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La Charia est compatible avec la laïcité, la démocratie et l’Etat de droit !

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L’avènement du printemps arabe coïncide avec un moment où tout le monde musulman parle de retour à Dieu et donc à la Charia, comme la seule alternative pour un changement de comportement moral, en vue de la résolution d’une demande sociale devenue de plus en plus préoccupante et de la quête du bien-être que la modernité tarde à apporter. En Libye, il est question d’instaurer la Charia ; en Tunisie, le parti ‘’islamiste’’ remporte les élections de façon éclatante ; en Egypte les ‘’Frères musulmans’’ sont devenus incontournables. Et tout cela intrigue les occidentaux qui, dans leur très grande majorité, pensent que l’Islam est incompatible avec la démocratie et l’Etat de droit. Il est donc nécessaire de rappeler et de préciser ce qu’est véritablement la Charia et surtout de montrer sa parfaite compatibilité avec toutes les valeurs universelles. Malheureusement, beaucoup de prédicateurs en ont une interprétation très discutable, voire rétrograde et pernicieuse. Il urge donc d’apporter les rectifications doctrinales qui s’imposent pour, d’une part, rassurer les non-musulmans et, d’autre part, permettre aux musulmans – aux intellectuels en particulier, de vivre l’Islam dans toute sa plénitude sans rompre avec la modernité et les exigences de la communauté internationale – et se garder de répondre aux provocations des détracteurs de notre noble religion.

En vérité, c’est le Droit pénal islamique qui est communément appelé Charia, mais à tort ; car en réalité, la Charia est plus large, moins restrictive ; oui, elle englobe véritablement toute la législation divine : Coran et Tradition du Prophète (PSL) essentiellement ; elle n’est donc pas descendue en monobloc, mais progressivement, pour apporter un éclairage sur le culte et sur toute chose d’une manière générale [25. Le Discernement : 30-33]Et avant la fin de la mission terrestre du Prophète Mouhammad (PSL), toute la Charia était descendue et l’Islam agréé comme religion, il y’a déjà quatorze siècles [5. La Table Servie : 3-5 ; 16. Les Abeilles : 88-90] ; il ne reste plus qu’à l’actualiser, à apporter donc à chaque instant l’interprétation la plus appropriée, et ceci jusqu’à la fin du monde. Et certes, nous sommes dans une logique d’expansion intangible de l’Islam, mais sans contrainte, et donc dans le respect strict de la liberté de conscience – principe sacro-saint de l’Islam [109. Les Incrédules : 1-6 ; 2. La Vache : 256]. Oui, cette expansion n’incombe qu’à Dieu et ne passe donc que par la persuasion, car il n’incombe même pas à un Prophète de contraindre les hommes à être croyants, car personne ne peut croire sans la permission de Dieu [41. Les Versets clairement exposés : 53 ; 10. Jonas : 96-100].

Cet exposé préliminaire devrait tranquilliser tous les non – musulmans et les persuader définitivement que l’Islam est une religion de paix, de tolérance et de justice. Et contrairement à ce qu’en pensent ses détracteurs, la Charia n’a pour objectif que de réconcilier l’homme avec son créateur et avec tout son entourage ; elle n’est que miséricorde et guérison pour tous les croyants[17. Le Voyage Nocturne : 81-82 ; 10. Jonas : 57]. Certes, la Charia est la même pour tous les musulmans, mais elle renferme des dispositions qui permettent de l’adapter à tous les contextes. Il existe donc une « Charia à minima » et une « Charia à maxima », avec autant de formes intermédiaires que de situations particulières. Il est fondamental de préciser que le Coran n’est pas une constitution  « prêt à l’emploi », applicable de façon univoque à tous les musulmans. Non ! … En réalité, il renferme tous les principes qui permettent aux juristes et aux parlementaires de légiférer, et donc d’établir une constitution en fonction du contexte et essentiellement des rapports de forces, comme dans toute démocratie, en préservant donc la liberté de tous, dans les limites de l’acceptable. Ainsi, ce message coranique qui s’adresse à tous les hommes, en tout temps et en tout lieu, ne peut qu’être parabolique, et donc adaptable à toutes les situations ; comme le Coran l’enseigne, il s’adresse donc à ‘’ceux qui réfléchissent’’, ‘’ceux qui sont doués d’intelligence’’ [29. L’Araignée : 41-44 ; 35. Le Créateur : 28 ; 17. Le Voyage Nocturne : 8-11 … 43-44] ; ce qui fait dire au Prophète (PSL) : « la religion, c’est la raison, celui qui n’a pas de raison n’a pas de religion ». C’est dire donc que toute interprétation littérale ou décalée est inévitablement source d’incompréhensions pouvant même entamer la crédibilité de l’Islam.

