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Le ’’laaban’’: à la gloire de la virginité

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Le ’’laaban’’, cette bruyante cérémonie à la gloire de la virginité
La libération des mœurs qui caractérise notre époque lui a donné un sacré coup, mais le ’’laaban’’, cette bruyante cérémonie marquant la première nuit de noces d’une vierge avec son époux, a toujours ses partisans dans certains milieux à Dakar. C’est surtout le cas chez une famille griotte de la Médina où on se fait fort de perpétuer la tradition à travers des pratiques proches de celles d’autrefois.

 

Intarissable, Mme Kogne, trouvée au sein de sa famille, parle d’une voix remplie d’émotion du ‘’laaban’’ qu’elle décrit comme une pratique datant de plusieurs siècles et qu’on retrouvait ‘’même chez les Maures’’.

Pour sa part, le sociologue Djiby Diakhaté estime que le ‘’laaban’’ pratiqué dans les sociétés traditionnelles avait trois fonctions : la divulgation, la répression à l’encontre de certaines filles n’ayant pas su rester chastes jusqu’au mariage et l’équité dans les échanges car un produit pur s’échange en retour par la dot.

’’Il faut ajouter que cette cérémonie marque également une récompense pour la famille particulièrement la maman de la jeune fille qui brandit le pagne taché de sang comme un trophée’’, ajoute M. Diakhaté.

’’Chez les Gawlo (une branche des griots), raconte Mme Kogne, on ceint d’un collier la nouvelle mariée et après quoi on chante ses louanges à travers sa descendance. C’est une fête qui a tout son sens car permettant à la jeune fille de rendre digne sa maman’’.

La dignité en question n’est autre que l’exhibition du pagne tâché de sang sur lequel la fille a couché durant sa nuit de noces. L’étoffe, indique-t-elle, ‘’est fièrement exhibé devant les parents et amies. Et on le montre aussi à la belle famille de la jeune mariée notamment à sa belle-mère qui donne des cadeaux pour témoigner de sa satisfaction’’.

A la question de savoir pourquoi un tel étalage susceptible de choquer les esprits chastes, Mme Kogne une autre dame présente à l’entretien, souligne qu’il s’agit d’une question d’honneur, car il ne saurait être question d’’’éveiller le moindre doute’’ sur la bonne tenue de la fille offerte en mariage.

Diakha Diouf, une griotte qui soutient avoir servi 34 années durant dans les ‘’laaban’’, insiste sur le fait qu’aucune concession ne doit être faite à propos de l’exhibition du pagne dans la mesure où il faut surtout couvrir de ridicule ‘’certaines mauvaises langues du quartier’’ promptes à médire de la conduite de la jeune mariée.

’’Vous savez, la chose a eu lieu dans l’intimité d’une chambre, donc on ne peut pas continuer à se cacher’’, souligne-t-elle avant d’ajouter qu’ainsi il ne peut y avoir de tromperie sur la marchandise du fait qu’on voit le sang et que la jeune fille en sort quelque peu affectée.

En guise de consolation, elle est couverte de cadeaux de valeur par son mari d’abord, puis par ses parents et les proches plus précisément sa tante paternelle, histoire de montrer leur joie et fierté.

Le premier des cadeaux celui qu’offre le mari comblé est glissé sous l’oreiller, explique Fatou Sèye Mbaye selon qui autrefois ‘’le mari donnait 25.000 voire 30. 000 FCFA. Sa mère et ses proche en faisaient autant avec des tissus ou de l’or’’.

A son tour, la mariée fera don à sa cousine (la fille de sa tante paternelle) des chaussures et du boubou qu’elle portait lors de la nuit nuptiale.

Aujourd’hui, renseigne Fatou, les cadeaux à la mariée se sont modernisés et portent sur des chaînes à musique, des téléphones portables, des animaux domestiques (moutons et chèvres) et de substantielles enveloppes.

En plus des cadeaux, on prépare également à manger, généralement du ‘’cakri’’ (repas à base de mil et de lait caillé) offert par la tante paternelle, indique Fatou Sèye Mbaye ajoutant que tout ce que dépense cette dernière lui est ristourné en double par les parents du marié.

Le festin se poursuit le soir avec un ‘’daxin’’ (repas à base de viande, de tomate et de pâte d’arachide) offert par la mère de la mariée aux amies de cette dernière.

A en croire Fatou Sèye Mbaye, il s’agit d’un moment plein de symboles, car ‘’ce repas est une invite faite aux jeunes filles non encore mariées à imiter leur amie en restant vertueuses. Il leur faut à tout prix éviter de tomber dans le piége de certains hommes’’.

’’Lorsqu’elles viennent à ces genres de cérémonies et qu’elles voient la mariée couverte de cadeaux et d’or, elles rêvent forcément d’être un jour comme elle’’, soutient Fatou Sèye selon qui ‘’lorsque ton mari a été le premier homme de ta vie, il te respectera pour l’éternité et tu n’auras jamais honte devant lui’’.

Et Mme Kogne de marteler : ’’la virginité ça se garde. Ta mère ne te la donne pas, ton père non plus. Il faut se préserver jusqu’à ce que tu trouves un homme qui en vaut la peine’’.

Les filles, renchérit Diakha Diouf, doivent rester ‘’sages et savoir raison gardée. Il faut qu’elles connaissent leur valeur sinon elles seront malheureuses à vie’’.

Pour autant, relève Fatou, ‘’la virginité ne fait pas le bonheur dans un mariage mais elle y contribue pour beaucoup’’.

En effet, il faut autre chose pour cimenter la vie à deux, comme le reconnaît le sociologue Djiby Diakhaté qui parle ‘’de certaines influences qui se sont exercées sur la société’’. ‘’Aussi, on attend plus ce pagne tâché de sang. On est dans une société matérialiste. On a honte lorsque l’homme n’a rien et non pas la perte de l’hymen de la jeune fille’’, indique-t-il.

Selon lui, la faute est à ’’l’occidentalisation, la mondialisation, l’urbanisation et la scolarisation’’. ‘’Ces différents facteurs, déplore-t-il, ont provoqué des mutations sociales profondes. Notamment par la fragilisation des valeurs de la famille, l’individualisme et la liberté de la personne. L’individu fait ses propres lois, établit son propre idéal de vie. Dans un tel cadre social, on assiste à la libération sexuelle et le mariage n’engage plus les familles mais d’abord des individus’’.

Partant de là, le ’’laaban’’ tend à disparaître pendant que ‘’la sexualité hors mariage se généralise et devient de plus en plus précoce’’, constate le sociologue avant de dénoncer : ’’Il y a des hymens simulés et dissimulés. Ce n’est plus une honte pour la jeune fille ni pour sa famille. Les références ne sont plus fonctionnelles et la liberté individuelle est tirée du modèle occidental’’.

Ainsi, relève le sociologue, à cette ’’crise de la famille aggravée par le recul des valeurs, les difficultés économiques’’ est venue s’ajouter le fait que ’’l’Islam constitue une négation du +laaban+’’.

P.-S.

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