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Farba Senghor, ancien ministre, ancien chargé de la Propagande au Pds : «Omar Sarr n’est pas l’homme qu’il faut : Pape Diop chercherait à se protéger»

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Farba Senghor descend de son «8×8» noir, symbole de la puissance et de l’opulence du régime libéral. Ce jeudi 17 mai 2012, il visite le journal Le Quotidien avec un air de défiance envers ceux qui doivent l’interroger. Il prend à témoin une meute de proches, militants et sympathisants qui vont le rejoindre plus tard dans la salle de Rédaction. A son mentor, il jure toujours fidélité et loyauté, à l’image de son costume et de sa cravate bleus comme les couleurs du Pds. Pape Diop et Cie ont pris leurs distances par rapport au navire incliné du Pds pour s’accrocher à Bokk Guiss Guiss. Mais Farba préfère, avec le Secrétaire général national, tenir le bout du gouvernail libéral. Même si le choix de Omar Sarr, comme tête de liste du Pds aux Législatives ne l’agrée pas. Pour l’ex-chargé de Propagande au Pds, le baron de Dagana n’a pas le charisme politique qu’il faut, ne connaît pas le parti et donc, n’est pas la personne indiquée pour éviter le naufrage. Législatives, fronde, gestion de Macky…, Farba Senghor déroule.
Vous êtes en troisième position sur la liste départementale du Pds à Dakar. Est-ce une bonne position pour vous ?
Non. Je ne considère pas cela comme une bonne position. J’aurais souhaité être la tête de la liste de Dakar pour engager le combat pour mon parti et relever tous les défis. Mais, comme vous le savez, dans notre parti, il y a une lutte pour la succession de Me Wade à la tête du Pds. Ce qui fait que j’ai été victime d’un groupe qui essaie de manipuler pour hériter du Pds. Mais je l’ai accepté en me disant, comme tout le monde a pu le constater, que je suis légitime. Mes amis qui sont autour de Abdoulaye Wade savent parfaitement que je peux gagner le département de Dakar. Mais ils se sont dit que, dans tous les cas, le Pds n’en sortira pas vainqueur. Certains se sont même dit qu’il ne faut pas donner à Farba Senghor l’opportunité de remporter Dakar et d’engranger ce succès pour son propre compte.

Quel est ce groupe dont vous parlez ?
Ce groupe on le découvrira. Je suis obligé de composer avec eux, de travailler avec eux, afin de les surveiller pour qu’ils ne s’accaparent pas demain du parti. J’ai dit aux gens qu’il faut rester dans le parti parce qu’il nous faut ce parti. Il ne faudrait pas que d’autres personnes viennent le récupérer. Je ne l’accepterai pas. J’y veille !

Pratiquement, il ne reste que Oumar Sarr au Pds…
Oumar Sarr et quelques-uns. Omar Sarr ne connaît pas le parti. Il connaît les grands responsables, mais le parti ne le connaît pas parce que beaucoup de personnes m’ont dit qu’elles ne reconnaissent pas Oumar Sarr, mais je leur ai demandé de rester dans le parti.

Et vous êtes d’accord avec ces gens-là ?
Je suis d’accord avec eux, mais je leur demande de ne pas partir, de rester dans le parti.

Vous estimez que vous êtes plus légitime que Omar Sarr ?
Je pense que l’ensemble du parti doit me revenir parce qu’après Abdoulaye Wade, il n’y aura plus une personne plus légitime que moi. Il y a certes Ablaye Faye qui a fait toute sa carrière au Pds, ou Alioune Diop, mais Omar Sarr, quand il adhérait au parti, j’ai été le premier à le recevoir. Donc, je connais parfaitement Oumar Sarr.

Mais, à votre avis, ce n’est pas la personne la mieux indi­quée pour diriger la liste du Pds aux Législatives?
Non. Parce qu’il ne sait pas parler.

C’est-à-dire…
Il n’est pas un politicien loquace.

Il n’a pas de charisme ?
Voilà, c’est ça. Au début de l’année 2000, il avait une influence sur toute la région de Saint-Louis. Et au fur et à mesure il a perdu son influence dans sa zone avec le retour de Ousmane Ngom, le réveil de Ousmane Masseck Ndiaye et l’arrivée de Awa Ndiaye. Il a perdu son influence sur Podor et dans son propre fief, Dagana. Ensuite, la fameuse communauté rurale de Mbane et Richard-Toll. S’il est vrai qu’il a toujours gagné depuis son arrivée dans le parti, il reste qu’il est de moins en moins influent à Dagana. Donc, il n’est pas l’homme approprié.

