Le travail domestique, surtout en ces temps de vacance scolaire, est la trouvaille de nombreuses filles issues de familles démunies au Sénégal. La recherche de profit noie souvent les difficiles conditions de vie et les risques auxquelles ces filles, notamment les mineures, sont exposées. Reportage.
20h passées de quelques minutes à Grand-Dakar. Malgré les appels des muezzins à la dernière prière (nocturne) du soir, en cette période de Ramadan, le populeux quartier connu pour son vacarme, reste animé. A Kognu Ndiaago, un quartier non loin du «marché mardi» (marché hebdomadaire), dans la cohue d’enfants et d’adultes se disputant les allées avec les voitures, un groupe de femmes attirent l’attention.
Matelas à terre, bagages ne pouvant être rangés, dans les restes d’un vieux taxi transformé en armoire, éparpillés à même le sol. Des enfants laissés à la merci des animaux en divagation. A quelques encablures, la place dénommée «Robinet» se dévoile. Devenue le point de convergence de femmes qui tirent leurs revenus des corvées domestiques, elle constitue un passage obligé, à Grand-Dakar, pour les «nantis» qui cherchent quelqu’un qui pourrait alléger leurs peines pardon, à qui confier les taches domestiques. «J’ai fait 15 ans dans ce quartier et maintenant tout le monde sait la où me trouver», lance une dame, la quarantaine révolue, une des maitresses des lieux, nous dit-on.
En dehors des adultes, des jeunes filles mineures, ont aussi ce destin de vivre dans la rue après la journée de travail. Trouvée en plein sommeil sur un matelas caustique qu’elle partage avec son bébé, sa mère et deux autres filles, D. N. 16 ans, laisse entendre: «j’ai quitté Gossas le samedi dernier, je suis à la quête d’un travail».
Celles qui travaillent nourrissent les autres
Mariée à un homme dont les faibles revenues ne permettent pas de prendre en charge ses besoins et celui de son bébé de 4 mois, elle s’est résolue à «faire des travaux domestiques afin que je puisse avoir un peu d’argent avant la Tabaski». Le travail rêvé, tarde encore. «Je cherche, mais avec mon bébé les patronnes me disent qu’elles ne veulent pas d’une fille mère». En attendant, la petite D. passe ses nuits à la belle étoile dans cette ruelle de Grand-Dakar. Le travail dès le bas âge, c’est aussi l’affaire de M. F., domestique au quartier Baobab.
Lassée du fait d’une journée passée entre nettoyage des carreaux et garderie d’enfants, la fille de 13 ans se prélasse au milieu des siens. Interrogée sur les motifs qui l’ont poussé à travailler, une parente prend la défense et rétorque: «elle est soutien de famille, son père est (une personne) handicapé et sa maman ne tire ses revenus que de l’agriculture. Et, vous devinez aisément qu’en cette période de l’année, les stocks de vivres sont épuisés. Si elle ne travaille pas, sa famille n’aura pas de quoi manger».
En ces lieux, bondés de monde, assurer les repas quotidiens est source de problème. «Ceux qui ont un travail, en rentrant, amènent de quoi manger. Sinon, on se cotise, 250 F Cfa par personne ou bien souvent des gens nous donnent des repas», laisse entendre l’une d’elles.
Soutenir sa famille, la seule… justification
Autre quartier, même constat. Ouest foire, entré dans la cartographie de la capitale au début des années 2000, est également un point de chute pour ces filles, hantées par le travail à Dakar. Non loin de l’hôpital, Philippe Maguiléne Senghor, l’éclat dans les maisons closes, contraste fortement d’avec la lueur des bougies qui éclaire à peine une chambre, de l’odeur fétide, dans une maison en construction, lieu de retrouvaille de femmes ménagères après la journée de durs labeurs. Des pagnes noués les uns contre les autres servent de porte et en même temps de barrière sécuritaire.
Dieynaba a 13 ans. Après l’année scolaire elle se retrouve dans la capitale à la recherche de son gagne pain. «Je faisais le cm2 et vu que nous sommes en vacances, je suis venue travailler pour préparer la rentrée», affirme-t-elle sous le regard médusé de ses amies sans doute perturbées par la visite nocturne d’une inconnue.
