Les conditions de cession du Méridien Président devenu King Fahd Palace restent sujettes à caution et les conditions de reprise depuis janvier dernier sont plutôt difficiles. Mais c’est un comité de direction « pas inquiète du tout » qui se réunit ce mardi 04 juin en assemblée générale d’information, sur fond de perspectives jugées plutôt positives.
Les conditions de cession du Méridien président à la société SHA (Société hôtelière africaine) sont encore sur toutes les lèvres et soulèvent encore beaucoup d’interrogations. Mais en toile de fond, il semble que tout le tollé soulevé actuellement sur la question procèderait plus d’une guerre syndicale dont les principaux acteurs, employés de l’hôtel, sont éclatés entre CNTS, CNTS/FC et SUTSAS. Une guerre syndicale qui, par ailleurs, lèverait le voile sur une volonté de pousser le nouveau gouvernement à « casser » le contrat de cession qui lie l’Etat à la SHA de Mamadou Racine Sy, au profit du précédant gérant, Starwood, une société hôtelière mondiale multimarques, qui n’aurait toujours pas avalé la pilule de la soustraction du Méridien de son portefeuille d’enseignes.
A ce niveau, la question serait de savoir s’il est raisonnable de confier les destinées de plus de 500 personnes (travailleurs) et d’un joyau comme le Méridien, à une structure qui a laissé derrière elle une ardoise estimée à plus de 14 milliards de FCfa. Un lourd passif au demeurant contracté par l’Etat sénégalais version régime libéral et certains fournisseurs. Pour mémoire, l’ancien ministre de tutelle, Thierno Lô, invitant l’Etat à «se discipliner», avait, en décembre dernier, pointé un doigt accusateur sur ses collègues ministres qui, à son avis, « ont aggravé la situation de précarité » dans laquelle s’était plongé l’hôtel Méridien. Il était allé plus loin en avertissant ses collègues ministres qu’ « aucune facture non payée ne serait désormais tolérée » et que « toutes les entreprises qui tiendront une manifestation au King Fahd Palace devront régler leur facture avant de partir.»
C’est donc bien d’une nécessité d’assainir la gestion du Méridien et de sa rentabilité (Ndlr : depuis 1991 l’Etat du Sénégal n’aurait reçu que 3,8 milliards de FCfa provenant des recettes de l’hôtel) qu’il s’agit.
Aussi, si les nouveaux gérants du complexe reconnaissent volontiers les «conditions assez difficiles de reprise», ils confient être « parfaitement » en mesure de redresser la situation.
Remontée de la pente
Situation d’autant plus délicate que le départ de Starwood, qui dispose de quelque 1000 hôtels à travers le monde, avec un siège en Belgique qui couvre l’Afrique francophone, a amputé le King Fahd d’une bonne partie de sa clientèle internationale, la multinationale américaine ayant « déconnecté son système de réservations internationales », confie Samba Diallo, directeur de l’exploitation qui a accepté d’échanger avec nous sur la question.
Le cocktail explosif de cette conséquence du départ de Starwood, ajouté aux effets de la période électorale, a ainsi impacté négativement le résultat d’exploitation du King Fahd qui, de source de la direction, affiche un chiffre d’affaires qui est passé de 728 millions de FCfa en janvier 2012 soit un taux d’occupation de 56, 43% à 416 millions de FCfa de CA soit un taux d’occupation de 44,61% en février 2012. Le mois de mars a été légèrement mieux en termes de chiffre d’affaires (422 millions de FCfa) mais le taux d’occupation a chuté à 41,99%. Février et mars 2012 correspondant à la période de « diète électorale », une légère reprise est entamée depuis le mois d’avril (travaux de restauration) qui affiche 500 millions de FCfa de chiffre d’affaires, même si le taux d’occupation s’est stabilisé autour de 41,92% avant de remonter à 49% au mois de mai dernier soit un chiffre d’affaires de 700 millions de FCfa, toujours selon les statistiques de la direction qui parle d’un chiffre d’affaires prévisionnel de 800 millions de FCfa pour le mois de juin en cours.
Pour ce qui est des termes du contrat liant l’Etat à SHA, on repassera. Tout au moins apprend-on du comité de direction qui, « sans esprit de polémique », estime que les chiffres rendus publics par le collège des délégués du personnel qui s’inquièterait de leur avenir, sont « erronés». Il n’y aurait ainsi guère plus de cinq personnes recrutées depuis janvier 2012 et, selon le Directeur des ressources humaines, le salaire des cadres représenterait le tiers de celui de leurs prédécesseurs. Aussi la masse salariale serait bien en deçà de 100 millions de FCfa. Certes on est loin-là de la « faillite » du point de vue des chiffres, même si, concédons-le encore, c’est la procédure de cession du Méridien qui « pourrit » la dynamique de relance.
30 milliards d’investissements
Des projets, le King Fahd Palace en a certainement. Outre le câblage du palais des congrès, il est question, de manière prioritaire, de réduire une facture énergétique qui tournait autour de 100 millions de FCfa. Aussi, 800 millions de FCfa auraient déjà été injectés au niveau de la climatisation qui, dans un certain état, était plutôt budgétaire. Aussi avec le système du Chiller (le micro-ondes du froid), qui dispose d’un temps de refroidissement très rapide et peut fonctionner, même débranché, pendant une journée, la direction compte ainsi faire des économies substantielles tout en accroissant ses marges. En somme, les besoins d’investissements matériels notamment sont évalués à quelque 30 milliards de FCfa.
Il va sans dire qu’en parallèle, la reconquête de la clientèle internationale reste un des défis majeurs du King Fahd Palace, avec, une fois la situation financière redressée, une valorisation (amélioration des conditions matérielles et salariales) du personnel qui constitue une valeur ajoutée incontournable dans la gestion de cette structure.
En réalité, la question du nationalisme devrait plus se poser en termes de rigueur dans la gestion et cela, c’est bien à la portée du privé national, pour peu qu’il s’en donne les moyens.