Des élèves de Première d’un lycée de la Somme n’ont pas voulu lire un ouvrage du romancier Akli Tadjer». Il doit bientôt les rencontrer.
« Des gens m’ont dit que j’ai fait ça pour vendre des bouquins. Si ça avait été mon intention, vous croyez vraiment que j’aurais parlé d’un livre sorti en 2002 ? » Depuis le 27 septembre, l’un des premiers ouvrages d’Akli Tadjer, « le Porteur de cartable » connaît une deuxième vie. Mais pas de celle qui flatte l’ego d’un auteur. Ce jour-là, l’écrivain franco-algérien publie sur son compte Facebook l’extrait d’un échange par mail avec une enseignante d’un lycée de la Somme qui lui demande de venir échanger avec des élèves de Première.
Anonymisée, l’enseignante explique avoir affronté une « levée de boucliers » des jeunes à qui le livre a été soumis. Motifs : « L’auteur n’est pas français », « l’histoire ne concerne pas la France » et « il y a du vocabulaire en arabe ». « Un élève a refusé de lire pour ne pas prononcer le mot Messaoud. J’ai dû l’exclure », poursuit-elle, gênée par ces « réflexions vraiment racistes ».
Au centre du débat, un livre qui évoque la guerre d’Algérie et la rencontre en 1962 de deux enfants, l’un soutien du FLN, l’autre pied-noir de retour en métropole. « Merci Zemmour. Pauvres profs de l’Éducation nationale », s’agace Akli Tadjer. Quelques jours après l’échange tendu entre le polémiste et Hapsatou Sy autour des prénoms d’origine étrangère sur le plateau de C8, sa publication sur le réseau social est largement commentée par ses soutiens ou par des internautes qui le taxent d’opportuniste.
«Ils sont venus mourir dans ces champs de betteraves»
Selon nos informations, les élèves sont scolarisés au lycée Pierre Mendès-France de Péronne. Un dossier maintenant suivi de près par le rectorat d’Amiens. « Ces propos maladroits et regrettables montrent que l’échange entre l’auteur et les élèves a encore plus de raisons de se faire », estime le directeur académique de la Somme, Jean Hubac.
Prévue dans une librairie de la Somme, la rencontre se fera finalement dans les murs de l’établissement. Ce lundi, le proviseur du lycée Pierre Mendès-France a appelé l’écrivain pour préparer sa venue. Pour l’instant, la date du 16 novembre a été retenue.
« On verra s’ils osent me lancer des insultes racistes, poursuit Akli Tadjer. On m’a conseillé de parler du rôle de l’immigration pour l’équipe de France de football, mais ça ne m’intéresse pas. À Péronne, ville marquée par la première Guerre mondiale, j’ai envie de leur rappeler à quel point leur terre est gorgée du sang de Mohamed et de Messaoud. Ils sont venus mourir dans ces champs de betteraves, et on ne veut même plus prononcer leur prénom aujourd’hui. Je trouve ça très grave. »