L’art de vaincre! – Par Abdoulaye Thiam

Date:

Jean-Luc Godard, cinéaste franco-suisse: «C’est la marge qui tient la page»

25 mars 2012 -25 mars 2016 ! Voilà quatre ans, que Macky Sall préside aux destinées du Sénégal. Le premier à être surpris de cette ascension fulgurante, qui déroute toutes les logiques politiques, c’est Abdoulaye Wade. Machiavéliste, dans tous ses faits et gestes, le pape du Sopi ne s’attendait pas du tout à ce que son bourreau soit son ancien directeur à Pétrosen, son ancien ministre des Mines, de l’Intérieur, son ancien Premier ministre et son ancien président de l’Assemblée nationale. «J’ai fait 25 ans dans l’opposition avant de devenir président de la République. Ce n’est pas Macky Sall, qui a créé son parti en juin 2008, qui me battra», avait déclaré l’ancien Chef d’Etat sénégalais en pleine campagne électorale en 2012.

Comme lui, aucun analyste politique d’ici ou d’ailleurs ne pouvait prévoir un tel scénario. Tout le monde a été pris au dépourvu. Tel un monstre froid, Macky Sall a déroulé son programme, aidé bien sûr en cela, par la dislocation de Benno Siggil Senegal, pour atteindre les sommets. Mais le plus extraordinaire, c’est comment il a su manœuvrer pour gouverner le Sénégal, pendant quatre ans, tout en étant minoritaire au sein même de l’hémicycle.

La méthode douce

Arrivé au pouvoir via un mouvement adossé à un parti politique légalement constitué (Alliance pour la République), Macky Sall a adopté la méthode douce et de partage du butin: «gagner ensemble et gouverner ensemble». Un slogan qui a pu prospérer pour la bonne et simple raison que certains partis politiques au sein de la coalition Benno Bokk Yaakar qui l’a porté au pouvoir, étaient dirigés par des secrétaires généraux au crépuscule de leur carrière politique. Notamment Ousmane Tanor Dieng (PS), Moustapha Niasse (AFP), Maguette Thiam (PIT), Abdoulaye Bathily (LD), Madior Diouf (RND), Landing Savané (AJ/Authentique), etc. Tous avaient fini de griller leur carte. Tout ce qui leur restait, c’est d’être des faiseurs de «Présidents» et de l’accompagner. Idrissa Seck, ne rentrant pas dans ce schéma, a été le premier à claquer la porte de cette coalition hétéroclite et de façade, en se signalant lors du premier anniversaire de l’alternance, le 25 mars 2013.

Mieux, conscient aussi du fait que ces leaders contrôlent, pour la plupart d’entre eux, l’appareil politique de leur parti, notamment, les instances, Macky Sall les a associés à la gestion du pouvoir. C’est ainsi que pour la première fois dans l’histoire politique du Sénégal qu’un président de la République accepte de céder le fauteuil du président de l’Assemblée nationale, 2ème personnalité de l’Etat devant assurer la suppléance en cas de vacance du pouvoir, à un leader d’un parti allié. Toutefois, le président de l’Alliance pour la République prendra le temps qu’il faudra pour jauger la loyauté de son allié avant de lui confier les rênes de ce pouvoir. D’où le retard constaté dans la révision de la loi Sada Ndiaye, qui était pourtant à l’origine du départ de Macky Sall du PDS. Le fameux acte d’allégeance de Moustapha Niasse ayant débouché sur la dislocation de son parti, est passé par là.

Il restait alors à «manager» Ousmane Tanor Dieng (OTD). Même si les Socialistes ont été servis avec deux départements ministériels, d’autres postes de PCA et une vingtaine de députés, leur secrétaire général n’avait pas de poste officiel au sein de l’attelage gouvernemental. Pendant ce temps, leur «ennemi» juré occupe le Perchoir. Ce qui est perçu comme un «humiliation» pour beaucoup de militants socialistes. Le Conseil économique social et environnemental étant confié à Mme Aminata Tall, le retour du Sénat n’étant plus à l’ordre du jour, le Chef de l’Etat crée alors le Haut Conseil des Collectivités (HCCL). Une chambre qui ne devrait pas échapper à OTD. Sa «neutralité» dans les combats du régime contre Khalifa Ababacar Sall à Dakar et Aïssata Tall Sall à Podor, en valait bien la peine.
Mieux, comme ce fut le cas avec l’Alliance des Forces de Progrès (AFP), le patron de l’APR va réussir à administrer un coup de massue au Parti socialiste qui est aujourd’hui à la croisée des chemins, ne sachant plus, pour la première fois de son histoire, s’il faut s’arrimer à l’APR pour rester au pouvoir ou rompre l’idylle à ses risques et périls.
Quant aux autres alliés, ils vont devoir se contenter d’un département ministériel, par ci; d’une direction par là; sinon de la «tontine» supposée ou réelle que le président de la République octroierait à leur leader.