La vie «de luxe» à la capitale, n’est pas similaire aux temps durs des contrées de l’intérieur. «Si on reste au village, nos amis qui sont à Dakar, parviennent à soutenir leurs familles alors que nous on n’a même pas de quoi acheter des habits», fait remarquer une fille, d’une quinzaine d’année.
Mineures domestiques: abus et attouchements sexuels en suspens
L’on ne peut parler de femmes de ménages sans faire un tour au rond-point Liberté VI. Ce point connu dans le répertoire des femmes désireuses de trouver une employée de maison accueille aussi ces filles immatures à la quête d’un … emploi. «Elles étaient là ce matin, mais je les ai renvoyé», indique mère Michelle, la gardienne des lieux. Et la cause, selon elle, c’est que «j’ai arrêté de donner des filles mineures comme femmes de ménages, car dans certaines maisons, les enfants des patronnes profitent des moments de solitude pour abuser d’elles», renchérit-elle. Et de dénoncer: «elles sont victimes d’attouchements sexuels de la part de leurs employeurs».
Le calvaire de ces filles ne se limite pas à ces faits, si l’on en croit, celle qui se réjouit d’être «yaayu khaleyi» (la mère des enfants), car s’insurge-t-elle, les filles sont exploitées au travail. «Sachant qu’elles ne peuvent pas se défendre, souvent les filles travaillent comme des forcenées avec un salaire dérisoire».
Eviter tout contact avec, les filles n’ayant pas l’âge recommandé pour travailler c’est également l’option prise par l’Association des employeurs de maison «Yeewu Yeeté». «Le Bureau international du travail (BIT) nous a interdit de prendre en charge les filles mineures. C’est pourquoi la tranche d’âge à laquelle je m’intéresse commence au-delà de 18 ans», fait remarquer, la gérante des lieux.
VACANCES SCOLAIRES A DAKAR – LA PERIODE DE «VACHES MAIGRES» POUR LES PLACEUSES DE MENAGERES
Les agences intermédiaires entre les femmes à la recherche de travails, en tant que domestique de maison, et les patronnes se tournent les pouces en cette période de début de vacances scolaires, même si une forte affluence des jeunes filles est remarquée. Pour cause, la majeure partie des patrons observent une pause dans la prise en charge de ces dernières, ou vont en vacance, diminuant de manière drastique le rythme de placement par jour.
La période des vacances scolaires est un moment où la demande en emploi de femmes de ménage augmente de manière sensible à Dakar. Une bonne partie des jeunes filles des villes intérieures, rallie la capitale pour se trouver une occupation pendant cette période. Pour autant, le rythme de placement de ces dernières ne suit pas la forte demande enregistrée en cette période hivernale. Les gérantes d’agences rencontrées parlent toutes de ralenti dans leur business en cet intervalle.
Au niveau du Stade Demba Diop, se trouve l’Association des Employés de Maison (Adem), gérée par Daba Ndour dite Mme Diop. La dame qui indique que la structure a vu le jour depuis 2002, se glorifie d’avoir réussi à placer plus de 20 milles employées de maison depuis la création de l’Adem. A l’en croire, toutes ces femmes placées sont âgées entre 18 et 50 ans, et qu’elles viennent de tous les coins et recoins du Sénégal. En cette période de début de vacance, Daba Ndour admet la forte affluence de femmes demandeuses d’emploi.
Toutefois, elle se plaint de la rareté de la demande en service qui est nettement inférieure à l’offre. «Il m’est difficile de placer plus de 4 filles en cette période, tandis qu’en temps normale, surtout au mois d’octobre, je peux placer 30 à 40 en une seule journée», se désole-t-elle. Cependant, elle se réjouit de n’avoir jamais rencontré de problèmes avec ses clients grâce, dit-t-elle, «à la fiche d’engagement tripartite signée avant que la domestique ne rejoigne le domicile de son nouveau patron». A l’en croire, tout un travail de suivi est fait pour vérifier si tout a été respecté par le patron et la bonne.
Même son de cloche du coté de Liberté 6, au niveau du rond point du même nom, tout près de la station d’essence. La baronne des lieux, répondant au nom de Michelle ‘’Yaye Xaléyi’’ se plaint de cette période de vacance, alors que les demandeurs d’emplois foisonnent chez-elle. A l’en croire, «ces temps ci, avec la fermeture des classes, il n’y a vraiment pas d’affluence de la part des patrons. Je ne parviens même plus à placer 3 à 4 filles dans la journée. Des fois même je ne place rien toute une journée».
