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Le vieux politicien à Kaolack : les mêmes balivernes qu’à Thiès Par Mody Niang

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Le vieux candidat poursuit ses randonnées électoralistes avec, en bandoulière, les mêmes promesses dont certaines, plus que démagogiques, frisent carrément le ridicule. Ainsi, après Thiès le jeudi 5 janvier 2012, il a fait une visite éclair à Kaolack et principalement à la famille Niassène de Médina Baay. Comme chaque fois que l’opportunité lui est offerte, il s’est défoulé sur l’opposition et l’accuse de volonté affichée de brûler le pays. Il se laisse ensuite aller à son jeu favori : faire des promesses dont il est sûr qu’elles ne seront pas le moins du monde tenues. Pour convaincre le lecteur et l’électeur potentiel de la mauvaise foi de notre vieux président, reproduisons une bonne partie du discours qu’il a tenu devant le khalife de Médina Baay (« L’Observateur » des samedi 21 et dimanche 22 janvier2012, page 6) ! S’adressant à la foule venue l’accueillir, il déclare avec aplomb : « Je me suis entretenu avec le khalife et il m’a dit que sa préoccupation c’est Kaolack. Je lui ai dit que, autant que je me souvienne, personne ne s’est jamais occupé de Kaolack, personne n’a jamais voulu s’occuper de cette ville. Depuis 1978 (sic), lors de ma première législature à l’Assemblée nationale, j’ai toujours dénoncé cela. Á l’assemblée, je m’en prenais souvent aux députés Kaolackois pour critiquer leur manque d’engagement pour cette ville-carrefour qui pourrait être la capitale économique du Sénégal. Kaolack pouvait être une belle ville, mais malheureusement, on n’y a rien investi. » Notre Waax waxeet ne s’arrête pas en si bon chemin. Il poursuit sans sourcilier son cinéma en ces termes : «L’avenir de Kaolack dépend d’abord des Kaolackois, mais personnellement, j’ai l’ambition de changer la face de cette ville comme je l’ai fait avec Ziguinchor où j’ai construit des dizaines et des dizaines de kilomètres de route. Mais, pour faire de Kaolack une ville moderne, il faut déplacer les gens qui habitent dans les zones inondables pour les recaser ailleurs. » Notre fabuliste national, se voulant plus convaincant encore, révèle : « Je discutais tout de suite avec le Premier Ministre Souleymane Ndéné Ndiaye et Me Madické Niang (…). Je leur disais que Kaolack était un ancien fort. Et avec le temps, les principaux canaux d’évacuation des eaux se sont bouchés et les eaux ont commencé à stagner dans certains coins de la ville. » Il fait état d’amis – encore ces fameux amis sans visage – qui lui avaient soumis leur aide pour curer les canaux d’évacuation mais qu’il estimait que ce n’était pas la bonne solution. « Ce qu’il faut faire, de l’avis notre « Monsieur connaît tout », « c’est rendre Kaolack plus attractif en y érigeant un grand port ». « Et je  sais comment le faire », affirme-t-il sans ambages. L’omniscient, l’ingénieur des ponts et chaussées expose donc sa solution : « Il faut construire un pont de 4 kilomètres pour que les bateaux puissent arriver à Kaolack et participer à faire de la ville le poumon économique du Sénégal. C’est la même chose que ce qui s’est fait à Singapour (et) ce sera une sorte de réplique du pont de Singapour. » « Ce ne sont pas des promesses », rassure-t-il, puisque lui-même n’y croit pas le moins du monde. « Je peux commencer ce projet demain, demain », conclut-il enfin, gaillardement.

C’est bien Abdoulaye Wade qui s’exprimait ainsi, sans état d’âme. Il s’intéresse au sort de Kaolack depuis 1978, et voilà qu’il promet, qu’il promet seulement aujourd’hui, de faire de cette ville une ville attractive, la capitale et le poumon économiques du Sénégal, alors qu’il est président de la République depuis douze ans ! Le khalife de Médina Baay est quand même un homme de raison. Il n’est surtout pas né de la dernière pluie. Malgré le respect pour le président de la République que sa charge lui impose, il ne fait aucun doute qu’il sait que son « illustre » hôte lui raconte des bobards. Il sait parfaitement que Touba et Tivaouane attendent encore leurs 100 milliards, que la Mosquée Guy Masaalik al jinaan dont il s’engageait publiquement à prendre en charge le financement n’a jamais dépassé le stade de la pose de la première pierre de ce mercredi 30 novembre 2005. Touba a encore soif, malgré son engagement à régler définitivement le problème de l’eau dans la ville sainte, en faisant venir le liquide précieux du Lac de Guiers, grâce au Canal du Baol. Á l’occasion du grand Magal de 2011, nous apprenons du Président de la République et de son Ministre d’État Madické Niang, que ce projet a cédé la place à un autre : l’exploitation de la très étendue nappe de Touba Bogo, qui « peut alimenter une ville de six millions d’habitants pendant cent ans ». Touba attend aussi son assainissement. Lors du dernier hivernage qui n’a pas été pourtant particulièrement pluvieux, la ville sainte était noyée dans les eaux de pluie. Si Médina Baay, son khalife et ses populations comptent donc sur les promesses volatiles du « Père Noël » sénégalais, ils attendront très longtemps.