Vassalisation des médias

L’opposition étant réduite à sa plus petite expression, avec cette épée de Damoclès suspendue sur la tête de plus d’une vingtaine de caciques du PDS, à cause de la traque des biens supposés mal acquis, il appartenait aux médias de jouer le rôle de sentinelle. Hélas ! Ils seront vite rattrapés par leur vulnérabilité. Rares sont aujourd’hui les organes de presse qui ne soient pas inféodés au régime au pouvoir. C’est même à se demander s’il est nécessaire que le Chef de l’Etat s’encombre d’un département de communication et autres chargés de Com.

Société civile décapitée

Un autre secteur de la démocratie sénégalaise que Macky Sall a réussi à réduire à néant ou presque, c’est la société civile. Certains leaders de ce secteur qui tenaient en haleine l’espace public et aidaient l’opinion à mieux comprendre les enjeux, ont rejoint le «Macky» avec armes et bagages. Ce qui confirme les attaques des autres régimes qui les qualifiaient «d’opposants encagoulés». Qu’ils le veuillent ou non, la vocation des membres de la société civile n’est pas seulement de prendre le pouvoir. Or, beaucoup d’entre eux estiment qu’ils doivent faire partie du partage du pouvoir ou être dans les instances de décision. Un choix qui n’est pas sans conséquence dans la démocratie sénégalaise. D’autant qu’ils perdent désormais leur liberté de ton et d’action. Ils perdent tout simplement leur raison de vivre.

Structuration à l’horizontale

Jusqu’à l’arrivée de Macky Sall au pouvoir, les pouvoirs politiques sénégalais adoptaient une structuration verticale. Autrement dit, ils étaient réglementés du sommet à la base. Mais, le président de l’APR, conscient de risques dans les structurations et renouvellements dans les instances de base, choisit un autre format. Inédit au Sénégal: une structuration horizontale. Comprenez qu’il y a un seul Chef à l’APR, c’est Macky Sall, tous les autres suivent. Ce qui ressemble un peu à la théorie d’un certain Idrissa Seck: «au Pds, la seule constante, c’est Wade, le reste est variable», disait l’ancien Premier ministre.

Voilà pourquoi, Macky Sall ne se presse jamais à éteindre un quelconque feu entre les membres de son parti qui se crêpent le chignon, pour le leadership dans différentes régions, sans qu’il ne lève le plus petit doigt.
Une stratégie, jusque-là, payante pour consolider son pouvoir. Toutefois, cet art de vaincre n’est pas sans conséquence car tout pouvoir a besoin d’un contre-pouvoir, sinon il se disloque, crée un déséquilibre et un effet boomerang.

2 Commentaires

  1. Encore un idiot de la théorie du complot ! Toi Abdoulaye Thiam tu n’es vraiment pas intelligent. Les Sénégalais ont voté, alors respecte leur vote massif et félicite-les. Mais ne les insulte pas et ne les prends pas pour des corrompus ou des cons car ce serait leur manquer profondément de respect. Les Sénégalais ont simplement refusé de tomber dans le piège de l’opposition et d’une partie hypocrite de la société civile. Et attention Sénégalais dey féyou. Tu risques d’être encore plus surpris en 2017 et en 2019…

  2. Comment le vieux du Sopi a retourné contre lui ses meilleurs fils et collaborateurs?La succession politique n’est pas une affaire de sang.Le ciel compose avec la volonté quand elle est forte , juste et éclairée. Quelque chose grandit dans un cœur injustement blessé.La force des uns vient de la faiblesse des autres.Aucun Parti à lui seul ne peut parvenir au pouvoir sans coalition.C’est l’union dans une claire et inébranlable vision qui fait la différence.Le peuple saura trancher en faveur des justes, des endurants dévoués et dans le sens du progrès

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

Nuyu naa la (par Guy Marius Sagna)

Nuyu naa la,L'assemblée nationale du Sénégal m'a proposé de...

Lettre ouverte aux sorcières (Par Marvel Ndoye)

A vous qui vous reconnaitrez. Changer les mots «...