Élèves neuf mois, domestiques pendant les vacances
Fatou Ngom, Véronique Gningue et Déguène Diouf ont un point commun : chaque année, dès la fermeture des classes, ces trois élèves rangent leurs cartables pour prendre leurs valises et la direction de Dakar. Durant les vacances scolaires, elles sont domestiques dans la capitale. Une façon de gagner l’argent qui leur permettra de préparer la rentrée. SenePlus.Com a donné la parole à ces combattantes de la dignité et de l’indépendance. Reportage.
Une fin de matinée ordinaire au rond-point de Liberté 6. Les dizaines de jeunes filles, d’origines diverses, qui squattent au quotidien les abords de la station service du coin, ont fini de s’incruster dans le décor. Elles attendent patiemment une offre d’emploi de domestique. A temps plein ou partiel. Une partie d’entre elles est constituée de ‘’bleues’’, pour l’essentiel des élèves originaires de l’intérieur du pays et à la recherche d’un poste, juste pour les vacances. Un moyen d’amasser une fortune pour parer à leurs dépenses personnelles liées à la prochaine année scolaire et supporter une partie des charges de leurs familles respectives.
Moins âgée que les autres, pour la plupart, ces jeunes filles scolarisées ont une détermination à toutes épreuves. Le soleil les accable, mais échoue à faire fondre leur claire intentions à atteindre leur but. Debout ou assises sous les arbres au feuillage fourni, sur les bancs publics, les rebords des trottoirs et les devantures des maisons, elles s’échangent leurs expériences quotidiennes et spéculent sur l’avenir, avec parfois un optimisme qui dépasse celui d’un paysan à l’approche d’un hivernage pluvieux.
Elles s’imaginent toutes se dandinant à l’intérieur des villas et appartements alentours ou, pour les plus chanceuses, dans les beaux quartiers de la capitale. Elles se voient en train de faire le ménage, la vaisselle, le linge, la cuisine, du baby-sitting et toutes ces taches ménagères dévolues aux domestiques.
Mouchoir de tête bien noué, Fatou Ngom, 15 ans, frêle silhouette, affiche un entrain débordant. Cette année, elle reprenait sa classe de troisième. Non pas qu’elle avait échoué au Bfem, mais plutôt elle n’avait pu décrocher la moyenne annuelle requise pour passer en classe supérieure. Cette année était la bonne. Elle espère trouver un emploi de domestique pour les trois prochains mois et ainsi pouvoir se constituer une épargne qui lui permettra d’engager sa première année de lycée dans de bonnes conditions.
Ainsi née une vocation
Originaire de Mbouma (région de Fatick), Fatou Ngom débarque dans la capitale depuis trois ans pour un emploi de saison. ‘’Depuis 2010, je suis obligée de quitter ma famille pour venir travailler à Dakar pendant les vacances, informe-t-elle avec fierté. Mes parents n’ont pas les moyens de nous payer les fournitures scolaires, mes frères et sœurs, et moi. L’essentiel de l’argent que je gagne sert à ça. Ensuite avec, je me paie quelques vêtements et, s’il me reste un peu d’argent, quelques effets de toilette.’’
Si une domestique peut gagner jusqu’à 125.000 francs Cfa en trois mois, elle devra se préparer à trimer. Exemple, se lever aux aurores avant tout le monde. ‘’Dans les maisons où j’ai eu à travailler, je me levais à 5h30 du matin, sauf les dimanches. Je faisais le ménage, la cuisine, les courses et plein d’autres taches. Cela me prenait toute la journée, mais je n’ai pas le choix. J’habite dans un village qui manque de tout. Pendant la saison des pluies, beaucoup d’enfants meurent à cause du paludisme. Quand une personne est malade, elle doit parcourir des kilomètres pour se faire consulter par un infirmier.’’
Fatou Ngom, qui se dit ‘’préoccupée par les conditions des femmes et des enfants’’ dans son village, veut devenir médecin. Elle voudrait exercer chez elle : ‘’Quand je serai médecin, se projette-t-elle, j’aimerais servir dans ma localité pour venir en aide aux populations, surtout les femmes qui meurent pendant l’accouchement.’’ Ainsi née une vocation.
Autre élève, mêmes conditions sociales difficiles, même rêve de voir le bout du tunnel : Déguène Diouf, 19 ans, ambitionne de mettre fin, entre autres difficultés, à la soif de Mbassisse (Fatick), son village d’origine. ‘’Chez moi, nous faisons face à un manque d’eau et de moulins. Pendant la saison sèche, nous parcourons les villages voisins à la recherche du liquide précieux. Mon vœu le plus cher est de trouver un travail qui peut me permettre de résoudre ce problème. Je sais que pour y arriver je dois d’abord réussir dans mes études.’’
Déguène Diouf passe en classe de première à la rentrée. Si elle est arrivée à ce niveau dans les études, c’est grâce au travail de domestique qu’elle fait depuis l’âge de 13 ans, durant les grandes vacances scolaires. ‘’Mes parents n’ont pas assez de moyens pour payer mes frais de scolarité, informe-t-elle. L’argent que je gagne en travaillant m’a permis d’avoir une sécurité financière pour poursuivre mes études.’’
Attention au côté obscur de la force
Véronique Gningue, 20 ans, relève son charme discret par sa beauté éclatante. Elève en classe de terminale, à la prochaine rentrée, elle s’accroche aux études pour échapper au mariage précoce. ‘’Chez moi, à Fissel, la plupart de mes camarades abandonnent les études pour le mariage. Je ne veux pas vivre la même situation, confesse-t-elle dans un français impeccable. Si j’arrête les études, je risque de me retrouver avec un mari. Et le pire est que je peux épouser un homme que je n’aime pas. Nous sommes obligées de faire ce travail, qui est très pénible, parce que le succès dans nos études dépend de notre indépendance financière. Nos parents ne peuvent pas nous payer nos fournitures.’’
Le travail de domestique comporte beaucoup de risques : exploitation, humiliation, maltraitance et, parfois, harcèlement sexuel, voire viol… Il faudra éviter de se retrouver du côté obscur de la force. ‘’J’ai mal quand je vois des employeurs qui se croient supérieurs à nous. Nous subissons des injustices, dénonce Véro. Certains patrons, pour ne pas te payer, peuvent t’accuser de vol, d’autres essayer d’abuser de toi. Il faut être forte et courageuse pour faire ce travail, loin des tiens.’’
Avant d’aller rejoindre ses camarades, à l’ombre d’un arbre, Véronique Gningue a tenu à faire cette confession : elle jure que sa fille ne suivra pas ses pas. Elle fera le chemin à sa place, travaillera dur pour l’écarter des nombreux pièges qu’elle a déjoués sur sa route.
seneplus.com
L’imade a elle seule résume le sénégal.
Ce type d’image ne se voit que dans les pays sous developpé et corrompus.
On y voit les constructions hors normes, sans autorisation dans des conditions anormales, on y voit également que la mairie de la localité ne fait pas son travail, les gravats sont jetés à même le sol, la rue.
La saleté se dévine aisément.
Pauvre sénégal, pays corrompu