Le président François Hollande a accusé le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, de ne pas avoir été « correct » lors de sa visite en France, transformant en « meeting électoral » la cérémonie d’hommage aux victimes juives de la tuerie de Toulouse.
« Nétanyahou était venu faire campagne en France, on le savait. Son déplacement était prévu en deux temps à Toulouse, recueillement, puis discours », a déclaré le président français, selon des propos rapportés par l’hebdomadaire satirique Le Canard enchainé, et confirmés par l’AFP. « Comme j’étais là, il a un peu resserré son discours, mais ce n’était pas bien de transformer cette cérémonie en meeting électoral », a ajouté François Hollande devant plusieurs médias, dont l’AFP, dans l’avion qui l’emmenait au Liban, dimanche. Le premier ministre israélien « n’a pas été correct », a insisté le chef de l’Etat français. La conversation était censée être « off the record », selon un usage tacite qui permet notamment aux hommes politiques de parler plus librement aux journalistes sans que leurs propos soient publiés.
Benyamin Nétanyahou était en visite en France les 31 octobre et 1er novembre, alors qu’il est en campagne électorale pour les législatives du 22 janvier, le Parlement israélien ayant été dissous le 15 octobre. Le deuxième jour de la visite officielle était consacré à un déplacement à Toulouse pour une cérémonie d’hommage aux trois enfants et à l’enseignant juifs tués le 19 mars par l’islamiste radical Mohamed Merah.
DES RELATIONS CHALEUREUSES ?
Pendant la cérémonie au collège-lycée juif Ohr Torah (ex-Ozar Hatorah), M. Nétanyahou avait rappelé que désormais les juifs ont un Etat, une armée et « les moyens de se défendre », ce qui lui avait valu une ovation. « Le peuple d’Israël vivra », avait scandé le dirigeant de l’Etat hébreu, slogan repris en chantant par la salle.
La veille, au cours d’une conférence de presse commune à l’Elysée, le président français avait contredit le premier ministre israélien sur la question des juifs de France. « En ma qualité de premier ministre d’Israël, je le dis toujours aux juifs, où qu’ils soient : venez en Israël et faites d’Israël votre chez vous », avait déclaré M. Nétanyahou. « Benyamin Nétanyahou dit ‘Bienvenue aux juifs de France’, s’ils veulent s’installer en Israël, je le comprends », avait commencé François Hollande. « Mais la place des juifs de France, s’ils en décident, c’est d’être en France, de travailler en France, de vivre en France, à condition qu’ils soient pleinement en sécurité », avait ensuite souligné le président.
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Malgré cette divergence, les observateurs et les commentateurs avaient évoqué la chaleur, en tout cas en apparence, des relations entre les deux hommes. Le premier ministre israélien avait en effet salué la « détermination » de son « ami » François Hollande dans sa lutte contre l’antisémitisme. Et les deux responsables avaient affiché leur accord sur l’Iran et la reprise sans condition du processus de paix au Proche Orient.
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En 2011, Sarkozy avait traité Nétanyahou de « menteur
Ce n’est pas la première fois que Benyamin Nétanyahou suscite les critiques d’un chef d’Etat. En novembre 2011, le président français Nicolas Sarkozy l’avait traité de « menteur » lors d’une conversation privée avec le président américain Barack Obama lors du sommet du G20 à Cannes. « Tu en as marre de lui, mais moi, je dois traiter avec lui tous les jours ! », avait rétorqué son homologue américain. L’échange était parvenu aux journalistes portant des casques de traduction qui leur avaient été remis un peu avant la conférence de presse des deux hommes.
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