N’est pas président qui veut. Il faut en avoir l’envergure et la carapace. Le prochain locataire du palais fera beaucoup de gestion de crise et de conflit. Le pays qu’il va diriger a changé. Démographiquement d’abord. C’est le couteau à double tranchant. La vitalité veut dire qu’on n’est pas près de l’extinction. Elle s’oppose à la bombe à retardement qui risque d’exploser sans mesures d’accompagnement. Le premier grand défi pour le nouvel arrivant est de s’occuper du champ de ruines comportemental qui est le nôtre. Ce qui s’est passé avec la crémation d’un supposé déviant est le continuum d’un climat d’anarchie sans précédent. Sur la bonne terre du Sénégal, on n’en veut pas de l’acte contre-nature. Mais rien ne justifie le retour à l’état de nature. La barbarie a été nommée par qui de droit même si les qualificatifs d’indignation sont de plus en plus rébarbatifs.
Pour faire bonne mesure, il faut aussi montrer du doigt la chape de plomb de la crise d’autorité. Sans autorité ni fermeté, tout s’écroule. La discipline, la politesse, le respect, l’hygiène morale se démodent à force de démission et d’abandon de poste. Triste réalité sur fond de naufrage collectif. Les rafiots qui partent par vagues successives en quête d’eldorado et fuyant l’enfer sur terre constituent l’échec du siècle.
Pour le prochain sauveur sans arche de Noé qui arrive, ce sera presque la mer à boire. Les migrants qui s’en vont n’entendent plus raison. Des ornements ont été greffés à la place des oreilles. L’impéritie les a désabusés. Et puis, la chance ne leur a pas été donnée de lire Vingt mille lieues sous les mers du Nantais Jules Verne. Malgré le sous-marin Nautilus de Némo, le mystère des océans n’a pas été percé. Les profondeurs marines qui ne font pas moins de 5000 kms sont des piscines sans fond. Ne plus chercher à noyer le poisson, c’est renouer avec la soif de connaissance.
Dans un pays si jeune, le sujet n’est pas secondaire. Mais la méga-crise de l’université aux lumières éteintes et cette école qu’on bricole et rafistole sans cesse sont des patates chaudes pour le futur protecteur des arts et des lettres. Ces univers pas comme les autres qui sont en réalité des conservatoires sont le baromètre des sociétés en marche ou qui marchent à reculons. Quand ils fonction- nent, les passions sont moins tristes. En cas de dysfonctionnement, les attitudes sont toxiques. Malheureusement, le délabrement est plus proche de la réalité. Devant un tableau sombre, le 5ème président est attendu pour être un monstre de sang-froid obnubilé par le bon port pour tous loin des icebergs du Titanic.
Assane GUÈYE