Sorte de véritables «primaires» avant la présidentielle de 2017, les prochaines élections locales pourraient sonner le glas du compagnonnage qui a eu raison de Me Wade, le 25 mars 2012, même si ses principaux acteurs (Macky, Niasse et Tanor) ressassent à tout bout de champ leur disposition à maintenir la dynamique unitaire de Bokk Yaakaar pour mars 2014.
Les ambitions des uns et des autres pour les 587 collectivités locales du pays, les divergences et les crocs en jambe qui prospèrent de plus en plus entre alliés comme la fameuse clé de répartition pour ces joutes communales, régionales et rurales sont en passe de pousser vers la sortie beaucoup de souteneurs de Macky Sall. A la limite, ces élections sont susceptibles de devenir une sorte de chausse-trappe pour l’Apr, si Macky Sall ne parvient pas à concilier les positions de plus en plus contrastées de ses alliés de «circonstance».
A moins d’une année de leur organisation programmée pour le 16 mars 2014, les prochaines élections locales devant mettre fin au mandat datant de 2009 des conseillers municipaux et des élus locaux risquent de déboucher sur un immense chamboulement du champ politique. Une reconfiguration qui pourrait à la limite être préjudiciable au parti au pouvoir, en l’occurrence l’Apr de Macky Sall. A l’approche de ces joutes devant renouveler le personnel à la tête des mairies, conseils régionaux et conseils ruraux, la coalition Bennoo Bokk Yaakaar qui a porté Macky Sall au pouvoir est traversée de toutes parts par des divergences qui sont en passe de sceller sa rupture, pour ne pas dire son implosion.
Même si des ténors de la coalition (à l’instar de Moustapha Niasse de l’Afp, Ousmane Tanor Dieng du Ps, Abdoulaye Bathily de la Ld,) ressassent à l’envi la poursuite de leur compagnonnage avec Macky Sall, il n’en demeure pas moins que les dissensions sont en train de s’afficher au quotidien entre l’Apr et ses alliés. Le Rewmi d’Idrissa Seck arrivé à la 5ème place à la dernière présidentielle (près de 8% des suffrages) n’est ainsi pas loin de siffler la fin de son alliance avec le nouveau parti au pouvoir. Qui plus est, au sein même de la coalition, des alliés de Macky Sall frustrés dans le partage du gâteau présidentiel sont en train de mitrailler le nouveau pouvoir, en se mettant dans la disposition d’aller aux élections locales, sous leur propre bannière.
Dans cet imbroglio, l’Apr de Macky Sall (au pouvoir) semble s’adonner à un jeu somme toute assez trouble. La formation politique du chef de l’Etat s’active dans l’ombre à saper les bases électorales de certains de ses alliés qui dirigent les mairies des grandes villes du pays. Mbaye Ndiaye, ministre d’Etat et directeur des structures du parti, n’est pas passé par mille chemins pour tenter de « déstabiliser» l’actuel maire de Dakar Khalifa Sall, membre du Ps et allié de premier choix de Macky Sall. A Thiès, Thierno Alassane Sall, le ministre «apériste» des infrastructures et des transports, s’est engagé dans une guéguerre ouverte contre Idrissa Seck, membre de la première heure de Bokk Yaakaar, pour décrocher des mains du Rewmi la Capitale du Rail.
Saint-Louis n’est pas épargnée par cette offensive de l’Apr. Sur le dos de Cheikh Bamba Dièye, ministre de la Communication, maire de la ville tricentenaire et allié inconditionnel de Macky Sall, Mansour Faye et Alioune Badara Cissé se démultiplient pour saper l’actuel titulaire au poste. Question de realpolitik certainement, diront les puristes ! Il n’empêche que, tout en s’érigeant en défenseur de l’unité au sein de Bennoo Bokk Yaakaar, le chef de l’Apr s’échine à se donner les moyens de conquérir les principales collectivités locales du pays. Comme un véritable chef de guerre soucieux d’être d’abord et avant tout à l’aise politiquement parlant, à l’élection présidentielle de 2017. Et, dans cette entreprise de pure politique politicienne, même les directeurs de sociétés publiques ont été « sommés » d’investir le terrain politique sous peine de perdre leur poste.
Seulement, la question qui est à se poser à ce niveau est de savoir si l’Afp de Moustapha Niasse comme le Ps de Tanor Dieng sont prêts à lâcher, au profit de leur allié au pouvoir qui semble sous le coup d’une gourmandise incontrôlée, les grandes mairies acquises depuis les locales de 2009. Dakar avec le Socialiste Khalifa Sall, Kaolack avec le «progressiste» Madieyna Diouf, Louga avec la «Verte» Aminata Mbengue Ndiaye… Rien n’est moins sûr.
LA CLE DE REPARTITION: AUTRE PIEGE POUR BBY
La conquête des collectivités locales se révélant par ailleurs d’une importance majeure dans l’occupation locale du terrain politique et une sorte de sillon vers la présidentielle de 2017, beaucoup de formations politiques membres de Bennoo Bokk Yaakaar sont déterminées à mettre la pression sur l’Apr de Macky Sall pour s’accaparer le maximum de collectivités locales possibles.
Dans une mouvance présidentielle qui semble donc jouer à se faire peur, la question de la clé de répartition pour ces joutes communales, régionales et rurales s’est ainsi invitée en douce. Idrissa Seck et le Rewmi ont mis la barre très haut en faisant savoir sans fioritures qu’ils n’accepteront pas qu’on leur attribue un quota sur les listes, uniquement sur la base du score de 8 % obtenu au 1er tour de la présidentielle de 2012.
Le Ps ne semble pas dire autre chose. Même si la position des Socialistes sur la clé de répartition pour les postes de conseillers aux élections locales n’est pas encore officielle, des voix se font entendre subrepticement pour revendiquer un quota conforme aux 3300 conseillers municipaux et ruraux obtenus par Ousmane Tanor Dieng et cie, lors des Locales de 2009.
Macky Sall est-il disposé à lâcher du lest, pour ces élections locales, afin de préserver sa coalition? Face à des joutes électorales dont l’enjeu est, pour lui, la confirmation réelle de son pouvoir dans les collectivités locales, le chef de l’Apr qui est en pleine phase de restructuration et de massification de son parti (né il y a seulement quatre années) ne semble-t-il pas obligé de transiger avec ses alliés ?
D’autant que son action, en termes de redressement économique et social du pays, n’a pas pris entièrement forme et que les Sénégalais aux attentes criardes pour l’amélioration de leur qualité de vie, sous toutes les formes, n’ont pas encore eu satisfaction dans le «bilan» porté par le nouveau pouvoir. A moins de vouloir suivre, à ses risques et périls, les faucons de l’Apr qui menacent d’aller seuls aux Locales, en surestimant leurs forces, notent des spécialistes du jeu politique ! Avec un parti encore embryonnaire, en phase de massification et de structuration, avancent-ils par conséquent, Macky Sall se devra de composer avec ses alliés dans le gouvernement comme à l’Assemblée nationale, afin d’éviter la chausse-trappe que pourraient constituer les élections municipales, régionales et rurales. D’autant que son parti est en « éclosion » face à des formations politiques au long cours, fortement ancrées dans l’électorat et à la tête de la grande majorité des mairies, communes, conseils régionaux et conseils ruraux du Sénégal, depuis mars 2009.