Dans votre édition en date du Lundi 26 Octobre 2015, vous avez, sous la plume de Monsieur Madiambal Diagne, publié une chronique intitulée «La Crei en reforme».
M. Diagne y écrivait notamment :
«L’Etat du Sénégal viole ses lois en décidant déjà de la confiscation des patrimoines des personnes condamnées par la Crei.
En effet, la conservation foncière a fini de muter au nom de l’Etat du Sénégal, des biens immobiliers considérés appartenir à Bibo Bourgi par exemple.
La procédure apparaît on ne peut plus illégale dans la mesure où l’arrêt de la Crei, condamnant notamment Karim Wade, Bibo Bourgi et Pape Mamadou Pouye, n’est pas encore définitif pour cause de procédure de rabat d’arrêt en cours, initiée depuis le 25 Août 2015 par les conseils de Bibo Bourgi.
La loi organique 2008-35 du 7 Août 2008 portant création de la Cour suprême dispose dans ses articles 51 et 37 qu’en matière pénale, la procédure en rabat d’arrêt suspend l’exécution des effets de l’arrêt en cause, à l’exception des condamnations civiles.
En l’espèce, l’Etat du Sénégal ne peut, avant le sort définitif réservé à la demande en rabat d’arrêt, au plus qu’exiger le paiement des dommages et intérêts pour un montant de 10 milliards de francs Cfa prononcés par la Crei. Or, en procédant à la mutation des biens immobiliers, l’Etat exécute la confiscation des biens ordonnée par la Crei.
Il s’y ajoute que certains des biens immobiliers sont inscrits au nom de personnes privées qui n’ont pas été installées dans la cause jugée par la Crei.
La démarche apparaît ainsi doublement comme une forfaiture. »
Réagissant à cette chronique, M. Antoine Diome, ci-devant Substitut du Procureur Spécial près la Crei et présentement Agent Judiciaire de l’Etat a suggéré à M. Diagne, un article intitulé Antoine Diome se justifie par les erreurs de la défense que vous avez publié dans votre édition n° 3818 de ce mercredi 28 octobre 2015.
Cette réaction de Monsieur l’Agent Judiciaire de l’Etat nous oblige, en notre qualité de défenseurs de M. Ibrahim Aboukhalil dit Bibo Bourgi, d’apporter la réplique suivante.
Tout d’abord, il ne sert à rien de se défouler sur les avocats de M. Ibrahim Aboukhalil dit Bibo Bourgi.
Voici la réalité des faits, très simple, voire triviale :
Monsieur l’Agent Judiciaire de l’Etat reconnaît que la requête en rabat d’arrêt déposée à la Cour suprême le 25 août 2015 par M. Ibrahim Aboukhalil dit Bibo Bourgi suspend l’exécution de la confiscation, qui est une sanction pénale.
Pour justifier a posteriori la confiscation qu’il a faite le 18 septembre 2015, il prétend qu’il n’a eu connaissance de la requête que le 20 octobre 2015, date à laquelle il a reçu une signification qu’il veut faire passer aux yeux de l’opinion publique comme tardive.
Une première objection réside dans le fait que cette signification qui lui a été adressée, l’a été dans le délai de 2 mois prescrit par la loi, elle n’est donc pas tardive.
Une deuxième objection réside dans le fait que le Procureur spécial près la Crei, à qui incombe l’exécution des sanctions pénales, a, lui, reçu signification de la requête aux fins de rabat d’arrêt dès le 25 août 2015 comme le prouvent les deux actes que nous joignons au présent droit de réponse.
Monsieur Antoine Diome, Agent Judiciaire de l’Etat (qui n’est que partie civile) et ses avocats se sont donc substitués au Procureur spécial près la Crei pour faire procéder le 18 septembre 2015 à la confiscation de biens dont l’exécution était pourtant suspendue par la requête aux fins de rabat d’arrêt déposée par M. Ibrahim Aboukhalil.
Une troisième objection, tout aussi décisive, réside dans le fait que l’exécution de l’arrêt du 23 Mars 2015 de la Crei est également suspendue par le pourvoi en cassation déposé par M. Ibrahim Aboukhalil devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’Abidjan (Ccja).
De ce pourvoi en cassation, M. Antoine Diome, Agent Judiciaire de l’Etat et ses avocats ont été dûment informés, d’abord par lettre du 3 août 2015, donc avant même le prononcé de l’arrêt rendu par la Cour suprême le 20 août 2015, ensuite par une notification officielle de la Ccja elle-même, ce qui leur a permis de déposer un mémoire en réponse.
Du caractère suspensif de ce recours devant la Ccja, nous avons également pris le soin d’entretenir le Procureur spécial près la Crei et le Procureur général près la Cour suprême, par lettre en date du 20 août 2015 dont nous vous adressons également copie.
En définitive, l’allégation de Monsieur l’Agent Judiciaire de l’Etat, selon laquelle la signification du rabat d’arrêt serait tardive et que la confiscation des biens -y compris ceux appartenant à des personnes morales extérieures à la procédure, qui n’ont donc pas été condamnées- serait régulière, est, pour dire le moins, une affligeante contrevérité.
En effet, par quelque bord que l’on examine cette affaire, la confiscation des biens ne pouvait être effective avant l’examen (et le prononcé des arrêts) par la Cour suprême du Sénégal et la Ccja de la requête en rabat d’arrêt et du pourvoi en cassation déposés devant lesdites juridictions.
La chronique publiée le 26 octobre 2015 sous la signature de M. Madiambal DIAGNE garde donc à la fois toute sa pertinence et toute son actualité.
Les avocats de Aboukhalil Bourgi : Maître Papa Laïty NDIAYE – Maître Baboucar CISSE – Maître Moïse Mamadou NDIOR
Avocats à la Cour
L’enjeu reste le pouvoir de Macky. Il faut voir qu’à ce stade des choses il ne peut plus reculer dans le mal. Alors un changement de pouvoir pour juger la justice de Macky Sall avec lui.