Le vieux candidat compte toujours sur notre naïveté et sur notre penchant à vite oublier. Sinon, il n’aurait jamais eu le courage de faire encore des promesses à Kaolack. Rappelons quand même, malgré notre amnésie que, à l’occasion de l’une de ses rares tournées à l’intérieur du pays en dehors des campagnes électorales, il est reçu à Kaolack, en juin 2004. Il s’engage fermement à assainir la ville puisque, en bon politicien, Il sait que la première priorité des Kaolackois et des Kaolackoises, c’est l’assainissement de leur ville. Et il s’adresse aux populations en ces termes [1] : « Il faut que Kaolack devienne une ville moderne. Toutes les zones d’inondations, excepté les lieux où on récolte le sel, doivent être transformées en zones de pisciculture. » Il ajoute, à l’intention des familles qui habitent dans ces localités : « Il faut déplacer ces familles parce que cette ville a besoin d’un programme d’assainissement extrêmement important. Les zones inondées, il faut absolument les enlever. Les plans d’eau seront alors transformés en lac artificiel au lieu de les laisser dans cette pourriture» L’élection présidentielle de février 2007 n’étant plus très loin et rien n’ayant été réalisé de ses promesses de juin 2004, il revient à la charge et reconnaît encore publiquement que Kaolack était « une ville oubliée et mal structurée », et qu’il ferait appel à son « ami » français François Léotard (ancien ministre des Forces Armées du Gouvernement Balladur reconverti dans les affaires et ayant eu maille à partir avec la Justice française), « pour résoudre définitivement le problème de l’assainissement et de l’insalubrité de la ville ». Rien ne sera pourtant fait, même après sa réélection en 2007. Quelque temps après, Monsieur Salif Ba, alors Ministre de l’Habitat, de la Construction et du Patrimoine bâti, revient sur cette « priorité » du chef de l’État dans une conférence publique présentée au quartier général du Pds, et qui avait pour thème : « Kaolack face au défi de l’assainissement, de l’environnement et du cadre de vie. La vision du chef de l’État Me Abdoulaye Wade» D’emblée, M. Ba lance : « François Léotard viendra à Kaolack dans les prochains jours. Une mission française a déjà effectué une visite de prospection des lieux en avril 2007. » Et notre Ministre de préciser alors que les travaux de ce projet du Chef de l’État sont estimés à plus de 10 milliards de francs Cfa, et que le financement est entre les mains du Président qui va suivre les travaux (sic). Le Ministre égrènera ensuite un chapelet de maladies épidémiques causées par l’insalubrité. Voilà donc dans quelle situation se trouvait Kaolack, « Kaolack (qui) a atteint aujourd’hui un niveau d’insalubrité et de dégradation très difficile à relever et qui a fini d’installer les populations dans un environnement malsain et dans un profond malaise », reconnaît le Ministre Ba (« Le Quotidien » du lundi 29 octobre 2007).

La priorité pour la ville de Kaolack ne faisant donc point l’ombre d’un doute et malgré les promesses qui ont été faites, le Ministre Salif Ba et son Président-magicien ont préféré se lancer dans un gros projet dit d’embellissement : la réalisation d’un « Cœur de ville », pour 6 milliards de francs Cfa. Nous sommes à quelques jours de 2012 et le chantier coûteux de ce fameux « Cœur de ville » dont M. Ba était le maître d’œuvre, est loin d’être encore terminé. Ce « Cœur de ville » de Kaolack  est un autre gros scandale de la détestable gouvernance des Wade. Ce texte étant déjà long, je ne peux malheureusement pas développer le scandale ici. Je renvoie donc le lecteur intéressé au chapitre VIII de mon dernier livre (pp.203-228).