Si son collègue du Stade Demba Diop prétend ne jamais connaitre de problèmes, Michelle ‘’Yaye Xaléyi’’ quant à elle reconnait avoir enregistré des cas de vol, de viol, et même d’attouchement sexuels. Selon elle, ces accusations, qu’elles proviennent des employeurs, ou des employés, font l’objet d’une vérification. Des cas fréquents, selon elle, qui atterrissent dès fois à la police.
Pour rappel, le travail des agences de recrutement de femmes ménagères consiste à recenser les demandes des femmes, selon le genre de service qu’elles veulent, moyennant 2000 F Cfa par demande. Les employeurs se présentent avec 6000 F Cfa avant de disposer d’une domestique qui leur sera désignée par l’agence, à la suite de la signature d’une fiche d’engagement.
PROPRETE, CONFIANCE, PIECES D’IDENTITE… CES PREALABLES POUR LE RECRUTEMENT DE FEMMES DE MENAGE
La propreté, la confiance, la présentation des pièces d’identité. Voilà entre autres paramètres que les membres de familles, notamment les femmes exigent avant tout recrutement de femmes de ménages.
Il est 15 heures passé de quelques minutes. Le soleil darde ses rayons sur un bruyant marché de Grand-Dakar, rue 10. Cette rue arpentée par les véhicules de transports en commun «supers» qui se dispute le peu de clients trouvés sur place en partance pour Niarry Tally, Ben Tally ou les HLM. Seuls les klaxons et grondements de véhicules perturbent la quiétude des lieux. Le marché Grand-Dakar est loin de connaitre son ambiance de préparatifs des fêtes de Korité et de Tabaski. Quelques femmes s’activent autour des tables pour les besoins de la rupture du jeûne.
Trouvée sur place assise derrière une table qui fait office de commerce, Diarra Wone guette le moindre pas des clients à qui elle propose des mangues et autres dattes bien rangées (sur la table). Vêtue d’un boubou marron assorti d’un voile de la même couleur, elle estime que «la femme de ménage doit être considérée comme un membre de la femme et non une esclave. Il ne faut pas les marginaliser. Elles travaillent à la sueur de leur front».
Malgré ces considérations relevées sur le traitement que toute personne doit réserver à ces femmes de ménages, Diarra pose aussi un certain nombre de critères pour recruter la «bonne». Pour elle, «il faut qu’elle soit propre et doit être digne de confiance. Je prends mes précautions en cas de problèmes, en lui exigeant d’amener sa mère et sa pièce d’identité. Je fais tout pour connaitre son lieu d’habitation». Avant de poursuivre: «elle mérite aussi notre attention sur la gestion quotidienne des tâches ménagères».
Oumou Kalsoum Ndiaye, la trentaine bien sonnée, embouche la même trompette. Elle considère que la propreté et l’accomplissement des tâches ménagères qui lui sont confiées sont une condition sine qua none pour engager une femme de ménage. Ses critères exposés, Oumou dit ne plus jamais recruter une femme de ménage. Car, raconte-t-elle, «j’ai eu une mauvaise expérience: ma bonne a volé les habits de mon enfant et mes draps. Il n’y a que des tricheuses maintenant alors qu’elles perçoivent entre 40 000 et 50 000FCfa. Généralement la majeure partie, ce sont des voleuses».
Sortie d’une agence de transfert d’argent, Mme Diop a révélé ne plus engager de femmes de ménage par hasard. Elle a fait savoir que ce sont «ses voisins, proches et autres amis qui lui proposent des personnes qu’ils connaissent pour ce travail», non sans avoir mentionné que la «femme de ménage doit être disciplinée et ne s’occuper que de choses qui la regardent».
La crainte des hommes
Pourtant, certains hommes préfèrent ne pas s’immiscer dans le recrutement des femmes de ménages, pour ne pas créer des problèmes au sein de leur ménage (avec leurs épouses). Rencontré devant sa maison qui lui sert d’atelier, Badou, menuisier de profession, essaie de couper une planche pour les besoins d’un lit. Interpellé sur la question, il ne cherche pas loin pour répondre: «c’est ma femme qui cherche et engage généralement les bonnes pour l’aider dans certains travaux».