Mais il est quand même un des rares responsables à avoir gagné dans sa localité, au moins…
Il ne s’agit pas de gagner dans une commune, mais d’avoir une influence ascendante.

Qui d’autre donc devait être tête de liste ?
Il y a des dirigeants qui ont une connaissance large du parti, comme Abdoulaye Faye, Lamine Thiam, Farba Senghor, et autres. Personne ne peut le nier. Ce que l’on devrait faire, c’est rassembler ces groupes de personnes et travailler dans l’intérêt du parti pour faire une liste forte permettant de remporter les élections. Cependant, je respecte le choix du Secrétaire général national qui a choisi Omar Sarr comme coordonnateur national du parti. Je rappelle que moi aussi j’ai été coordonnateur et comme Omar Sarr, j’ai été nommé par le secrétaire général national. Nous avons un parti qui est personnalisé. Donc, c’est comme lorsque le président de la République nomme un Premier ministre et qu’un ancien Premier ministre veuille contester la nomination de son successeur.

Des nominations mais jamais d’élections. Cela ne pose-t-il problème?
Non, il n’y a aucun problème. C’est la structure de notre parti qui est ainsi faite.

Vous ne récusez donc pas le choix de Omar Sarr comme tête de liste ?
Je vous ai dit que Omar Sarr n’est pas la personne appropriée qui connaît bien le parti et que les militants connaissent très bien pour pouvoir relancer le parti à la suite de la défaite.

Qui suggéreriez-vous pour diriger la liste nationale ?
Sans vouloir être taxé d’orgueilleux, je crois qu’on devrait réunir un groupe comprenant Abdoulaye Faye, Farba Senghor, Lamine Thiam, Modou Diagne Fada et tant d’autres. C’est-à-dire des gens qui connaissent le parti.

Vous parlez de ceux qui sont restés au Pds ?
Pas eux seulement, même ceux qui sont partis.

Vous n’avez pas cité Pape Diop et les autres qui sont partis ?
Parmi eux, il y a des responsables qui pouvaient donner des avis importants pour le parti.

Comme Pape Diop ?
Je ne pense pas que Pape Diop devrait diriger la liste. A mon avis, il a été président de l’Assemblée nationale et il est encore Président du Sénat. Il a tout obtenu. Il ne doit pas se battre pour être député, à moins qu’il ne cherche à se faire garantir une immunité.

Une immunité par rapport à quoi ?
(Un bref silence). Une immunité par rapport à des menaces extérieures.

Quelles menaces ?
Quand on perd le pouvoir, généralement, il y a une chasse aux sorcières. Certaines personnes pourraient chercher protection quelque part.

Mais si on cherche protection cela suppose qu’on ait des choses à se reprocher ?
Le premier reflexe de l’homme, qui est un animal, c’est de se protéger quand il y a un danger.

Ah oui, il y a danger ?
Il y a danger dans la mesure où ceux qui avaient le pouvoir, l’ont perdu. Par conséquent, le perdant se met dans une position défensive. Ça, c’est le propre de l’homme et de l’animal.

C’est votre cas aujourd’hui ?
On reviendra sur ça. Ce que je voudrais vous dire, c’est que les grands responsables du parti devraient se battre dans leur fief. Souleymane Ndéné Ndiaye qui était le directeur de campagne, Pape Diop, Mamadou Seck, Ousmane Masseck Ndiaye et tant d’autres devraient le faire. S’il y a des gens qui ont lutté pour conserver leur département c’est Ousmane Ngom et Farba Senghor. Il n’y a personne d’autre.

Voulez-vous dire donc, que tous les autres voulaient figurer sur la liste nationale ?
Chacun voulait figurer sur la liste nationale. Le Président avait dit que la liste nationale devait être réservée aux jeunes. Il fallait y laisser des hommes d’expérience, parmi des députés capables de défendre le parti. Parce que nous savons que nous allons inévitablement faire face à plusieurs fronts. Je l’ai dit au Président. Le premier front, c’est celui de Macky et son pouvoir. Ensuite, celui de Pape Diop et ses amis qui sont partis.

Mais Pape Diop et ses amis disent qu’ils ne sont pas partis ?
A partir du moment où ils ont fait une liste, ils se sont auto-exclus du parti (Ndlr : L’entretien a eu lieu jeudi 17 mai). Ce sont les statuts du parti qui le stipulent. Donc, il y a le groupe de Pape Diop avec Bokk Guiss Guiss, mais également une autre bataille inévitable, celle de la reconstruction du parti et de notre retour au pouvoir.

