Les hommes politiques sénégalais ont, entre autres faiblesses, celle de ne léguer à la postérité que des discours. En proposant ce livre de 500 pages, Thierno Alassane Sall rompt avec une tradition politique pauvre en témoignages écrits. Au-delà de la question de l’objectivité et de la véracité des propos qui y sont tenus, ce livre est une mine précieuse d’informations. Comme tout vestige historique, les révélations faites par Thierno Alassane Sall devront être soumises à l’exigence de critique, mais on peut d’ores et déjà saluer l’initiative qui aura le mérite d’aider à ne pas enterrer certains dossiers et certaines pratiques. Nous n’accordons pas a priori une présomption d’innocence et de véracité à l’auteur, nous souhaitons seulement contribuer au débat sur les graves questions qu’il soulève.
S’il est vrai, comme le dit Winston Churchill, qu’un « peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre », TAS offre ici une opportunité historique aux prochaines générations de juger beaucoup d’hommes politiques sénégalais de l’indépendance à nos jours. Et quand je dis juger, c’est à la fois sur le plan moral et sur ce lui juridique : car, on y reviendra plus tard, certains faits relatés ici pourraient servir de prétexte à une justice libre de s’auto-saisir. Ecrire, c’est se dévoiler pour ceux qui savent lire le texte et les non-dits du texte : sous ce rapport, TAS a fait preuve de courage.
Nous ne parlerons pas ici de la polémique stérile engagée par les militants de l’APR qui s’inscrit davantage dans l’invective que dans la défense argumentée. Trois acteurs constellent le ciel sombre de la mésaventure de TAS à l’ASECNA : Wade, Farba Senghor et des directeurs de société. Ces derniers, jaloux de leur position de privilèges préfèrent souvent les sauvegarder plutôt que de se battre pour l’intérêt du pays. Ils ne savent pas dire non à leur supérieur hiérarchique et ils s’accommodent à tous les régimes. En lisant ce livre on en a une illustration vivante.
En s’attaquant si brutalement à l’ASECNA pour une prétendue situation de rentes aux dépens du Sénégal, Wade a adopté la même posture lorsqu’il s’est agi de dénoncer l’accord qui veut que le directeur de la BECEAO soit un ivoirien. Les organisations sous-régionales obéissent à des clauses pas forcément démocratiques, mais c’est le prix à payer pour une intégration réussie. La diplomatie ne s’accommode que médiocrement avec les accès de colère et les sautes d’humeur.
Mais la crise qu’a soulevée cette menace de Wade de quitter l’ASECNA aurait certainement eu une tournure moins tragique s’il n’y avait pas un personnage comme Farba Senghor en tant que ministre des transports aériens. Si Farba Senghor n’existait pas, du moins en tant que ministre, peut-être que TAS n’aurait pas le destin politique qu’il eu à partir de 2012. Un ministre qui appelle un directeur pour le menacer d’emprisonnement sans aucune base légale montre qu’il n’est pas digne de son poste. Deux phrases suffiront à cerner la personnalité de ce monsieur dont la nomination au poste de ministre est probablement le plus grand scandale politique de l’histoire du Sénégal.
La première, c’est son discours en totale infraction des principes de la diplomatie à Libreville : un chantage du genre « vous obtempérez à nos requêtes ou le Sénégal pourrait quitter l’ASECNA » ! La deuxième est une affirmation purement politicienne « les conventions et accords sont des liens par lesquels les socialistes ont permis à ce que notre pays soit encore dominé depuis plus de 40 ans. Je vous dis ce que j’ai dit à X (il cite le nom d’un cadre sénégalais éminent dans une institution financière internationale), il ne faut pas que vos positions dans les organisations internationales vous fassent oublier les intérêts du pays ».
Et comparez ce propos à ce qu’il a dit juste avant « LORSQUE LE SENEGAL AURA CHASSÉ CES GENS DE L’ASECNA VOUS POURREZ PRENDRE POSSESSION CHACUN DES VILLAS QUE VOUS OCCUPEZ AU TITRE DE VOS FONCTIONS ». En plus d’avoir contredit son patriotisme de surface, ce ministre très étrange tente la corruption comme moyen de rallier à la « cause » du Sénégal un cadre de l’Agence qu’il menace de quitter pour l’intérêt du Sénégal !!!
Bref, sans Farba Senghor et ses frasques, les trois premiers chapitres du livre de TAS n’existeraient pas. La nomination de ce monsieur dans un gouvernement est à coup sûr la plus grande agression contre la république du Sénéga. Quand les médiocres font des émules, l’excellence et la vertu en prennent un sacré coup. C’est ce monsieur coupable de tous les excès sous Wade qui est aujourd’hui souteneur de Macky Sall. Voilà qui donne sens à l’adage « qui se ressemblent s’assemblent ».
Alassane K KITANE
Je pense que farba senghor ne tardera pas à donner sa version. mais d’après certaines coupures de journaux sur ce livre je ne pense pas que farba avait totalement tort sur l’asecna peut être la manière laissait à désirer vu le comportement de farba mais sur le fond il avait un peu raison.