Le staff technique des « Lions » avait promis « un match d’attaque ». Il s’est dès lors cru en devoir d’aligner d’entrée 4 attaquants de pointe (Cissé, Sow, Ndoye et Bâ). L’équipe s’en trouva totalement déséquilibrée, ne gagnant même pas en efficacité offensive ce qu’elle perdait en densité dans son secteur médian. Car ce quatuor de « 9 » a beau essayer, par moments et à tour de rôle, de se replier pour tenter d’occuper les flancs ou de prendre le jeu à son compte, ce fut en pure perte. Parce que durant toute la première mi-temps, le Sénégal ne se créa que très peu d’actions dangereuses réellement construites ; seul Moussa Sow, sur un tir des 25 mètres (2ème mn) et un retourné acrobatique (41ème mn) ayant donné du boulot à Copa Barry, le portier ivoirien.
Le reste du temps ? Un jeu laborieux, d’une affligeante indigence technique et tactique. Les deux milieux de terrain, Diamé (un peu trop brouillon) et Gana Guèye n’arrivaient pratiquement jamais à mettre leurs avants en position d’inquiéter l’arrière-garde adverse qui, assurément, avait plus souffert chez elle à l’aller qu’à Dakar. La faute justement à ce choix tactique de Joseph Koto qui semblait avoir cloné le 4 – 4 – 2 qu’Amara Traoré, son prédécesseur au poste, avait aligné sur la même pelouse, en amical, face au Maroc, le 10 août 2011. Avec le même résultat : 2 – 0 pour les visiteurs, même si les Ivoiriens ont attendu la deuxième mi-temps pour planter leurs banderilles là où la première moitié de la période avait suffi aux Chérifiens.
Quelle mouche a donc piqué le sélectionneur des « Lions » pour qu’il troque le 4 – 4 – 2 qui avait tant fait mal aux « Eléphants » chez eux avec ce « dispositif à papa » qui ne semble plus prospérer que dans la tête de techniciens sénégalais ? En tout cas, son équipe a semblé avoir laissé son jeu à … Abidjan. Rien de plus normal au vu de la tactique adoptée. Papiss Cissé a été transparent, et dire qu’il a été meilleur que Demba Bâ. Et même s’il a été l’auteur des deux seules actions dangereuses dignes de ce nom, Moussa Sow a plus souvent joué à l’envers, perdant un nombre important de ballons offensifs. Dame Ndoye, lui, a plus été vu sur balles arrêtées, mais n’a jamais trouvé la combinaison capable de mettre le feu à la défense adverse, ses choix étant trop «téléphonés ». Sadio Mané qui, malgré quelques déchets dans son jeu, avait été un poison constant pour les Ivoiriens à l’aller, avait été « oublié » sur le banc. Moussa Konaté capable d’évoluer sur le même registre (tout en percussion offensive) n’avait pas non plus la faveur du sélectionneur.
Dans ces conditions, il ne restait plus qu’à transformer le « match d’attaque » en … match de défense, pour au moins essayer de ne pas perdre à défaut de pouvoir gagner. Or l’arrière-garde sénégalaise (avec l’efficace duo axial Kouyaté – Lamine Sané, un Pape Ndiaye Souaré tranchant offensivement et défensivement et Zargo moins bien loti) qui a pour l’essentiel contenu les rares velléités offensives ivoiriennes (l’exception de deux raids de Gervinho) a perlé par deux fois. Deux fois de trop. D’abord, avec ce mur poreux qui a laissé passer le coup franc de Drogba (51ème mn), ensuite sur cette percée de Yaya Touré ayant abouti au penalty (70ème mn) qui a mis le feu aux poudres.
Au total, cette équipe-ci du Sénégal était trop peu outillée pour retourner une situation déjà assez compliquée par le 2 – 4 pris à Abidjan. En fait, Koto ne s’est guère donné les moyens de son ambition de réussir l’exploit. Normal donc qu’il ait perdu.
B. K. N.
Chaos à Lss, le ministre des Sports parmi les blessés
C’est ce qu’on pouvait attendre de pire dans ce match à hauts risques. Des scènes de violence inédites qui obligent l’arbitre à interrompre le match Sénégal-Côte d’Ivoire alors que les « Eléphants » menaient par 2 buts à 0. Cette fois, le Sénégal risque gros.
On n’avait plus vu cela depuis un certain 18 septembre 2008, lorsque les Scorpions de la Gambie anéantissaient les espoirs de qualification du Sénégal à la Coupe d’Afrique des nations et au Mondial 2010. Le match nul (1-1) concédé alors à Dakar, par la bande à El Hadji Ousseynou, avait effacé le nom du Sénégal de toutes les compétitions internationales pendant près de quatre ans, entraînant des émeutes dans certaines parties de la capitale et le saccage du siège de la Fédération sénégalaise de football et d’une partie du stade Léopold Sédar Senghor. Samedi dernier, l’histoire s’est encore répétée dans presque les mêmes circonstances et le même lieu, avec des conséquences qui risquent, cette fois, de coûter très cher à notre pays.
Même si le siège de la Fsf a été épargné par la colère des supporters sénégalais, cela n’a pas été le cas pour le stade qui a complètement été mis sens dessus-dessous. Le stade Léopold Sédar Senghor a été transformé en un véritable champ de bataille. Des jets de pierres, des grilles arrachées, des chaises et des vitres cassées, le spectacle était ahurissant et la confusion générale. D’un côté, les supporters surexcités détruisant tout sur leur passage ; de l’autre, les forces de l’ordre et leurs grenades lacrymogènes, engagées dans une rude bataille pour limiter les dégâts et éviter le pire. Au milieu de ce décor digne des grandes affiches hollywoodiennes, se perdent les grandes vedettes de la soirée, les joueurs, subitement devenus des spectateurs de cette inédite et ahurissante scène. Le chaos était général et, dans une grande stupeur, les deux camps, entassés sur la pelouse pendant un long moment, regardaient d’un air médusé le feu embraser une partie des gradins du stade. Un décor à la fois « regrettable » et « honteux » s’indignent certains après qu’une poignée du public a brûlé le drapeau national.
Les manifestations ont fait plusieurs blessés dont le ministre des Sports, touché à la tête par un projectile. Plusieurs supporters ivoiriens ont également été touchés, une situation qu’a déplorée le ministre de l’Intérieur Mbaye Ndiaye, à la sortie des vestiaires des deux équipes. A l’origine de ces scènes de violence, la défaite (2-0), synonyme d’élimination dans la course à la Can 2013, des « Lions » face à la Côte d’Ivoire. C’est un pénalty transformé par Didier Drogba, déjà auteur du premier but sur coup de pied arrêté, qui a mis le feu aux poudres, obligeant l’arbitre à interrompre le match à un peu moins d’un quart d’heure de la fin. Cette fois, c’est une certitude : le Sénégal paiera très cher pour l’attitude de son public.
Wahany Johnson SAMBOU
lesoleil.sn