A la question de savoir pourquoi il n’intervient pas dans ces affaires, Badou répond que c’est par prudence. «Ce n’est pas sûr d’autant que tout est possible entre un homme et une bonne, surtout quand son épouse part en voyage». Il a laissé entendre que «recruter une femme de ménages est synonyme de créer des suspicions chez son épouse. Alors, autant ne pas en chercher et laisser le soin aux femmes de le faire».
SITUATION PRECAIRE DES FEMMES DE MENAGES, LES DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME APPRECIENT
Employées dans des conditions précaires, les femmes de ménages baignent dans un climat où le respect de leurs droits (humains) n’est pas toujours garanti. Une situation à laquelle les droits de «l’hommiste» ne sont pas insensibles. Si certains invitent l’Etat à adopter la Convention sur les domestiques déjà votée au niveau international, d’autres plaident pour l’institution d’un revenu minimum qui doit être réglementé par la loi. Tout en demandant à l’Etat de lutter contre les courtiers qui aident les femmes ménagères à être employées comme domestiques moyennant rétribution, ces organisations ambitionnent de faire en sorte que les sénégalais aient un autre regard sur les femmes de ménage. Aussi ont-elles tenu les parents eux-mêmes pour responsable en partie en violant de manière délibérée les droits de leurs enfants en leur faisant travailler comme domestiques dés le bas âge
Aboubacry Mbodji, secrétaire général de la Raddho – «Pour une réglementation du revenu minimum perçu par les femmes ménagères»
«Les groupes ménagères vulnérables sont des personnes qui méritent une situation particulière. Nous nous battons pour des mesures protégeant les revenus qu’elles gagnent. Le revenu minimum doit être réglementé par la loi. La Raddho (Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme) s’évertue à travailler pour une protection de ces groupes, pour qu’ils puissent jouir de leurs droits politiques, civils, civiques mais également leurs droits économiques. Ces groupes méritent une attention singulière dont la responsabilité incombe d’abord à l’Etat. En effet, les pouvoirs publics ont le devoir de protéger ces groupes vulnérables par l’adoption de loi, de mesures concrètes. A notre niveau, nous allons sensibiliser les populations pour le respect des droits et de la dignité des personnes concernées».
El hadj Abdoulaye Seck, chargé de campagne à Amnesty international – «L’Etat doit lutter contre les courtiers qui aident les domestiques… moyennant rétribution»
«C’est un sujet préoccupant qui nous intéresse en ce sens que la Convention sur les domestiques a été adoptée au niveau international. Le phénomène qu’on note, c’est que de plus en plus, les jeunes quittent l’école pour venir à Dakar. Même si au début, le travail était saisonnier avec des jeunes filles qui venaient travailler durant les vacances avant de repartir après la saison des pluies, mais, de plus en plus, elles restent à Dakar en y exerçant des fonctions permanentes. Ce qui fait qu’à chaque fois, on entend des récriminations relativement aux accusations de vols, mauvais traitements…
On est en train de réfléchir au niveau de notre Commission femme sur les modalités par lesquelles Amnesty pourrait supporter ce plaidoyer pour faire en sorte que ce texte qui existe au niveau international soit adopté au niveau national. Parce que ce texte touche plusieurs domaines à savoir l’éducation, le bien-être des femmes. En tous cas, notre première approche est de faire en sorte que ce texte soit vulgarisé pour voir le degré d’engagement de l’Etat du Sénégal et également de participer à une promotion des droits des personnes vulnérables. Nous demandons à l’Etat de lutter contre les courtiers qui aident les femmes ménagères à être employées comme domestiques moyennant rétribution. Notre ambition est de faire en sorte que les sénégalais aient un autre regard sur les femmes de ménage».
Fatou Senghor, Directrice de l’ONG Article 19 – «L’Etat doit assurer la protection effective…»
«La précarité est notée dans la situation de cette catégorie de personnes vulnérables où l’Etat doit prendre des mesures en faisant en sorte qu’il y ait une protection effective. L’Etat a une obligation de renforcer la protection pour éviter la vulnérabilité. Si on a détecté des cas, c’est qu’il y a manquement. De ce point de vue, il faut que l’Etat, les parents et les partenaires prennent leurs responsabilités. Cependant, il ne faudrait pas rejeter l’entière responsabilité à l’Etat. Les parents eux-mêmes violent de manière délibérée les droits de leurs enfants en leur faisant travailler comme domestiques dés le bas âge».