Quel est le sentiment qui habite aujourd’hui le président Wade par rapport à cette fronde ?
Le Président parle de trahison. Il leur a tout donné. Aujourd’hui, qu’ils présentent leur propre liste, il ne peut y voir que de la trahison. Il ne s’agit pas d’être mécontent, de bouter tout dehors et de partir. Dans la vie, il faut apprendre à se battre au sein des structures. Et cette bataille il faut la mener à l’intérieur.

Macky ne s’est pas battu à l’intérieur du Pds et cela lui a réussi. Les autres se sont dit certainement «pourquoi pas nous» ?
Ce qui est arrivé à Macky est exceptionnel. Le président Wade a été victime d’un complot international et national. Au niveau international, le président Wade a énormément gêné les Etats-Unis et la France parce qu’il s’est toujours présenté comme un homme qui savait faire appel à la dignité africaine, qui s’imposait, et qui n’avait rien à recevoir ni de Obama ni de Sarkozy. Mais cela faisait mal à ces présidents qui sont en train de mettre en place une forme d’hégémonisme occidental à travers le monde, et auquel le Sénégal ne devrait pas échapper.

Et le «complot national» ?
Tous voulaient faire partir Abdoulaye Wade. Il est arrivé au pouvoir avec le soutien des Moustapha Niasse et les autres. Ils ne se sont pas retrouvés dans ce que faisait Wade et ils se sont mis à dénigrer le Sénégal. Ce qui a fait mouche quelque part.

Mais c’est la politique, cela leur a réussi, comme cela a été le cas pour Wade au Palais Bourbon par exemple…
C’est un peu différent. Mais ce qu’il faut retenir c’est ce complot international. Et puis vous savez, en un moment donné, j’ai été un des piliers dans la défense du président Wade. Mais ils ont tout fait pour m’écarter de l’entourage du président. Si je n’étais pas résistant on ne parlerait plus de moi.

Qui étaient ces gens-là ?
(Il feint encore) Certains étaient manipulés par l’extérieur. Vous avez vu que le président Wade a reculé sur plusieurs points. C’est le cas quand il a voulu faire déguerpir le Lycée Lamine Guèye par exemple. Parce que, dans son entourage, les gens ont pu s’infiltrer pour convaincre certains qui sont autour de lui. Je ne sais pas comment on a réussi à les corrompre. Ce sont les mêmes pressions qui ont amené le président à me mettre un peu à l’écart.

On vous a fait le même reproche que vous aussi vous auriez une certaine influence, vous avez même fait démettre certains?
Je n’étais pas toujours d’accord avec le groupe. Même si j’étais toujours présent. C’est pourquoi ce groupe-là me mettait toujours en mal avec les autres.

Comment expliquez-vous la situation difficile que vous avez laissée à Macky Sall ?
(…) A partir du 23 juin, il y avait une diminution progressive des importations et de la production au Sénégal. Les investisseurs étrangers n’avaient plus confiance, ils sont partis. C’est ce qui fait que les prix ont augmenté entre le 23 juin et le mois de décembre. C’est une inflation artificielle qui est due non pas à des facteurs extérieurs mais à la tension créée par le M23 et l’opposition au Sénégal.

N’est-ce pas facile d’accuser le M23, alors que le ticket Pré­si­dent-Vice président était en cause…
(Il coupe) Attendez, il ne s’agit pas d’accuser. En tant que spécialiste, je dois prouver ce qui a augmenté les prix entre cette date, le 23 juin, et le 31 décembre. C’est parce que les investisseurs n’avaient plus confiance. Cette situation va perdurer parce qu’il y aura des difficultés pour les bailleurs pour refaire confiance au Sénégal, aussi bien pour les prix que pour l’économie de façon générale. On va vers une chute de la croissance et au moins pour deux ans.

Les bailleurs de fonds promettent plus qu’ils ne donnent. Le président Wade avait l’avantage de contourner les institutions de Bretton Woods, la Banque mondiale et le Fmi en diversifiant ses relations avec les pays asiatiques comme la Chine ou l’Inde. Et Macky Sall, lui, va revenir à l’orthodoxie occidentale, c’est-à-dire, s’engouffrer dans un canal où il y a un contrôle strict.

Donc, avec les pays asiatiques et ceux du golfe, il n’y avait ni orthodoxie ni contrôle strict des occidentaux.
Je veux dire qu’avec les occidentaux, les demandes ne sont satisfaites que sur des échéances de deux ou trois ans. Tous les pays sont en train de s’affranchir du joug occidental.

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