Parce que les transferts de compétences s’accompagnent toujours de transfert de moyens, le maire de Dakar trouve la décision du pouvoir de retirer aux maires certaines de leurs compétences à elles dévolues par la loi, ‘injuste et incohérente’. Khalifa Sall que nous avons approché lors de la marche de Bennoo explique le pourquoi.
Wal Fadjri : Comment appréciez-vous la décision du pouvoir de dessaisir les collectivités locales de certains de leurs compétences notamment le retrait du bénéfice de la taxe sur l’électricité ?
Khalifa SALL : Il faut dire que depuis lors, il y a eu plusieurs concertations et aujourd’hui, après l’arbitrage du Premier ministre, le ministre de la Décentralisation va convoquer à nouveau les maires pour discuter de la question. Parce que d’après ce qu’elles (les autorités) ont dit, il s’agit de régler la prise en charge des factures d’éclairage public. Puisque c’est l’Etat qui, aujourd’hui, prend cela en charge, il a décidé de chercher les moyens. Et les seuls moyens qu’il a trouvés consistent à prendre aux communes d’arrondissement et au maire de ville cette taxe. Seulement, on leur a fait comprendre l’injustice et l’inefficacité de cet acte. Ils sont maintenant d’accords pour trouver avec nous (les maires), une solution viable. Dans tous les cas, nous, nous avons des solutions et attendons de nous retrouver avec eux pour les leur proposer.
En quoi cette décision est-elle injuste et inefficace ?
Elle est injuste et incohérente parce que quand on parle de décentralisation, il s’agit de compétences transférées aux pouvoirs locaux (à la base). Ces transferts de compétences s’accompagnent toujours de transfert de moyens. Vous ne pouvez pas dire aux gens, je vous transfère les compétences mais je vous enlève les moyens dont vous avez besoin pour travailler. Deuxièmement, on a parlé d’incohérence parce que aujourd’hui, tous les Etats du monde vont vers la décentralisation. Au Sénégal, c’est un processus qui date de 1972. Le président Léopold Sédar Senghor l’a initié, le président Abdou Diouf l’a amplifié et nous attendons de ce pouvoir qu’il le consolide. Mais nous constatons des actes qui sont posés et qui constituent de vrais reculs de la politique de décentralisation. C’est cela qui gène.
Cela ne ressemble-t-il pas à un début difficile de cohabitation ?
Nous n’avons pas peur de la cohabitation. Dans tous les cas, cette cohabitation était prévue et elle est normale. Que les gens ne veuillent pas que l’on fasse quelque chose, c’est compréhensif et ça ne gène pas. Mais nous, nous devons faire la preuve que, nantis du mandat des populations, nous allons travailler. Et depuis l’audience avec le président de la République, on est en train un peu de créer les conditions d’une concertation. Parce que nous ne sommes pas hors de l’Etat, nous sommes une partie de l’Etat et le président de la République a dit qu’il allait nous accompagner. J’attends de voir le président pour apprécier.
Vos impressions par rapport à la marche ?
Bennoo Siggil Senegaal est venu dire sa solidarité aux populations éprouvées par les inondations et les délestages. Il est venu dire son indignation face aux injustices impunies. Nous avons tous vu ce qui s’est passé avec l’affaire Abdoulaye Wade ‘Yingou’, et ce qui se passe dans la banlieue. Trop d’actes qui sont sans conséquence. Et c’est tout cela qui constitue la manifestation de l’incurie de ce gouvernement que Bennoo Siggil Senegaal a voulu dénoncer aujourd’hui. Le Ramadan est un moment d’épreuve et avoir fait une marche pendant ce moment est symptomatique de la volonté, la détermination des dirigeants de Bennoo Siggil Senegaal à faire face, au nom des populations à la défense de ses intérêts.
Propos recueillis par Yakhya MASSALY
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