Des centaines de millions pour un centre en ruines
Trois ans après la destruction d’une partie du Centre polyvalent de Dakar, ex-camp Caomi de Liberté 6, pour une construction, les travaux n’ont toujours pas débuté. Le centre, qui est l’objet de convoitises foncières qui retardent le démarrage des travaux, continue quand même de fonctionner avec un budget qui lui est attribué.
Par Safiétou KANE
Le Centre polyvalent de Dakar, sis à Liberté 6 a été démoli en 2007, et devait être reconstruit pour un montant de 250 millions de francs Cfa. Mais jusqu’en 2010, les travaux n’ont pas encore débuté. Au moment où ce centre était détruit, il était sous la direction de Mayé Djité, qui a été remplacé en 2008 par Thierno Ndiaye. Mais ce centre, qui n’existe pratiquement plus, continue de bénéficier d’un budget de fonctionnement dépensé, selon certaines personnes «par le biais d’engagements fictifs», alors qu’aucun enfant n’y est pris en charge. Un budget d’investissement qui serait évalué à plus de «400 millions de francs».
Le Quotidien, qui a essayé d’en savoir plus, s’est heurté à un refus du directeur Thierno Ndiaye, qui s’est débiné. (Voir par ailleurs).
C’est auprès de Bamba Niang, porte-parole du ministère de la Justice, que Le Quotidien a contacté que des réponses ont été apportées. Et pour M. Niang, «il n’a jamais été question de 400 millions pour le fonctionnement du centre. Cela n’a jamais été le cas». La somme de 400 millions évoquée entre dans la construction des «tribunaux de Tivaouane et de Mbacké». Mais cette somme qui existe dans le budget de fonctionnement de 2008 a fait l’objet d’un transfert pour l’équipement du nouveau palais de Justice de Dakar. Un détournement d’objectif ? Non, selon M. Niang. «Ce sont les réaménagements budgétaires qui interviennent en cours d’année qui font que certains postes budgétaires font l’objet de ponction», soutient le porte-parole du ministère de la Justice. En effet, le palais de Justice de Dakar devait être équipé à hauteur d’un peu plus d’un milliard de francs cfa. Un appel d’offres a été lancé, mais l’Armp l’avait cassé, parce que soit-disant que la Tse, qui avait gagné le marché, n’avait pas les compétences pour équiper un tribunal.
Le déménagement dans les nouveaux locaux du palais de Justice ayant été annoncé, ce sont les 400 millions destinés à la construction des deux tribunaux de Mbacké et Tivaouane et l’équipement du palais qui ont été utilisés à cet effet. L’argent sera remboursé une fois que le marché sera réattribué.
AU RALENTI, LE CENTRE VIT AVEC UN BUDGET
DE 10 MILLIONS
Mais chose curieuse dans les documents que Le Quotidien a reçus portant sur le tableau récapitulatif par titre, article, paragraphe et ligne, section 34 du ministére de la Justice, titre 3, sous le chapitre 651 340 600 11, concernant les dépenses de fonctionnement du Centre polyvalent, on y retrouve les libellés qui démontrent que le centre continue de fonctionner, même s’il est à moitié détruit et qu’aucun enfant n’y est pris en charge. Ce sont des libellés des rubriques habituelles qu’on y retrouve. C’est le cas pour les fournitures de bureau évaluées à 1 million de francs, des matériels et produits d’entretien pour 500 mille francs, les consommables informatiques pour 704 mille francs, le carburant pour 1,5 million, les matériels pédagogiques et didactiques pour 1 million, autres fournitures pour 1,546 million, l’entretien et la maintenance du matériel informatique pour 500 mille francs, entretien et réparation des véhicules pour 886 mille, 800 mille pour le gaz, des frais de poste pour 100 mille, les frais de mission à l’intérieur du pays pour 1 million, autres achats-biens et services pour 500 mille francs. Le tout pour un montant total de 10,036 millions de francs pour un centre qui vit au ralenti avec seulement le poste du directeur et celui du gardien, pour l’année 2009 et 2010. Ce montant a connu une baisse, puisque le fonctionnement du centre était de 20,836 millions de francs pour l’année 2008. Là, le porte-parole du ministère de la Justice explique et parle d’un budget de 10 millions de francs, «en réalité, qui ne sont pas engagés, mais la budgétisation des lignes de crédit est maintenue pour qu’après la réfection on puisse réhabiliter ces mêmes lignes de crédit sans trop de problèmes. Si on les supprime, ce sera difficile de les réintégrer dans le budget de fonctionnement». Avant d’ajouter que ce n’est que la rubrique «autres achats de biens et services de 500 mille francs qui fonctionne réellement».
convoitises FONCIèRes
Pour la construction du Centre polyvalent de Dakar, il était prévu un montant de 250 millions de francs cfa. 166 millions ont été prévus dans le budget d’investissement de l’année 2007, année à laquelle le centre a été détruit. Mais cet argent aurait été ponctionné par l’Etat.
Une deuxième ponction interviendra en 2009, sur les 75 millions qui ont été encore réaffectés pour la construction. Aujourd’hui le centre risque encore d’attendre longtemps avant de voir ses nouveaux bâtiments sortir de terre. En effet, il est confronté selon Bamba Niang «à un problème de budget» avec les différentes ponctions qui sont intervenues. Mais surtout «à un problème de foncier». En effet, comme l’a rappelé une des personnes interrogées, le «centre était plus grand que ce qu’il est aujourd’hui. Les maisons que vous voyez, et qui l’entourent, les terres sur lesquelles elles sont construites, appartiennent au centre. Et il y a des personnes qui travaillent à l’intérieur comme les mécaniciens qui veulent s’approprier ce centre et en faire un bien. Ce qui fait qu’il existe un véritable problème foncier».
Alors, la question qu’on se pose, c’est comment ce centre qui a existé depuis 1957 sous le nom de Centre d’accueil et d’orientation pour mineurs inadaptés (Caomi), devenu Centre polyvalent social, en 1981, et Centre polyvalent, en 1996, a pu se retrouver avec un problème de foncier qui retarde, depuis 2007, la construction de ses nouveaux bâtiments. La question reste presque sans réponse.
Mais le ministre d’Etat chargé de la Justice, El hadj Amadou Sall, compte bien trouver la réponse à cette question. En effet, selon Bamba Niang, porte-parole du ministère de la Justice, «le ministre d’Etat a dit qu’il lui faut tous les éléments concernant cette question du foncier pour pouvoir être informé convenablement, avant d’entreprendre des actions. Le dossier sera sur sa table bientôt».
En attendant, le dossier de la reconstruction du centre est pendant à la direction de la construction.
lequotidien.sn