spot_img

Financement des PME: Prendre ou lever le risque

Date:

A défaut d’un accès au financement bancaire, les crédits interentreprises demeurent la première source de financement des PME au Sénégal, selon une étude commanditée par le Ministère des Mines, de l’Industrie et de la PME à travers la Direction des Pme dont le patron, Ibrahima Diouf, était l’invité, ce week-end, du Collectif des journalistes économiques du Sénégal(Cojes).

L’importance stratégique des Petites et moyennes entreprises (PME) dans l’économie Sénégalaise n’est plus à démontrer, mais c’est simplement parce qu’elles constituent plus de 90% du tissu économique. Car en dépit de cette supériorité numérique, elles ne contribuent que pour moins de 33 % à la croissance et au chiffre d’affaires et à 42 % à la création d’emplois. Pire, 63% des Pme au Sénégal mourraient avant leur première année d’exercice. Y a un problème.

D’abord, à l’exception de quelques entreprises intervenant dans les secteurs du commerce, de l’industrie manufacturière et des services, la rentabilité des PME pose problème. Mais si l’on commence par le commencement, c’est déjà la forme juridique même des Pme existantes qui semble rebuter la plupart des circuits de financement notamment le système bancaire.

Il ressort d’une récente (30 avril 2010) étude commanditée par le Ministère des Mines, de l’Industrie et de la PME à travers la Direction des Pme, que la société individuelle est la forme juridique prédominante dans les Pme. Par ailleurs, les enquêtes effectuées dans le cadre de cette étude révèlent qu’environ 36% des PME enquêtées sont de type familial tandis que les sociétés à capitaux représentent environ 15% de la population enquêtée. D’où une corrélation entre la taille de l’entreprise et sa forme juridique.

Conséquence, devant la rareté voire l’absence des sources de financement bancaire, les fonds propres et les ressources provenant de la famille ou d’amis constituent les sources premières de financement des PME au démarrage, les institutions de financement n’intervenant qu’à hauteur de 5%.

PME ?

Il n’y a pas, selon le Directeur des Pme, de définition universelle de la Pme. Cependant, le Gouvernement du Sénégal a adopté le 6 février 2008, la loi d’orientation qui définit deux grandes catégories de PME: la Petite entreprise et la Moyenne entreprise.

Aussi, la Petite Entreprise est-elle caractérisée par : un effectif compris entre un (1) et vingt (20) employés, la tenue d’une comptabilité allégée ou de trésorerie certifiée par la Structure de gestion agréée (SGA) selon le SYSCOA ; un chiffre d’affaires annuel hors taxe n’atteignant pas les limites suivantes prévues dans le cadre de l’impôt, à savoir, entre autres, cinquante (50) millions de FCfa pour les Petites Entreprises qui effectuent des opérations de livraisons de biens ; vingt cinq (25) millions de FCfa pour les entreprises qui effectuent des opérations de prestations de services ; etc…

Quant à la Moyenne Entreprise, elle répond aux critères, tel qu’un effectif inférieur ou égal à deux cent cinquante (250) employés ; la tenue d’une comptabilité selon le système normal en vigueur au Sénégal (SYSCOA) et certifiée par un membre inscrit à l’Ordre national des experts comptables et comptables agréés (ONECCA) ; un chiffre d’affaires annuel hors taxe inférieur à 5 milliards de FCfa.

Toutefois, cette définition officielle de la PME prend en compte uniquement les
PME dites formelles qui opèrent en conformité avec la réglementation, tiennent une comptabilité et communiquent régulièrement les informations financières. Ces entreprises constituent le corpus du fichier CUCI de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie. En réalité, une frange
importante du tissu des entreprises au Sénégal est composée d’entreprises opérant dans l’informel et donc en marge de la réglementation. Pour autant, selon certaines estimations, le secteur informel représente environ 60% du PIB et emploie 90% de la main d’oeuvre. Il y aurait nécessité à ajuster la loi pour l’adapter aux réalités du secteur et à mettre en place un système d’information sur l’évolution du secteur et de l’accès au financement des PME.

Il semble d’ailleurs qu’en général dans les banques, la segmentation de la clientèle par marché place les PME dans le lot de la clientèle des entreprises, avec un classement qui tient essentiellement compte du chiffre d’affaires confié et du niveau d’organisation, y compris le style de mangement du dirigeant. Aussi, très peu de banques se réfèrent à la loi d’orientation pour définir la PME.

Le niveau de chiffres d’affaires retenu ou le plafond varie d’une banque à l’autre. Il se situe autour de 3 milliards de FCFA. Cependant la pratique de la sous-segmentation est courante pour tenir compte des niveaux de développement des PME et aussi de la spécificité des secteurs d’activités.
Pendant que les banques commerciales se focalisent sur les grandes entreprises et les PME d’unecertaine taille, les Systèmes Financiers Décentralisés s’articulent autour des Toutes Petites (TPE) et Petites Entreprises (PE) qui pour l’essentiel opèrent dans l’informel.

