C’était la sensation du 66e Congrès de la FIFA à Mexico City : la nomination de la Sénégalaise Fatma Samoura au poste de secrétaire général. Depuis la création de l’institution, c’est la première fois qu’une femme – et même une personne non-européenne – va occuper cette fonction. Diplomate aux Nations Unies depuis 21 ans, elle a occupé divers postes à travers l’Afrique, notamment à Madagascar et au Nigéria. A 53 ans, Fatma Samoura sera donc observée car ce choix marque un virage radical au sein de l’organisation régente du football mondial.
- Votre nomination est apparue comme une surprise totale. Comment ce poste vous a-t-il été proposé par le président de la FIFA ?
Il y a eu un processus de consultation mené par Gianni Infantino. On s’est rencontrés lors de sa pré-campagne à Madagascar où je servais comme Coordinatrice Résidente du Système des Nations Unies. Je pense qu’il a eu une bonne impression car on était à la même table avec des amis. Ils lui ont raconté mon apport pour le pays afin de sortir Madagascar de la crise politique qui avait miné toutes les bases de l’économie locale pendant cinq ans. Je gérais le budget électoral avec tout ce que cela comporte comme défis, j’avais également un rôle dans la médiation. Il a donc tenu à me revoir après sa prise de fonction en tant que président de la FIFA car il cherche à apporter une vision différente.
- Votre profil est plus celui d’une diplomate. Qu’est-ce que vous pouvez apporter à la FIFA qui sort à peine d’une crise extrêmement profonde?
La FIFA est l’équivalent des Nations Unies du football, même si l’on peut dire que plus de personnes ont de l’intérêt pour la marche du football international. C’est une grosse entreprise qui requiert divers compétences, une grande probité, de l’intégrité, une capacité à travailler en équipe, à surmonter les clivages. Il faut parvenir aussi à réunir les hommes, ce sont des compétences que je suis parvenu à utiliser pendant tous mon parcours aussi bien dans le secteur privé au Sénégal où j’ai passé huit années que pendant mes années aux Nations Unies. Le président Infantino avance un programme de réformes qui demande des compétences qui ressemblent à celles que j’ai acquises dans ma carrière. Je pense que ça a été déterminant dans son choix.
- Ne pas être issue du monde du football, vous pensez que ce sera un atout?
J’ai toujours eu à relever des défis aussi bien dans ma carrière professionnelle que dans ma vie privée. Le discours du président était très clair. Il recherche la diversité. Il a besoin de renforcer l’organisation par des connaissances extérieures. Il a besoin de personnes de confiance. Ce sont des qualités qu’il a du trouver chez moi. Et puis, mon mari a été footballeur professionnel au Sénégal (Dial Diop, club mythioque des années 50-60, ndlr) même si sa carrière a été courte en raison d’une grave blessure.
- En étant la première femme et la première non-européenne, vous allez être une digne représentante de la diversité recherchée par Gianni Infantino. Attachez-vous de l’importance à ce côté symbolique?
Je trouve que c’est une bonne chose pour l’Afrique, pour les femmes en général et pour les femmes africaines en particulier. Mais c’est surtout un signal très fort de réformes réalisées en profondeur au sein d’un système qui a toujours été dominé par les hommes. Ceci dit, ce qui compte pour moi c’est l’agenda chargé qui est devant nous avec des évènements importants mais aussi des structurations aussi bien au sein de l’organisation que des coopérations et des associations. C’est ça l’essentiel, je ne me focalise pas sur le fait d’être une femme. Ce qui m’importe, c’est d’avoir une vision du football qui rassemble et qui surmonte les différences idéologiques, religieuses sexuelles ou sexistes. Qu’on se donne rendez-vous à la fin de nos trois années avec un bilan positif, des changements en profondeur qui vont rassurer les fans. J’espère aussi qu’on va accorder beaucoup plus d’importance au football féminin car il y a un grand besoin de développement.
- Concrètement, que peut-on attendre de vous dès votre prise de fonctions?
On ne peut pas me donner de jouer un match avant le coup d’envoi ! Mais le système FIFA a besoin de personnes qui sont fonctionnelles, de personnes motivées. Je ne pense pas qu’il y aura une grosse différence par rapport à ce que je fais tous les jours. Je dirige des hommes, des femmes, des équipes. Je suis en contact avec des personnes aux backgrounds différents et à qui je dois prouver que je suis la meilleure dans ce que je fais.
bbc