Les réactions fusent de partout après le discours tant attendu du président Wade. Du marché Sandaga à Guédiawaye, dans la banlieue dakaroise, en passant par l’Université de Dakar, l’indignation est le sentiment le mieux partagé.
« Que voulez vous que je pense du bavardage d’un homme qui affirme sans honte que les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Abdoulaye Wade se moque de nous. Je pense sincèrement qu’il a des troubles mentaux ». Comme Ndèye Anta, beaucoup de jeunes sénégalais pensent que leur président n’a aucun respect pour eux.
« Ce qui me fait le plus mal, c’est son double langage. En français, il fait preuve de retenue et essaie de se montrer rassembleur pour plaire aux occidentaux. En Wolof, il se déchaîne et nous abreuve de propos irrespectueux. Comment un octogénaire peut-il être aussi vicieux », déplore Youssoupha, un jeune travaillant dans une mutuelle à Guédiawaye dans la banlieue.
Fadel Barro, le coordonateur du mouvement « Y en a marre », se dit meurtri. « On a honte et vraiment mal d’entendre le président manœuvrer et dire des mensonges. Il n’a absolument rien compris (…) Un président qui vous dit : « Je me dédis » et « la promesse n’engage que ceux qui y croient », que vaut vraiment sa parole », se demande-t-il.
Mouhamed Ndiaye, un jeune journaliste, pense qu’Abdoulaye Wade est dans une tour d’ivoire. « J’ai vu un Wade qui s’adressait à son clan et non aux Sénégalais. Il est vraiment entre des chefs de guerre comme lui et ils essayent de trouver des stratégies qui seront nulles et non avenues parce que de plus en plus, il est isolé ».
Au marché de Sandaga, les marchands ambulants sont partagés. D’un côté, il y a ceux qui soutiennent que Wade a tenu un langage de vérité aux opposants qui veulent détruire le pays qu’il a « si durement remis sur les rails ». De l’autre, ceux qui ont participé aux manifestations des 23 et 27 juin et qui « en ont marre de ce vieux rusé » que rien n’arrête. Ce deuxième groupe est le plus déterminé. Pape Diop, Moussa Bakhoum et Alé Mbaye sont les plus radicaux du groupe. « Nous allons réactiver les réseaux qui ont secoué le pays le 23. Wade se fout de nous. Comment peut-il vouloir encore diriger ce pays à 87 ans. S’il veut être candidat, il nous aura en face de lui », menacent-ils.
A l’université, l’indignation est à son comble. Les étudiants, sympathisants de Y en a marre, ne décolèrent pas. Ils jugent le discours du président Wade « pathétique » et « indigne d’un président soucieux du devenir de sa jeunesse ». « Comment peut-il nous dire que sa parole n’a aucune valeur et en même temps nous promettre cent mille emplois. C’est du « foutage de gueule ». Il faut que cela cesse », déclare Khadim, un étudiant en médecine.
Abdou Lo, manager d’une entreprise de communication, trouve que Wade est dans la même posture que Gbagbo, il y a quelques mois. « Ce qui me surprend, c’est la confusion des genres entre l’Etat et le parti. Comme Gbagbo, il dit je gagne ou je gagne. Cela m’a fait froid dans le dos. Il est dans un déni du 23 juin. Lui et son parti sont dans une logique suicidaire », dit-il.
Fatou Sy, une journaliste, n’en pense pas moins : « Est-ce qu’il y a lieu de s’intéresser au discours de Wade si l’on sait qu’il s’adressait à ses militants et non aux citoyens sénégalais ? Et, une fois de plus, il a montré qu’il n’a que du mépris envers les populations sinon il aurait dû tirer une leçon des évènements des 23 et 27 juin. Mais au lieu de cela, il tient un discours guerrier en promettant la guillotine aux manifestants arrêtés. Mieux encore, il a affiché un manque de considération avec ses promesses auxquelles il est le seul à croire. C’est un manque de sérieux à quelques mois de la fin de son mandat »
Les membres du Mouvement « Y en a envie », créé sur les flancs du Parti démocratique sénégalais (Pds au pouvoir) pour contrecarrer l’initiative de « Y en a marre », essaient d’équilibrer les rapports de force. Mais, moins nombreux, moins crédibles et moins déterminés que ceux d’en face, leur mission semble quasi impossible face à la colère généralisée qui couve au Sénégal.
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