Une clientèle risquée

A l’analyse, il apparaît un niveau assez élevé du risque inhérent à la structuration (ou non structuration) des Pme sénégalaises. Du fait de leur faiblesse structurelle évoquée plus haut, les Pme constituent notamment pour les banques, une clientèle risquée (taux brut de dégradation du portefeuille supérieur à la moyenne de 16,9% à fin décembre 2007) qui menace la rentabilité des banques. Les principales menaces relevées dans le cadre de l’étude lors des entretiens avec les banquiers sont relatives, entre autres, à : la mauvaise qualité de l’information financière produite par les PME; le manque d’états financiers fiables, aggravant les limites du système de modélisation pour déterminer la rentabilité de la relation banque/PME utilisée par les banques ; l’inexistence d’une stratégie clairement définie qui se traduit par un pilotage à vue et l’absence d’une bonne visibilité des marchés ciblés par les PME ; l’existence d’un niveau de capitalisation très faible, une vétusté des installations techniques, un taux d’endettement élevé et une rentabilité faible ;
L’inexistence de garanties réelles ou de cautions de l’Etat ou d’Institutions financières comme indiquées par la BCEAO dans le cadre de l’instruction n° 94-05 relative à la comptabilisation et au provisionnement des engagements en souffrance. De plus, l’inéligibilité des PME aux garanties financières disponibles telles que le FAGACE, le Fonds GARI, constituerait aussi une menace certaine pour les banques.

Malgré tout

Somme toute, les conditions pour une intensification de l’offre de financement aux PME ne semblent pas encore réunies. Le financement de l’économie en général est déjà jugé très faible. Il correspond à environ 20% du PIB comparé à des taux de 70 à 80% dans des pays émergents. Pour les banques, les concours se font au détriment des PME et du financement à moyen et long terme de l’investissement et les PME sont de plus en plus exclues du système bancaire et financier, la réglementation bancaire concourant à en faire une cible peu attrayante. A cela s’ajoute la méfiance avérée de la majorité des PME vis-à-vis du secteur financier. Du coup, le secteur bancaire ne finance que le tiers des besoins exprimés des PME estimés à 595 milliards de FCFA à fin décembre 2007. Le gap de financement bancaire peut est estimé à environ 393 milliards de FCFA, soit 66% des besoins exprimés. Le secteur bancaire ne finance que le tiers des besoins exprimés estimés à environ 595 milliards de FCFA à fin décembre 2007.

Cette position du secteur bancaire contraste avec celle des SFD qui sont très actifs dans le financement des micro et petites entreprises. Bien que les SFD disposent de ressources et de capacités limitées, ils arrivent à couvrir 60% des besoins évalués à environ 170 milliards de FCFA exprimés par leur clientèle PME.

Les ressources longues nécessaires pour satisfaire les besoins d’investissement des entreprises manquent considérablement dans le système financier. La dynamisation de l’offre de crédit bail apparaît comme une première réponse. L’assouplissement des règles prudentielles par l’autorité de supervision en est une autre. Une troisième piste porte sur l’accès des banques et des SFD du Sénégal au marché financier régional pour mobiliser des ressources stables à des taux compétitifs pourvu qu’elles développent le savoir-faire nécessaire.

Quant aux clients, ils attendent de la part des institutions prêteuses, une réduction des coûts d’accès, le financement des investissements, la simplification des procédures et dans une moindre mesure, la suppression ou la réduction des garanties. Par ailleurs parmi eux, le groupe des PME structurées ressent particulièrement les difficultés liées à la compétition étrangère, aux procédures administratives et aux tracasseries diverses. Le problème reste donc entier malgré la pertinence notée, de l’étude sur l’ « offre et la demande de financement de la Pme », menée parallèlement aux travaux de préparation de la LPS  (Lettre de politique sectorielle)en cours, l’étude vise à éclairer les choix finaux en termes d’orientation, mais aussi à servir de point de départ pour la construction d’une base de connaissances nationales sur le sujet qui préoccupe au premier plan les entrepreneurs au Sénégal : l’accès au financement de manière durable et approprié afin de faire jouer pleinement ce puissant levier d’amélioration de la compétitivité.

sudonline.sn

1 COMMENTAIRE

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_img

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

Afrique-Soudan : début du réquisitoire à la CPI contre Ali Kushayb, ex-chef des Janjawid

XALIMANEWS-La Cour pénale internationale (CPI) entame aujourd’hui les plaidoiries...

Afrique : L’armée française a débuté son retrait du Tchad avec deux Mirage 2000

XALIMANEWS-comme l'a annoncé l'état-major des armées tchadiennes dans un...

Pour une transformation structurelle urgente du Parti socialiste du Sénégal (Par Kadialy Gassama)

Les élections législatives anticipées du 17 novembre 2024 ne...

Emigration clandestine: Disparition d’une pirogue avec 170 Sénégalais dont 23 femmes, 7 enfants et des bébés

XALIMANEWS: Boubacar Sèye, président de l’ONG Horizons Sans Frontières...