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L’Afrique, principale concernée par le fléau des faux médicaments

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Ce lundi 14 septembre marque le lancement d’une vaste campagne internationale contre les faux médicaments. Une tare qui touche en plein cœur le continent africain. Grâce au slogan « le médicament de la rue tue », cette opération, une initiative de la Fondation Chirac, espère sensibiliser le grand public. Chaque année, près de 800 000 personnes meurent à cause du phénomène, principalement en Afrique.

C’est un fléau. Le manque d’accès à des molécules de qualité pousse les patients, en raison du prix trop élevé et des ruptures de stocks récurrentes des produits, à se tourner vers les marchés parallèles du médicament. Des circuits complexes qui ne permettent aucune traçabilité. Les produits ainsi consommés peuvent éventuellement contenir les bonnes substances, mais en quantité insuffisante ou trop importante. Ce qui peut alors entraîner des résistances.

Il arrive aussi que les produits véhiculés dans ces marchés parallèles contiennent des substances toxiques, comme de l’antigel, de la mort-aux-rats, ou encore des poussières de peinture. Voire du mercure. Des ingrédients qui permettent de se rapprocher au plus près du goût ou de la couleur d’un vrai médicament, mais qui peuvent entraîner de graves pathologies, des handicaps, voire tout simplement la mort du patient qui les consomme.

Selon l’Organisation mondiale de la santé, un médicament sur 10 en circulation serait falsifié, et un médicament sur deux vendus sur Internet serait un faux. Toujours selon l’OMS, entre 30 % et 70 % des médicaments vendus en Afrique spécifiquement, selon les pays, seraient également faux. Une menace sur la santé des populations démunies, mais qui rapporte quelque 200 milliards de dollars aux trafiquants. Lucratif, puisque 20 à 45 fois plus rentable que le trafic de drogue.

Mali : privilégier la pharmacie à tout prix

Pour éviter les contrefaçons, souvent dangereuses, le plus sûr est donc, évidemment, d’aller acheter ses médicaments à leur point de vente officiel. RFI a rendu visite à un professionnel agréé à Bamako. Comme l’indiquent sa blouse blanche, son badge, et la croix verte qui surplombe son officine, le Dr Youssouf Coulibaly est pharmacien. Il nous a expliqué pourquoi ses clients ne trouveront que des médicaments authentiques dans sa boutique :

« Nous nous approvisionnons uniquement chez des grossistes agréés, dont les médicaments passent par un circuit aussi contrôlé. Donc, les médicaments qui se retrouvent dans nos officines sont non contrefaits. C’est tout à fait un gage de sécurité. La Division du département des médicaments du Mali passe faire des contrôles inopinés. Ça arrive souvent », explique-t-il.

Un client pousse la porte de la pharmacie. Lorsqu’il doit acheter un médicament, c’est à un professionnel qu’il préfère s’adresser. Mais il reconnaît que ce n’est pas toujours le cas dans la famille. « Il y a certains parents, parfois, qui achètent des médicaments un peu… accessibles, dit-il. Pas tout le temps dans la rue, mais aussi dans les boutiques de quartier. C’est peut-être par méconnaissance, ou bien par facilité. Ils se disent que les officines ne sont pas aussi à portée de tout le monde, peut-être par la distance, peut-être par les moyens financiers. Moi, je ne préfère pas. »

RDC : le danger des faux antipaludéens

Le paludisme est une source de mortalité en République démocratique du Congo. En raison de ses faibles revenus, la population fait difficilement face aux coûts des soins. Elle recourt donc souvent aux officines proposant des médicaments moins chers. Or, de faux médicaments circulent en très grand nombre, selon les autorités sanitaires du pays. Plusieurs fois, leurs antennes provinciales ont tenté de lancer l’alerte.

