La République est en affolement. Le Président réélu Macky Sall n’a même pas encore prêté serment que voilà les éternels politiciens qui nous plongent dans des débats stériles qui détonnent avec la volonté de mettre ce pays ankylosé sur les rails de l’émergence. D’une part Aïssata Tall Sall, alliée de Bennoo Bokk Yaakaar, a lancé le débat controversé sur le couplage des élections locales et législatives.
Aujourd’hui comme un os à ronger, la presse et les politiciens indécrottables s’en donnent à cœur joie. D’autre part, le débat insensé du 3e mandat agité avant même la proclamation officielle des résultats par le Conseil constitutionnel. Et bizarrement, c’est la presse qui attise le débat du 3e mandat comme si l’instinct pyromane l’incitait à attiser un incendie qui tarde à prendre forme.
Tous les hommes politiques apéristes qui passent dans les médias sont interrogés sur la question. Et ceux-là même qui esquivent le sujet ou refusent d’y répondre sont poussés jusque dans leurs derniers retranchements. Il faut extorquer un aveu sur le troisième et en faire une exclusivité. Ismaïla Madior Fall, Garde des Sceaux, a le triste mérite d’avoir brouillé les esprits en répondant aux confrères de L’Enquête en ces termes clair-obscur : « Pour moi, la Constitution est claire, mais j’ai entendu des professeurs de droit dire que, telles que les dispositions ont été rédigées, le président peut faire un autre mandat. Moi, je pense que la Constitution est claire. En principe, c’est le deuxième et le dernier mandat ».
Mais c’est avec le tonitruant transhumant Sitor Ndour que les journalistes ont recueilli ce qu’ils voulaient entendre sans surprise. « Légalement, le troisième mandat est possible. La Constitution dit à peu près ceci : le mandat présidentiel est de 5 ans. Nul ne peut exercer au-delà de 2 mandats consécutifs. Cette loi a été prise au moment où le premier mandat de Macky Sall était en cours. Tout le monde sait qu’en droit, la loi ne vaut que pour l’avenir, elle n’à point d’effet rétroactif », dixit l‘ancien responsable de Energie libérale pour une avancée nationale (Elan). Et voilà, c’est parti pour des joutes politico-médiatico-juridiques jusqu’en 2024 !
Ce débat, qui agite la mouvance présidentielle notamment l’Alliance pour la République (APR), est contre-productif car il perd de vue l’essentiel des priorités : remettre le pays au travail car tout le septennat de Macky Sall a été dédié pour la plupart à la politique politicienne et à des règlements de comptes à la place de la reddition des comptes.
Aujourd’hui comme Sisyphe, le pays tourne en rond et fait du sur-place. On aimerait bien entendre le Président Sall répéter les mêmes propos de 2014, quand à son retour du Groupe consultatif de Paris en février autour du Plan Sénégal Emergent (PSE), il disait sans ambages : « Nous devrons nous remettre immédiatement au travail, pour répondre aux attentes exprimées par les populations. Nous devons arrêter les débats stériles et les campagnes électorales permanentes, pour nous tourner résolument vers la prise en compte des préoccupations des populations. Le travail s’accommode mal de la palabre incessante. » Pour une fois, il avait raison et pour une fois, on avait envie de l’applaudir !
Serigne Saliou Guèye
Tu n’as qu’à te taire, c’est ton droit. Mais ne t’arroge pas le droit de décreter la liberté des autres.