été le père de l’un de vos hommes, mais le messager d’Allah et « Sceau des Prophètes » (le dernier venu des prophètes). Allah est Omniscient.
(33. Les Coalisés : 40 – Al-Ahzâb)
Ainsi, Serigne Babacar SY disait qu’il pouvait ne pas avoir de relations avec son propre enfant biologique et être le père (spirituel) d’en enfant né à Koulikoro (contrée très lointaine). Il disait aussi que le Gamou de Tivaouane était celui de Cheikh Seydi El Hadj Malick et que le sien était celui de Saint-Louis (Ndar). Ainsi, à son disciple et fils spirituel, Son Eminence Serigne El Hadj Madior CISSE, il avait dit : « Je ne vous envoie pas à un gamou, mais à une mission » (*). Une véritable parabole !!! Oui, il ne pouvait s’agir que de la mission du Mahdi dont le Prophète (PSL) avait annoncé sa venue et dont le vénéré Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif avait déclaré qu’il sera son disciple et le rétro confirmera. Chaque nouvelle est annoncée en son temps ! (6. Les Bestiaux : 67 – Al-An’âm).
Selon le Prophète (PSL), le Mahdi détiendra le « Sceau de Salomon (fils de David) » ; ainsi, il sera aidé dans sa mission de restauration (revivification) de l’Islam, tant par ses partisans que ceux de l’Antéchrist (Satan) (38. Çâd : 30-40) ; c’est entre autre, ce qui explique l’avènement de ‘’nouveaux défenseurs de l’orthodoxie’’ (des ‘’serpents jaunes’’), dans ce contexte de la fin des temps (akhirou zamân), conformément au Hadith :
– Selon Ibn ‘Abbas, le Prophète – sur lui la grâce et la paix – fit le pèlerinage de l’adieu, puis il empoigna l’anneau fixé à la porte de la Ka’ba et prononça ces mots : « Ô gens vous informerai-je des conditions de l’Heure (fin du monde) ? … On verra les gens négliger la prière, s’abandonner à leurs passions et glorifier les riches … . L’Islam disparaîtra pour faire place à un pur formalisme … les mosquées seront décorées à la manière des églises et des monastères, les minbars seront de plus en plus hauts, les rangs de plus en plus nombreux alors que les cœurs seront divergents et les passions vives. … le croyant sera plus méprisé qu’une servante, son cœur fondra comme le sel dans l’eau, à cause de tout ce qu’il verra d’illicite sans qu’il n’y puisse rien changer … les gouvernants seront débauchés, les ministres crapuleux … . A cette époque Dieu enverra des ‘’serpents jaunes’’ piquer les oulémas pour avoir constaté l’illicite sans rien faire pour s’y opposer. ».
(Ibn Mardawayhi)
Et toujours selon le Prophète (PSL) le Mahdi remettra en cause le leadership de la Mecque et, à fortiori, celui de toutes les villes dites saintes :
– Abû Hurayra rapporte ces propos de l’Envoyé de Dieu – sur lui la grâce et la paix – : « L’Ethiopien aux Jambes Courtes (le Mahdi) ruinera la Ka’ba. ».
(Bukhari, Muslim)
– Et dans une autre version : « Il me semble le voir (le Mahdi), noir, les genoux cagneux, en train de démolir la Ka’ba pierre par pierre. ».
(Bukhari, Muslim)
Il ne faut pas se voiler la face ; tout sera renversé ; oui, tout va basculer ! Un grand remue-ménage et remue-méninges en perspective !
Et tout cela pour se démarquer de la tradition de dévolution monarchique du pouvoir spirituel. Cinquante ans après, l’histoire redonne raison à Serigne Babacar SY sur les partisans de cette déviation et confirme qu’il est un authentique khalife de Cheikh Ahmad TIDJANI Chérif – le « Sceau des Saints » (al khâtima’l wilâyah) et « Christ de la Parousie » (*). Un nouveau regard sur Serigne Babacar SY et sur la Tidjaniya ! N’est-ce pas ?
Docteur Mouhamadou Bamba NDIAYE
Ancien Interne des Hôpitaux de Dakar
Pédiatre à Thiès
Recteur de l’Université Virtuelle ‘’La Sagesse’’ de la Fondation Serigne Babacar SY Ihsaan – Bienfaisance (Thiès).
REFERENCES :
(1) A bas les marabouts de Tivaouane, de Touba, etc… par Mamadou Moustapha WONE, sociologue. Walf Quotidien N°5556, du 24 septembre 2010.
(2) Non Mr WONE, un sociologue n’insulte pas une société. Cheikh Bamba DIOUM. Xalimablog.
(*) Appel pour l’unité des musulmans par Dr Mouhamadou Bamba Ndiaye (En écrit et audio) http://sites.google.com/site.missionmahdi