De la boisson destinée à des membres du Corps diplomatique était vendue sans restriction dans ce restaurant-bar bien connu des milieux huppés de Dakar. Une descente de la Douane a mis fin à la recréation, et le propriétaire s’est empressé de transiger, pour ne pas voir les chaudes cellules de Rebeuss.
Le propriétaire du restaurant-bar Le Cozy, situé au Plateau, sur l’avenue Ramez Bourgi, a été épinglé par la Douane, pour violation de la législation sur l’importation et la distribution de boisson alcoolisée. Il disposait d’une licence lui permettant de vendre des liqueurs à des diplomates en hors-taxe. Or, les gabelous ont découvert, après une longue enquête, que M. Darwiche écoulait sur place dans son restaurant-bar, et au tout-venant, une bonne partie de sa marchandise.
Interpellé et mis devant l’évidence, le tenancier a été obligé de transiger. Il a accepté de payer à la Douane un peu moins de 200 millions de francs Cfa. C’était la condition pour lui d’échapper à la prison, et pour ne pas voir son commerce fermé, parce que le délit y a été consommé.
Néanmoins, il n’est pas sûr que le sieur Darwiche ait pour autant vu la fin de ses ennuis, malgré cet accord avec l’Administration des Douanes. Au contraire, il y a de très fortes chances que le fisc entre dans la danse et lui colle au train dans les jours à venir.
Un haut fonctionnaire de la Dgid souligne en effet que, du moment que la fraude douanière a été établie, il y a certainement eu une perte fiscale importante, et un manque à gagner pour les recettes de l’Etat. Il est donc de leur devoir de voir dans quelle mesure ce préjudice peut être corrigé. Et donc, dans les jours à venir, des inspecteurs des finances seront certainement appelés à passer au peigne fin les comptes du restaurant-bar. Aux effluves d’alcool et de cigarettes, vont se mêler, les jours à venir au Cozy, des odeurs de redressement fiscal.
Cette affaire pose par ailleurs, et de manière plus large, la question des exonérations fiscales accordées de manière généreuse à plusieurs entités dans notre pays. Une fois, un fonctionnaire des Impôts se scandalisait d’ailleurs de voir des boutiques «free shop» implantées en plein centre de Dakar, au-delà de toute logique. «Nous aurions compris que ces magasins se situent à l’aéroport ou au Port, parce que ce sont des portes d’entrée du pays. Mais qu’est-ce qui justifie que ces échoppes soient situées aussi loin de tout contrôle douanier ? C’est la porte ouverte à toute sorte de trafics». L’inspecteur indiquait qu’il n’était pas exclu que des personnes ne bénéficiant pas de ces exonérations fassent appel à des amis diplomates, pour que ces derniers les approvisionnent en produits divers en hors-taxe, et qui seront consommés impunément sur le territoire national.
Cela le poussait par ailleurs à se demander si les diplomates sénégalais trouvaient des avantages similaires dans des pays où ils étaient accrédités. Car pour lui, ce genre de «manque à gagner pour l’économie nationale ne pourrait se justifier que dans un cadre de stricte réciprocité, ce qui ne semble pas être le cas en l’espèce».
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