Excepté le totalitarisme, il n’est point de modèle constitutionnel qui soit indiscutablement parfait. Un modèle constitutionnel ne tient qu’à l’idéal « non avoué » de ceux qui la conçoivent. Or l’Africain « aliéné » par l’occident est réputé être incroyablement habile dans sa capacité à tirer le meilleur des insuffisances « programmées ou pas » d’un système, plutôt que d’y apporter les corrections.
Dans un régime présidentiel, on observe la nécessaire volonté des pouvoirs africains de verrouiller des parlements souvent – pourtant – sans réel pourvoir; imaginons un seul instant des législatives dans un régime parlementaire en Afrique, ce serait « une élection présidentielle » dans chaque circonscription avec autant de gbagbo vs Ouattara dans autant des circonscriptions…le vrai bordel avec chacun sa guerre dans son village, son quartier, sa ville.
De plus, qui peut imaginer un Africain se contenter d’une présidence honorifique comme en Israël ou en Allemagne? Un chef Africain sans le pouvoir « suprême », c’est impossible! Qui peut imaginer un premier ministre aller au bout de son mandat sans « secousses » au sein de sa majorité dans un régime parlementaire? Les Africains doivent cesser d’importer des modèles constitutionnels qui ne correspondent pas à leurs réalités. Nous vivons dans des républiques artificiellement « fabriquées » par notre communauté internationale bien aimée, nous n’avons pas de nations.
Nous nous identifions d’abord à l’ethnie, puis à la région et enfin à la « nation »; le sens de la pyramide est inversé en occident, d’où sont originaires les modèles que nous calquons souvent à la lettre. Les Africains doivent donc avoir un rapport décomplexé avec leur attachement au clan et l’assumer. Ils doivent par conséquent identifier de grands ensembles identitaires au sein de leur république et imaginer un modèle constitutionnel qui prévoit une rotation à la tête de l’Etat.
Ce régime, nous le souhaitons présidentiel, pour les raisons citées plus haut, et inexorablement tournant. Il faut rendre l’alternance obligatoire par un mécanisme qui permet d’annihiler la tentation de la méthode « limitation, puis délimitation des mandats présidentiels ». Prenons par exemple le cas brulant de la Cote d’Ivoire. On pourrait avoir une constitution qui reconnait l’existence de deux grands ensembles identitaires: le grand nord et le grand sud.
Le principe : Un originaire de chaque grand ensemble est élu à la magistrature suprême pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois face à des adversaires également originaires du même grand ensemble. Le mécanisme : Le futur président de la République sera issu du grand sud. Seuls les candidats originaires de cet ensemble peuvent être candidats, mais le président est élu au suffrage universel pour avoir une réelle légitimité nationale et ne pas être « otage » de son ensemble d’origine ; car en cas d’une éventuelle sollicitation d’un second et dernier mandat, le président sortant à l’instar de ses adversaires « toujours originaires du même ensemble » devrait convaincre l’ensemble de la population.
Le mandat est renouvelable une fois pour un ensemble, donc seul le président élu au début de l’alternance « des grands ensembles » peut prétendre à une réélection.
L’alternance « des grand ensembles » a lieu tous les dix ans. La constitution fixe les conditions d’appartenance à un grand ensemble pour les cas spécifiques tels que : personne née de parents originaires de différents grands ensembles ; personne née d’un parent étranger, éventuellement personne née des parents étrangers.
Ce système qui favorise un équilibre des rapports de forces au sein de nos « nations » où les peuples se vouent une méfiance source des maux les plus graves, peut être un levier extraordinaire pour consolider une démocratie africaine. Après avoir adopté des modèles importés avec un certain échec, il est temps de passer à un modèle révolutionnairement africain. Une institution telle que la FIFA a montré l’exemple en adoptant le système le moins injuste pour la désignation des pays organisateurs de la coupe du monde, sans quoi La coupe du monde ne serait jamais venue dans notre continent et nos frustrations n’auraient cessé d’être une bombe à retardement.
Par Bertrand Ulrich Mboungou