EN FRANCE LA FEMME DE MENAGE A PLUSIEURS PROFILS
Les femmes de ménage sont plus d’un million aujourd’hui en France. De la femme qui cumule les employeurs, à celle qui travaille à domicile sans contrat, en passant par les sociétés de services, toutes ne sont pas logées à la même enseigne.
Le particulier qui fait le choix d’embaucher une femme de ménage devient, aux yeux du droit, particulier employeur. À ce titre, il doit accomplir de nombreuses formalités découlant de l’embauche et du fait qu’il devient employeur. Chaque mois, il doit verser un salaire à sa femme de ménage et lui rédiger et donner un bulletin de paie. Au-delà de cela, il doit observer un certain nombre de règles. Certaines découlent du Code du travail français telles celles concernant le paiement de congés (payés), la médecine du travail, le licenciement. D’autres découlent de la convention collective applicable (celle des salariés du particulier employeur) comme le paiement d’un salaire minimum.
Le montant du salaire de la femme de ménage résulte de négociations se déroulant entre elle et son futur employeur au moment du recrutement. Le SMIC (Salaire minimum interprofessionnel de croissance) est le minimum prévu par la convention collective. Il s’élève à 1128,70€ (740 600 FCFA) sur une base de 35h de travail par semaine. En France, une femme de ménage peut varier quasiment du simple au double, allant du SMIC horaire (9,53 € soit 6250 FCFA) jusqu’à 16 € (10 500 FCFA). Plus d’un tiers (1/3) des femmes de ménage travaillerait «au noir». On estime qu’elles sont environ 45.000, à travailler dans les beaux quartiers de Paris et dans huit cas sur dix (8/10), elles sont sans papiers. Une femme payée 2000€ (1 300 000 FCFA) par mois de la main à la main, avec un petit studio «de fonction» peut se faire virer du jour au lendemain sur un coup de tête de son employeur. Elle est d’ailleurs aussitôt remplacée par une autre femme au statut identique.
SEDHIOU : EXODE DES JEUNES FILLES VERS LES GRANDS CENTRES URBAINS – VOYAGES RETOURS DANS LA DOULEUR: GROSSESSES, ABANDON SCOLAIRE, PERVERSION…
Chaque année, ce sont des dizaines de jeunes filles, essentiellement des élèves, qui se rendent dans les grands centres urbains, à Dakar principalement, pour y passer, officiellement, les vacances. Mais une fois sur place et pour la plupart d’entre elles, elles se font employer dans les domiciles pour y exercer des travaux domestiques moyennant un pécule mensuel. La tentation étant très forte face aux délices de la belle vie, ces filles deviennent une proie facile, certaines tombent enceinte et la perversion à l’origine souvent des abandons scolaires.
C’est sans doute une tradition vieille de plusieurs décennies, les jeunes filles se précipitent vers les grandes villes au motif d’une «jachère intellectuelle» pour revenir des congés scolaires la mémoire fraiche avec un réarmement moral assez solide. En cette période-ci de fin des compositions et autres examens scolaires, le constat s’offre à tout passant au niveau des gares routières où les bus de transport en commun de voyageurs (en partance par exemple pour la capitale) font le plein presque tous les jours.
Si vraiment certains vont en congés scolaires pour «changer d’air», après avoir de bons résultats (scolaires) elles sont en revanche nombreuses celles qui mettent à profit ce séjour pour se faire une petite économie pour non seulement soutenir la famille restée au village mais aussi réaliser une modique épargne en vue de l’achat des articles scolaires et de vêtements pour la prochaine rentrée des classes. Seulement voilà, le risque est potentiellement grand pour une jeune fille aux féminités attrayantes, naïve et soumise dans un environnement de moralité en décadence chez des jeunes garçons, des adultes «Say say» (coureur de jupons) et qui ne convainquent que par le langage des billets de banque.
