Les forces loyales au numéro un libyen Mouammar Kadhafi ont mené des raids lundi à Ras Lanouf, poste avancé de la rébellion dans l’Est, la communauté internationale s’inquiétant de la violence des combats ayant fait 21 morts la veille à Misrata dans l’ouest.
L’ONU a chargé lundi l’ancien ministre jordanien des Affaires étrangères Abdel Ilah Khatib d’entreprendre des «consultations urgentes» avec le gouvernement libyen sur la crise humanitaire provoquée par les combats contre l’insurrection qui secoue le pays depuis trois semaines.
Plus isolé que jamais sur la scène internationale, le colonel Kadhafi a accusé la France d’«ingérence» dans les affaires intérieures libyennes après le soutien apporté par Paris au Conseil national mis en place par l’opposition à Benghazi pour préparer la transition.
Dans la matinée, deux raids aériens ont visé le port pétrolier stratégique de Ras Lanouf, pris vendredi par l’insurrection à 300 km au sud-ouest de Benghazi, où des combattants ont répliqué avec l’artillerie anti-aérienne, selon un journaliste de l’AFP.
À chaque passage de l’avion militaire, un feu nourri a éclaté de toutes les armes au sol, batteries antiaériennes, lance-grenades ou simples armes automatiques, sans parvenir à atteindre l’appareil.
Dès l’aube, des habitants avaient fui Ras Lanouf par crainte des combats qui avaient déjà chassé les insurgés de Ben Jawad, à une quarantaine de kilomètres plus à l’ouest.
Sur la route, un véhicule équipé de haut-parleurs crachait des instructions aux insurgés: «N’allez pas au front devant l’armée. Le pétrole est entre nos mains», vociférait la voix dans le haut-parleur, laissant entendre que le village de Ben Jawad, où les combats dimanche ont fait au moins 12 morts et plus de 50 blessés ne valait pas un tel sacrifice.
Lourd bilan
À Misrata, 3e ville du pays tenue par l’opposition à 150 km à l’est de Tripoli, les combats dimanche ont fait 21 morts, dont un petit garçon de 2 ans et demi, et plus de 90 blessés, selon un médecin précisant que l’immense majorité des victimes étaient des civils.
Les forces pro-Kadhafi ont attaqué la ville à l’arme lourde pendant toute la journée, a raconté le médecin. «Ils ont tiré sur des civils et des bâtiments. Les rebelles ont riposté et réussi à pousser les forces de Kadhafi hors de la ville», a-t-il ajouté.
L’ONU a demandé dimanche un accès d’urgence aux victimes «blessées et mourantes» de ces bombardements, et a lancé lundi un appel de fonds de 160 millions de dollars pour aider les victimes.
À Washington, la pression montait autour du président Barack Obama pour fournir une assistance militaire aux insurgés et neutraliser l’aviation libyenne, soit par une zone d’interdiction aérienne, soit par une destruction des pistes des aéroports.
Le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen, a estimé lundi que les attaques contre des civils en Libye pouvaient être considérées comme des crimes contre l’humanité et que la communauté internationale ne pourrait pas rester passive si elles se poursuivaient.
Il a cependant répété que l’Otan n’avait «pas l’intention d’intervenir» sans mandat de l’ONU.
L’Italie a annoncé avoir établi des contacts «discrets» avec le Conseil national de l’opposition. En revanche, une «équipe diplomatique britannique» venue établir des contacts à Benghazi a dû quitter le pays après avoir été arrêtée et détenue plusieurs jours par l’opposition, qui lui a reproché d’être entrée dans le pays «de manière non officielle et sans aucun accord préalable».
L’armée libyenne a tenté ces derniers jours de lancer une contre-offensive pour stopper la progression des insurgés. Mais l’insurrection, un mélange de jeunes sans expérience du combat et de militaires ralliés à l’opposition, a réussi à garder le contrôle de l’Est du pays, jusqu’à Ras Lanouf.
Un pont aérien international se poursuivait à Djerba (sud de la Tunisie) pour rapatrier des milliers de réfugiés égyptiens ayant fui la Libye. Plus de 191. 000 personnes ont fui à ce jour les violences et environ 10 000 personnes déplacées se dirigeaient vers la frontière égyptienne, selon l’ONU.
Les tensions en Libye, qui détient les plus importantes réserves de pétrole d’Afrique, ont continué de se répercuter sur les marchés. Les prix du pétrole grimpaient fortement lundi en cours d’échanges européens, et se hissaient à New York à un nouveau sommet depuis septembre 2008.
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