En principe, il ne devrait pas y avoir de problèmes pour les différentes communautés confessionnelles à s’entendre sur une constitution. En effet, les obligations religieuses des trois religions monothéistes (Islam, Christianisme et Judaïsme) sont quasi-identiques [42. La Concertation ou La Délibération : 12-15]. Le Coran enseigne explicitement que la Thora et l’Evangile révélés respectivement à Moise et Jésus fils de Marie, sont aussi ‘’Direction et Lumière’’ [5. La Table Servie : 15-19 … 44-50]. Et donc à l’évidence, une loi d’inspiration islamique ne devrait nullement nuire un chrétien ou un juif ; de même qu’une loi d’inspiration biblique ne devrait pas déranger un musulman en quoique ce soit ; dès lors, si les membres de la communauté, toutes confessions confondues, se concertent, ils devraient trouver un consensus large à défaut d’une convergence parfaite. C’est dire toute l’importance de la concertation et du dialogue en Islam [42. La Concertation ou La Délibération : 36-43].

En Droit pénal, communément appelé « Charia », la sentence capitale (peine de mort, amputation de membre, flagellation etc.) annoncée dans un premier verset est toujours tempérée par le verset suivant, ou d’autres versets dans la même sourate ou d’autres, qui préconisent ou proposent la grâce aux repentants [2. La Vache : 178-179 ; 5. La Table Servie : 33-34 … 38-40. 4. Les femmes : 15-16 ;  24. La Lumière : 2-5]. Ainsi, entre la peine capitale et la grâce, il y a un gradient de peines ; et suivant le contexte, le législateur peut choisir une peine suffisamment dissuasive, mais aussi tenant compte de la clémence et de la miséricorde de Dieu. Il ne faut pas être plus royaliste que le roi !!!

A la lumière de tout ce qui précède, on perçoit très clairement qu’il ne s’agit pas de couper les mains des voleurs, de tuer systématiquement ceux qui ont tué, de condamner à mort ou de flageller les fornicateurs et les calomniateurs. Il ne s’agit que de juger les délinquants selon la réglementation en vigueur établie par consensus par le peuple, toutes confessions confondues ; ce qui n’est pas très différent du ‘’Droit positif’’  adopté par la quasi-totalité des pays du monde. En réalité, le ‘’Droit positif’’ n’est pas une invention des occidentaux ; elle dérive de la Thora qui comme le Coran est ‘’lumière, guide et éclaircissement de toute chose’’ [6. Les Troupeaux : 154-155] ; c’est ce qui explique sa conformité avec la Charia dans ses principes. Le ‘’Droit positif’’ est cependant susceptible d’évoluer, de se parfaire en se spiritualisant et, à terme, d’atteindre l’idéal islamique. Mais toute modification devra être consensuelle, en conformité donc avec les principes de démocratie et de droit de l’homme que tous nos pays ont ratifiés – respect des engagements oblige ! [5. La Table Servie : 1].

L’Islam n’a jamais préconisé un pluralisme juridique. Cela ne contribuerait pas à la résolution des affaires dans nos sociétés multiconfessionnelles. Le Prophète Mouhammad (PSL) n’a-t-il pas renoncé à son titre de « Prophète de Dieu » pour conclure un pacte avec les gens du Livre (Chrétiens et Juifs) et certains polythéistes. Une constitution laïque ! N’est-ce pas ? Une constitution laïque peut être conforme avec la Charia (ce que Dieu a fait descendre) ; elle s’impose d’ailleurs dans certains contextes où le rapport des forces, tant au niveau du nombre que de la conscience islamique, ne permet pas un consensus plus large.

