Les dérapages des abonnés du « kheud »

Le repas du petit matin préparant le jeûne est l’occasion saisie par certains pour s’adonner à toutes sortes de dérapages dans les quartiers. Beaucoup veillent la nuit entière pour pouvoir prendre le « Kheud » et dormir toute la journée.
Après la coupure, certains jeûneurs restent impuissants, à toutes les provisions qu’ils entassent. Mais ils auront l’occasion de le rattraper avec le « kheud » (repas du petit matin). Le menu du « kheud » varie d’une famille à  l’autre. Dans certains foyers, c’est de la bouillie du mil (« fondé »), ou du « thiakry ».
D’autres familles réchauffent le riz restant du dîner. Tout dépend du pouvoir d’achat de chaque famille. Mais toutefois, l’objectif reste le même, le « kheud »permet de remplir le ventre pour pouvoir tenir la privation jusqu’au soir.
Du fait de ce changement d’habitude, il n’est pas du tout évident, pour certains, de respecter le rendez-vous du petit matin. C’est le cas d’Amadou qui a raté le « kheud » au premier jour du Ramadan. « Au premier jour, je n’ai pas  pu me lever parce que j’avais déjà perdu l’habitude depuis la fermeture des classes. Je me suis levé à 10 heures et j’ai enchaîné avec le jeûne. Mais j’avais l’impression, ce jour-là, que la journée était devenue plus longue que d’habitude ».
Depuis ce jour, Amadou et ses amis, habitants tous les Parcelles assainies, ont adopté un style de vie Ramadan.  «Maintenant, nous nous donnons rendez-vous ici (devant une boutique à l’Unité 02 des Parcelles assainies), mes amis et moi. Nous faisons le thé jusqu’à « x time » avant de rentrer chez nous au petit matin, histoire de pouvoir prendre le « kheud » et de se coucher tranquillement ».
Khadim, le faiseur de thé  – « tea maker» – du groupe, comme l’appelle ses amis,  pense, quant à lui, que pendant le Ramadan, plus tôt  on se couche, plus tôt on démarre le jeûne. « Moi, une fois au lit, ce n’est plus évident de me relever pour faire le « kheud ». Et je serais obligé de jeûner sans rien manger au préalable. Mais si je veille, je vais au moins, pouvoir prendre du thé, débattre avec mais amis jusque tard dans la nuit, pour ensuite rentrer, manger quelque chose et dormir paisiblement ».
Même son de cloche dans un autre groupe de jeunes, qui fréquentent une boulangerie à la Cité Nations unies à Golf sud.
Ce groupe semble relativement plus calme et plus conscient que l’autre. Abdou, un étudiant parmi eux, explique : « cette boulangerie est à mon oncle. J’y passe plus de temps durant le Ramadan parce qu’il n’y a que des femmes chez moi, elles dorment tôt et c’est à moi de les réveiller pour le «kheud ».
Contrairement à Abdou, Matar, qui, lui, vient faire son passe temps ici, pour bien foncer dans la brume du sommeil le lendemain. « Comme je n’ai rien à faire la journée, je tue le temps ici, comme ça ; je me réveille tard le matin», soutient-il.
Avant d’ajouter : « mieux vaut dormir toute la journée que de s’occuper de ce que font les autres ou de parler des autres. Ça, c’est banni par la religion ».
Pour étayer son propos, il s’appuie sur une émission religieuse à Sud FM. « J’ai entendu Oustaz Alioune Sall dire qu’il n’est pas interdit par l’Islam de dormir la journée durant le Ramadan. Mais toutefois, ajoute le Oustaz, on pourrait mieux faire que dormir ».