N’dèye B. une élève en classe de 1ere déclare avec regret avoir été victime d’un abus sexuel assorti d’une grossesse, œuvre d’un adulte pourtant époux de deux femmes. Cette vacancière ne précise pas pour autant les conditions de cette aventure alors qu’elle travaille, dit-elle, pour cet homme. Une autre plus jeune nous a tout simplement attesté avoir abandonné les études en classe de 4e au collège suite à une grossesse emportée de ses vacances de Thiès alors qu’elle officiait comme employée de maison.
Mme Diatta Yadicone Sané, la responsable du bureau genre de l’Inspection d’académie (IA) de Sédhiou souligne que, «outre les cas de grossesse chez les jeunes filles employées de maison, elles adoptent des comportements aux antipodes des valeurs de moral et de pudeur appris au village. Elles veulent vivre au-dessus de leurs moyens, de ceux de leurs parents. C’est vraiment à l’origine de déperdition de valeurs et des abandons scolaires».
Quant à Youssouph Mané, le coordonnateur de l’Inspection médicale des écoles (IME) il a fait savoir que «des cas d’élèves engrossées de retour des vacances sont nombreux. Et, c’est à ce niveau que nous interpellons les parents à veiller davantage à l’éducation de leurs filles, à ne pas les envoyer à bon débarrât pour exercer à titre de femme de ménage. En ce qui nous concerne, nous en avons fait une campagne de sensibilisation dans les écoles mais, hélas, et comme vous le savez, pendant les vacances seuls les parents peuvent veiller sur leurs enfants».
Et de poursuivre que «dès l’ouverture prochaine des classes, nous allons ouvrir un registre dans lequel nous allons répertorier l’ensemble des cas de filles tombées en état de grossesse et produire des outils d’indicateurs fiables pour apprécier efficacement la question». Il convient de rappeler que ce ne sont pas que des filles élèves qui en sont victimes. D’autres, plus nombreuses, sont chassées de chez-elles par la pauvreté et migrent vers les grands centres urbains pour subvenir aux besoins de la famille. Parmi elles des femmes mariées dont l’époux est consentant ou à son insu quand il ne fait plus signe de vie à l’étranger.
KAOLACK/ DOMESTIQUES OU SERVANTES DANS LE CONCESSIONS EN VILLES – JEUNES FILLES ET ADOLESCENTES S’EXPOSENT A LA PRESSION
Bien qu’étant passé de 17% au courant des années 70, à 5% en 2000, le phénomène de l’exode des jeunes filles et adolescentes rurales vers les villes hante de plus en plus le sommeil des organisations investies dans la défense des droits humains, et la lutte contre le travail de cette catégorie d’enfants en particulier. Les multiples efforts fournis ça et là dans le but de freiner cette «pire forme de travail d’enfants» apparemment n’ont pas conduit à grand-chose dans la plupart de ces lieux de prédilection. Les raisons de cette insuffisance de résultats sont souvent liées aux intérêts socio-économiques, le niveau de pauvreté constaté au niveau de ces mêmes points de départ, et le moment choisi par les candidates pour migrer vers les villes etc.
Même si, entre les régions de Kaolack et Fatick, les motivations qui poussent la jeune fille à aller exercer le métier de bonne, diffèrent, il est toutefois constaté que depuis plusieurs décennies, des jeunes villageoises de ces deux régions ne se sont jamais abstenues de poursuivre leur ruée vers les cités urbaines où elles exercent les petits métiers de domestiques, de pilleuses, de lingères ou servantes dans les concessions. D’habitude, ces jeunes filles voyagent par classes d’âge et par groupes, ou font aussi le déplacement individuellement, surtout quand elles sont persuadées d’être accueillies en ville par un proche parent qui les aidera à trouver un logement. Généralement, ce sont aussi des filles issues de familles pauvres, dont la majeure partie ne se suffit que des petites rentrées tirées de la récolte annuelle pour survivre.
Dans la région de Fatick, elles viennent le plus souvent des îles, de certaines cités urbaines ou des villages de l’intérieur dont la particularité est de ne pas générer des emplois en période de contre saison. Ainsi les militantes à cette forme d’exode rurale sont aujourd’hui classées en deux (2) catégories: les filles qui ont choisi le métier de domestique comme profession qu’il faut jalousement sauvegarder et celles qui profitent d’habitude des trois (3) mois de vacances pour conquérir en ville les fonds devant couvrir les charges pour la prochaine rentrée scolaire.