Pour revenir au « messie » français qui devait assainir Kaolack, il s’est purement et simplement volatilisé. Les pauvres Kaolackois risquent de ne plus jamais en entendre parler. Le « Père Noêl » sénégalais arrive à Kaolack avec un tout nouveau lièvre dans sa besace. Nous sommes le vendredi 26 février 2010, jour du Maouloud. Il se rend à Médina Baay, pour marquer de sa présence l’important événement religieux et le fêter avec la famille Niassène. Dans sa déclaration, il se désole que la destination de Kaolack soit invendable à l’étranger et annonce aux populations qu’il compte remettre cette fois-ci, la gestion de l’assainissement de la ville aux Coréens, quand ils auront terminé la construction du Monument de la « renaissance » africaine. La construction du fameux et coûteux monument n’est-elle pas terminée depuis deux ans au moins ? Où sont les fameux Coréens ?

En attendant, il continue son jeu favori de promesses sans lendemain. Après Madina Baay, il va procéder à l’inauguration officielle du « Pôle industriel et textile de Kahone (Politexka) ». Il magnifie le travail déjà abattu par le Gouvernement qui a pris la ferme décision de relancer la filière textile du pays. Et il se lance, avec l’emphase qu’on lui connaît, dans le développement de tous les atouts dont recèle le pays pour réaliser cette relance. « Ces atouts tournent, entre autres, autour d’un marché textile local et régional immense et dynamique, un parc industriel en état de marche et technologiquement d’actualité, un coton sénégalais de qualité et compétitif ». Ce serait intéressant, si l’espace le permettait, de poursuivre la présentation alléchante de ce tout nouveau « Pôle industriel et textile », à laquelle le « traître repenti en service commandé », Me Ousmane Ngom, alors Ministre d’État, Ministre des Mines, de l’Industrie et de la Transformation des produits agricoles, ajouta son gros grain de sel. Nous connaissons la suite.  Le rêve des populations et des travailleurs de Kaolack et de Kahone s’est terminé en cauchemar. L’unité industrielle « ressuscitée » n’a « fonctionné » que pendant trois mois. Entre temps, le Directeur (de nationalité française) Jean-Marc Secondi a pris la clé des champs, en laissant sur place quatre à cinq mois d’arriérés de salaires. L’usine sera reprise par Serigne Mboup, patron de la Ccbm et président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Kaolack. Face à une situation qu’il considère comme intenable et un « passif qui ne (le) concerne guère », il a voulu jeter l’éponge mais les travailleurs ne l’ont pas entendu de cette oreille et, aux dernières nouvelles, avaient exprimé leur volonté de se battre jusqu’à la mort.

Comment l’homme a-t-il donc eu le courage de venir encore devant les Kaolackois, pour leur faire les promesses du vendredi 20 janvier 2012, pratiquement les mêmes depuis juin 2004, lui qui s’en prenait déjà depuis 1978  aux députés kaolackois, pour critiquer leur manque d’engagement pour leur ville ? On a beau me reprocher mon « acharnement » sur l’homme, je ne peux pas rester indifférent aux balivernes qu’il nous raconte depuis douze ans, depuis exactement le 8 août 1974, date de la création de son Parti de contribution ! Celui que l’on appelle wax waxeet depuis le 23 juillet 2011 n’est plus dans la peau d’un président de la République. Il ne l’a jamais été d’ailleurs. Il donne l’impression de n’avoir de respect pour aucun d’entre nous, sauf peut-être pour sa famille nucléaire. En réalité, c’est pour sa propre personne qu’il n’a aucun respect. S’il avait le don de pénétrer jusque dans nos cœurs et dans nos esprits, il se rendrait compte à quel point le général de Gaulle avait raison, quand il tenait les propos qui suivent : « Il vaut mieux partir cinq ans trop tôt qu’une minute trop tard. » Il prendrait alors la seule décision raisonnable qui lui reste, pour sauver encore ce qui peut l’être des meubles : renoncer à sa candidature et nous laisser reconstruire notre pays, qu’il a mis en lambeaux pendant ses longues douze années de gouvernance meurtrie. Il n’est malheureusement pas donné à tout le monde d’être le général de Gaulle. Encore moins à un Abdoulaye Wade, ce (presque) nonagénaire dont la parole ne vaut plus un seul copeck

Mody Niang, e-mail : [email protected]



[1] Le Quotidien des 19-20 juin 2004, page 3.

 

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