Au mois d’août dernier par exemple, c’est le pharmacien-inspecteur provincial du Congo central qui a mis en garde la population contre la présence de faux antipaludéens sur le marché. Selon lui, les caractéristiques visuelles suffisaient à constater qu’il ne s’agissait pas de la bonne quinine. En 2011, les autorités sanitaires de la ville de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, ont par ailleurs dénoncé aussi la circulation de faux médicaments contre le paludisme. Un stock important de ces produits avait même était saisi, mais cela n’avait pas permis de mettre la main sur les vrais responsables du trafic, explique un pharmacien local.

A Kinshasa, on se fait une idée de l’origine de ces faux produits médicaux. La fausse quinine serait produite en Inde, introduite en République démocratique du Congo via la Tanzanie et distribuée clandestinement. Difficile de s’apercevoir de la supercherie, car les produits falsifiés sont conditionnés dans des emballages identiques à ceux des médicaments produits en Europe. Conseil d’un autre pharmacien de Goma : « La seule garantie pour vendre la quinine de qualité, c’est de respecter les circuits réguliers d’approvisionnement. »

Les artistes s’engagent contre les faux médocs

A l’occasion de la campagne lancée ce lundi contre les faux médicaments, une dizaine d’artistes se sont engagés pour réaliser des spots de sensibilisation. Parmi eux : Lynnsha, chanteuse de R’n’B et de zouk. Elle est martiniquaise, mais se produit régulièrement en Afrique. Elle confie à RFI : « Je me suis sentie concernée en tant que maman, je suppose, en tant que femme. Lorsqu’on entend que plus de 800 000 personnes meurent par an, une grande partie en Afrique, justement à cause de ces médicaments qui tuent, forcément, ce sont les plus démunis qui sont touchés. On se sent concernés. Lorsqu’on a la chance de pouvoir exercer un métier qui peut toucher certaines personnes, de pouvoir être entendu, je pense que l’on y va, on ne se pose pas trop de questions. »

« C’est vrai que c’est compliqué. Parce qu’avant tout, on a envie de leur dire : attention, n’achetez pas les médicaments dans la rue, car ils sont faux et ils tuent. Et d’un autre côté, ces personnes nous disent :  » Mais on n’a pas forcément l’argent pour acheter des vrais médicaments.  » Sachez qu’ils tuent, ce ne sont pas des médicaments, ce sont des trafiquants qui se font de l’argent sur le dos des plus pauvres. Je ne sais pas comment vous dire ça, mais surtout ne le faites pas, car vous risquez de tuer vos propres enfants… Il faut aller voir un vrai médecin. Il y a beaucoup d’associations qui sont là pour vous aider, pour vous offrir des médicaments, vous offrir des soins. S’il vous plaît, n’achetez pas des médicaments dans la rue. »

La Guinée entend bien appliquer Medicrime

Il y a quatre ans, le Conseil de l’Europe a décidé de créer un instrument juridique pour combattre le trafic de faux médicaments au niveau international. La convention Medicrime, qui criminalise la production et le trafic de ces faux médicaments, a été ratifiée par plusieurs pays européens. Mais en Afrique, seule la Guinée a commencé le processus de ratification. Ce dernier ira à son terme, assure à RFI le ministre guinéen de la Santé, Rémy Lamah : « Ça a été ratifié au niveau de l’Assemblée nationale, c’est déjà une avancée considérable. La suite du processus suivra. L’essentiel, c’est que le gouvernement ait pris conscience de ce phénomène ignoble pratiqué au niveau international. »

« Nous cherchons à défendre l’intérêt de nos populations, qui ont perdu leur vie en prenant ces faux médicaments, explique le ministre guinéen. C’est pourquoi la convention Medicrime a été mise en place pour criminaliser ce phénomène au niveau de tous les pays. Et aujourd’hui dans mon pays, nous avons déclenché une lutte sans répit, avec les syndicats de pharmaciens constitués à cet effet, contre ces vendeurs de faux médicaments qui, en un temps record, ont fait assez de victimes. Dernièrement, on a eu à saisir, au niveau du port de Conakry, un tas de conteneurs de faux médicaments. C’est un phénomène très régulier. »
rfi.fr

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