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La prostitution au Sénégal : Une industrie qui se développe

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Tous les jours à 19 heures, Rama* (23 ans), après avoir mis ses produits de beauté dans son sac à main, se rend dans un bar populaire de Dakar, la capitale sénégalaise.

Le bar est un lieu fréquenté par de riches Sénégalais et des expats aux comptes en banque probablement bien fournis. Le travail de Rama consiste à attirer dans son lit le plus grand nombre d’hommes possible pour pas moins de 50 euros pour dix minutes :

 »La plupart du temps, les hommes vous donnent une fortune, l’équivalent d’un salaire de nombreux fonctionnaires. On fait des affaires et personne n’y perd. »

Rama est l’une des milliers de jeunes travailleuses sexuelles qui prospèrent dans les rues, les bars et les night-clubs de Dakar. La plupart d’entre elles disent avoir été entraînées à faire ce travail à cause de la pauvreté et du chômage mais aussi par manque d’occasions de réussir dans la vie.

Bilkisu est une Nigériane de 31 ans qui s’est installée en 2008 à Dakar après que des amies lui eurent parlé de l’industrie florissante du sexe dans la capitale sénégalaise :

 »Je me sens chez moi au Sénégal. Ici, j’ai beaucoup plus de chances qu’au Nigeria. Les hommes s’intéressent aux prostituées et en général ils payent ce que vous demandez. »

Au Sénégal, la prostitution est légale et réglée depuis trois décennies. Et ce, officiellement, afin de suivre le statut de santé des prostituées, dont un grand nombre se font régulièrement contrôler dans les centres de santé publics. Mais pour certains, la légalisation de la prostitution est un moyen d’attirer les touristes au Sénégal à la recherche de relations sexuelles.

Peut devenir prostituée toute femme ayant 21 ans ou plus, à condition toutefois d’être enregistrée en tant que telle par la police, de se faire régulièrement contrôler dans des centres de santé officiels, de faire preuve de discrétion et d’avoir une carte sanitaire valide montrant des tests négatifs concernant les maladies sexuellement transmissibles. Cependant, un grand nombre de prostituées de Dakar ne répondent pas à ces conditions. Rama, par exemple, considère comme une perte de temps le fait de se faire enregistrer à la police :

 »Pourquoi me faire enregistrer à la police quand je sais que je vais me retrouver dans une situation compliquée ? Un grand nombre de mes amies ont été discriminées en le faisant. La police les harcelait, les appelait et les traitait comme les dernières des dernières. »

Dès son arrive à Dakar, Bilkisu, sur les conseils d’une collègue, s’est fait enregistrer. Résultat : un véritable cauchemar :

 »J’ai été arrêtée et menacée d’expulsion, même si une heure après ils m’ont relâchée. Ils s’en sont pris à moi pour avoir quitté mon pays et être venue au Sénégal pour, comme ils disaient, apporter des maladies et une conduite immorale. »

Les organisations pour la défense des droits de l’homme et les ONG s’inquiètent de l’exploitation des travailleuses sexuelles par leurs clients. Selon certains, les travailleuses sexuelles sont régulièrement victimes d’attaques physiques par leurs clients, qui refusent de les payer après avoir eu avec elles de relations sexuelles. C’est le cas notamment de Rama, qui montre les cicatrices de ses blessures. Certains clients, dit-elle, déchirent les préservatifs qu’ils ne supportent pas durant les relations, la mettant ainsi en danger mais aussi eux-mêmes.

Pour Bilkiusu, ce ne sont pas les clients mais les agents chargés de faire respecter la loi qui constituent le problème :

 »Parfois ils vous obligent à leur donner des pots de vin. Si vous n’avez pas de chance, ils vous prennent tout ce que vous avez ce soir-là et vous avertissent de n’en parler à personne. »

Alors que l’industrie du sexe est en plein essor, les services médicaux s’inquiètent du nombre de travailleuses sexuelles qui ne se font pas régulièrement contrôler.

Absa Ndoye travaille dans un centre de santé de la banlieue de Dakar. Selon elle, le problème principal est que l’on ignore le nombre de travailleuses sexuelles non enregistrées et si elles prennent des précautions.
Il n’existe pas de chiffres officiels sur le nombre actuel de travailleuses sexuelles au Sénégal, mais selon certains rapports Dakar est l’une des capitales de l’industrie du sexe en Afrique, avec des travailleuses sexuelles provenant de l’Afrique sub-saharienne, mais aussi de l’Afrique du Nord et du Moyen Orient.
Le gouvernement de Dakar n’a pas changé sa politique en matière de prostitution et jusqu’à présent n’a pas l’intention de bannir la prostitution du Sénégal.

Et pour Rama, Bilkisu et bien d’autres de leurs collègues, leurs clients sont disposés à montrer leur argent et aucune somme ni risque ni exploitation les éloignera de ce commerce sexuel tant lucratif. Sheriff Bojang Jnr (Dakar).

Bitimrew.net

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