En parvenant à décrocher l’autorisation de marche pour l’opposition, désamorçant, ainsi, la ‘bombe’ qui allait inéluctablement sauter le samedi 3 avril, Abdou Aziz Sy ‘Al Ibn’ est en passe de devenir l’homme par qui passe la stabilité sociale. Emboîtant, ainsi, le pas à son défunt oncle paternel, Abdoul Aziz Sy Dabakh qui a beaucoup œuvré pour la paix au Sénégal.
Le porte-parole du Khalife des Tidianes serait-il devenu le nouveau régulateur social dans notre pays ? Au regard des actes que ce dernier pose de plus en plus et qui impactent d’une certaine manière sur la vie de la nation, on est enclin à le croire. Le dernier en date est son intervention auprès du président de la République, le vendredi dernier, pour amener celui-ci à autoriser la marche des partis d’opposition regroupés au sein de Bennoo Siggil Senegaal et que le préfet de Dakar avait interdite quelques heures plus tôt.
Expliquant, sur le plateau de Walf Tv, les raisons de son implication dans ce qui était devenu le bras de fer entre le pouvoir et l’opposition, Abdoul Aziz Sy dit avoir agi sur les ordres du Khalife général des Tidianes, Serigne Mansour Sy qui lui a demandé d’intercéder auprès des deux parties pour éviter le pire. C’est ainsi, dit-il, qu’il a passé toute la soirée du vendredi 2 avril à jouer au médiateur en offrant ses bons offices pour arrondir les angles et éviter que la ‘bombe’ n’explose le lendemain. En effet, les choses étaient parties pour dégénérer puisque, malgré l’interdiction de l’autorité, Dansokho et compagnie étaient décidés à battre le macadam et prendre le contre-pied des festivités marquant l’inauguration du Monument de la Renaissance africaine. Le dispositif policier mis en place devant l’Ecole normale supérieure, dès les premières heures de la matinée du samedi, en disait long sur la répression qui allait s’abattre sur les leaders de l’opposition et tous leurs fidèles qui avaient pris sur eux de défier l’autorité. Un tel scénario aurait fait l’affaire de l’opposition sénégalaise puisque l’arrestation de Tanor, Bathily, Dansokho, Macky, etc. aurait, à coup sûr, éclipsé la fête autour de l’inauguration du monument cher à Wade. Imaginez ces leaders de l’opposition en prison avec des manifestations de leurs militants émaillant leur arrestation, nul doute que la presse nationale et internationale en ferait ses choux gras au point de mettre très mal à l’aise le président devant ses nombreux pairs africains qui s’étaient donnés rendez-vous le 3 avril dernier à Dakar. C’est dire que Bennoo a raté le coche et que Me Wade s’est bien frotté les mains.
Mais Abdoul Aziz Sy Al Ibn aura été le grand bénéficiaire de cet apaisement politique entre le pouvoir et l’opposition. Car, même si le marabout soutient qu’il agit dans l’intérêt du pays et non point pour quelque profit que ce soit, force est de reconnaître que le porte-parole du Khalife général des Tidianes se positionne, aujourd’hui, en véritable régulateur social. Non seulement, il a permis à l’opposition de marcher en toute tranquillité, mais, il tire Wade et ses partisans d’affaire en leur permettant de faire la fête du côté de Ouakam sans être inquiétés et sans que la stabilité sociale n’en pâtisse. A entendre le nombre de personnes qui sont intervenues en direct sur le plateau de Walf Tv qui a improvisé un débat sur la médiation du marabout de Tivaouane, on réalise à quel point l’on s’attache à la paix dans ce pays. En se voyant accepter comme médiateur du dialogue politique par l’opposition, prompt à rejeter toute proposition émanant de Wade dans le choix des hommes devant servir de jonction entre les parties adverses, Abdou Aziz Sy Al Ibn a fini de se donner du crédit au niveau de la classe politique. Reste à savoir si avoir l’onction de l’opposition pour l’ouverture de discussions avec le pouvoir est synonyme d’un gage de succès du dialogue politique longtemps agité mais jamais réalisé depuis l’avènement de l’alternance au Sénégal. Peu importe l’issue des pourparlers, soutiennent quelques proches du marabout, l’essentiel étant que ce dernier soit parvenu à rapprocher l’opposition et le pouvoir en les mettant autour d’une table pour discuter de l’intérêt du pays.
Comme pour apporter la réplique à ceux qui fustigent l’implication des religieux dans les choses politiques, ‘Junior’ a soutenu que la religion a toujours eu un droit de regard sur le pouvoir temporel et cela date, selon lui, de l’époque coloniale. ‘Un séminaire organisé à Gorée avait regroupé des autorités coloniales et des chefs religieux du Sénégal et de la sous-région. Ces derniers devaient expliquer au pouvoir colonial la démarche à entreprendre pour pouvoir diriger dans la paix nos Etats. A la fin de la rencontre de sept jours, la méthode retenue était : politique douce sans faiblesse, effort sans violence’, a confié Al Ibn. Selon qui, ‘le bâton ne gouverne pas le Sénégal mais l’intelligence’.
Abdou Aziz Sy Al Ibn est-il en train de suivre les pas de son défunt oncle paternel et non moins homonyme ? Tout porte à le croire car nombre de Sénégalais sont d’avis que si notre pays a réussi à dépasser certaines crises politiques du temps du vivant de Abdoul Aziz Sy Dabakh, c’est que le défunt Khalife général des Tidianes savait bien s’acquitter de son rôle de régulateur social en dénonçant, quand il le fallait, la dépravation des mœurs et en appelant la classe politique et les forces sociales à la raison quand cela s’avérait nécessaire. Les sorties de Dabakh sur les ondes des radios étaient aussi attendues que captivantes.
Mais entre les deux ‘Abdoul’, il y a eu la page Thierno Mountaga Tall qui a, également, eu à œuvrer pour la stabilité sociale de notre pays. C’est ainsi qu’il aida à la libération de Abdourahim Agne et de Jean Paul Dias, alors emprisonnés respectivement pour appel à la révolte populaire et pour diffusion de fausses nouvelles, menace de mort et outrage à magistrat.
Aguibou KANE
walf.sn