Le calvaire, la ville et ses méfaits
En campagne, il fait toujours bon-vivre. Tant au point de vue climat, sécurité et espace, contrairement en ville où les plus démunis de la population sont souvent obligés de s’entasser dans des chambres étroites pour trouver sommeil. C’est du reste l’exemple avec les domestiques ayant quitté leurs villages pour venir goûter aux réalités de la ville. Ces jeunes filles qui n’ont aucune possibilité de vivre dans les milieux résidentiels chics, logent naturellement dans les quartiers misérables de la ville. N’étant pas en mesure d’honorer leurs loyers, elles sont souvent obligées de se cotiser, par groupe de cinq (5) ou par dizaine, pour s’acquitter mensuellement du coût de la location. Mais quoi qu’on puisse dire, ces filles sont aussi exposées à la perversion.
Car sans un seul parent proche qui peut rôder à leurs côtés dans leur milieu d’accueil, ces filles n’hésitent jamais à recevoir chez-elles ou à passer la nuit chez un copain. Les moins expérimentées rentrent souvent porteuses d’un enfant ou bien en état de grossesse sans pour autant connaître l’auteur. Des fois, c’est tout à fait le contraire qui se produit, car les auteurs de leurs grossesses, refusent de reconnaître la paternité de l’enfant. Mais aussi une frange de la population vivant dans un parfait état d’insécurité. D’abord dans leurs quartiers résidentiels, des lieux notoires de cache du grand banditisme, également de criminalité et d’autres formes d’agression. De part leurs métiers ces jeunes filles sont aussi des professionnels qui partent tôt au travail pour en revenir tard. S’y ajoutent aussi que ce sont des travailleuses qui n’ont aucune idée de l’identité de leurs patrons (patronnes), leurs professions ou autres passions.
CONTRE LE METIER DE DOMESTIQUE – PRES DE 3000 FILLES RECUPEREES
Bientôt une dizaine d’année, la lutte contre l’exploitation abusive et les pires formes de travail des enfants est portée par un certain nombre d’organisations internationales, partenaires du Sénégal. A Kaolack par exemple, l’organisation «Enda Jeunesse Actions» fait partie de ces genres de coopérants investis dans un large programme multisectoriel de défense et de protection des droits de l’enfant. Un programme qui couvre en même temps un volet spécial d’absorption des filles qui n’ont aucune attache sociale et finissant par épouser le métier de domestique. En effet dans son mobile, l’organisation a réussi à récupérer un effectif de prés de 3000 filles dans les régions de Kaolack et Fatick.
En prélude à cette grande opération, l’organisation «Enda Jeunesse Actions» a d’abord déroulé sur l’ensemble des régions cibles, un canevas de séminaires qui ont abouti à la formation de toutes ces jeunes filles en teinture, broderie, couture, électricité, mécanique etc. Et pour résultat, ces filles ont senti que professionnellement, elles sont devenues plus libres aujourd’hui et se sont tout aussi rendu compte qu’avec l’exploitation de ces différents corps de métiers, elles gagnent deux, voire trois fois plus que ce qu’elles tiraient de leurs anciens métiers de domestique. Et puisqu’il convient aussi de couper l’arbre au niveau des racines, ce programme a été d’abord débuté par l’inscription massive des filles, leur maintien le plus longtemps possible à l’école, mais surtout par la mise en place de l’ensemble des facteurs garantissant le recouvrement de tous leurs besoins.
Si les pays riches n’étaient pas organisés pour que de telles situations ne soient pas généralisées, leurs populations vivraient les mêmers situations que vivent des millions de personnes défavorisées au Sénégal ! Il fallait depuis notre indépendance, instituer une autre forme de solidarité obligatoire par l’impôt et non cette charité que nous donnons au coin d’une rue pour plaire à Dieu croit-on alors que la justice est plus valorisante que la charité ! Combien de contribuables, personnes physiques comme morales(Entreprises et commerces) échappent à la totalité de ce qu’ils devraient payer normalement ? Ces pauvres de la Campagne devraient au moins bénéficier par la solidarité Nationale, de quoi vivre toute l’année par leur travail dans les champs et par l’aide de l’Etat, c’est à dire de nous tous, quels que soient nos revenus !
Moi je me dis que quand on tres tres pauvre, il faut eviter de faire des enfants a tout bout de champ.