A l’évidence, cette perception de la Charia, conforme à tout point de vue avec le Coran et le Hadith, devrait balayer toutes les mauvaises interprétations et lectures maximalistes  qui rebutent à juste raison tous les intellectuels – musulmans ou non – et tous ceux qui réfléchissent d’une manière générale et qui sont épris de paix et de justice. Oui, l’Islam – la ‘’civilisation de l’universel’’ – ne peut pas ne pas être compatible avec la modernité et la démocratie ; c’est lui seul d’ailleurs qui peut véritablement apporter la dimension éthique, sans laquelle point de démocratie véritable, point de développement durable. En vérité, le Coran et le Hadith ne plaident pas en faveur de la lecture maximaliste de la Charia que préconisent les « fondamentalistes » (ou « islamistes »). Cet islamisme qui gangrène la plupart des pays arabes n’est que la manifestation d’une tourmente (névrose) liée à une inertie dans la compréhension de l’Islam ; en effet, la grande majorité des oulémas ont, à l’heure actuelle, une lecture discutable du Coran et du Hadith ; et cette maladie des oulémas est liée à leur hostilité, avouée ou non, envers la Tarikha (Soufisme), alors que cette dernière est indissociable de la Charia ; elle relève aussi de leur non soumission à un guide agréé, et donc doté d’un véritable pouvoir de guidance.

– Abd Allah b. Amr rapporte ces propos de l’Envoyé de Dieu – sur lui la grâce et la paix – : « Dieu ne fera pas disparaître la science en l’ôtant aux hommes, mais Il fera périr les savants, si bien que lorsqu’ils auront disparu, les gens prendront pour guides des ignorants qu’ils interrogeront et qui leur donneront des fatwas sans aucune autorité ; ils les égareront en s’égarant eux-mêmes. ».(Bukhari)

A l’évidence, l’heure est aussi à la réhabilitation. Qui était plus pervers que Pharaon ? Il tuait les enfants, déshonorait les femmes, opprimait son peuple ; et pourtant, Dieu lui a envoyé le Prophète Moïse (Moussa) – paix sur lui – pour le réhabiliter [20. Ta.Ha : 43-44].

Et pour conclure, un mot sur la laïcité ! D’un commun accord, la laïcité, c’est la neutralité de l’Etat envers toutes les religions ; elle peut cependant avoir plusieurs visages selon les rapports de forces, d’une part, entre les différentes confessions et d’autre part, entre le temporel et le spirituel. En période de crise spirituelle, la laïcité constitue le consensus minimal (ou par défaut) dans une société multiconfessionnelle. Ainsi, les périodes de crise spirituelle font les beaux jours de la ‘’République’’. Mais en cas de renaissance spirituelle, comme c’est le cas aujourd’hui, l’immixtion du spirituel dans le temporel est inévitable et peut concerner tous les domaines (Politique, Médecine, Droit, Economie et toutes les sciences sociales, etc.) puisque les Textes Sacrés (Coran, Evangile, Thora) sont ‘’une explication de toute chose’’. Ainsi, cette intrusion du religieux dans l’espace publique peut rendre les limites de la République plus ou moins floues et déranger les laïcs frileux. Mais légiférer pour freiner la progression du religieux ne règle pas les problèmes, constitue une violation manifeste de la liberté de culte  et ne contribue qu’à exacerber les tensions. Ainsi, en violant la liberté d’opinion (interdiction du port du voile islamique ou de la formation de partis politiques d’inspiration confessionnelle tels les partis démocrates chrétiens rencontrés dans les « grandes démocraties »), les intégristes laïcs qui se sont autoproclamés les défenseurs des droits de l’homme et de la démocratie ne basculent-ils pas ostensiblement ou visiblement dans l’intolérance, l’intégrisme et une certaine dictature ?

 

Docteur Mouhamadou Bamba NDIAYE

Ancien Interne des Hôpitaux de Dakar

Pédiatre à Thiès

Recteur de l’Université Virtuelle ‘’La Sagesse’’ de la Fondation Serigne Babacar SY Ihsaan – Bienfaisance (Thiès).http://sites.google.com/universitevirtuellelasagesse/ http://sites.google.com/site/missionmahdi/ ; http://sites.google.com/site/dahirathies/

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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