(APS) – La ‘’pleine effervescence’’ des mouvements citoyens apparus en nombre important au sein de l’espace public sénégalais ces dernières semaines relève d’une dynamique de nature à faire du pays une ‘’société ouverte’’, a soutenu le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne.
‘’La vision qui est la mienne c’est qu’il y a là, faisant suite aux Assises nationales (organisées par l’opposition), un développement très important du mouvement de faire de notre pays une société ouverte’’, a-t-il dit dans un entretien publié mercredi par le quotidien privé Kotch.
‘’Cette effervescence devrait pouvoir aller dans la bonne direction et imprimer à notre pays des avancées démocratiques significatives’’, a fait valoir M. Diagne, enseignant à la Columbia University (New York), après avoir servi plus de vingt ans au département de philosophie de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar.
Souleymane Bachir Diagne lie le concept de ‘’société ouverte’’ à la pensée du poète et philosophe indien Muhammad Iqbal (1877-1938), dont l’œuvre selon lui s’oppose aux ‘’crispations’’ et à ‘’l’enfermement dans ce qu’Amartya Sen a appelé l’+illusion du destin+’’.
‘’L’ambition du poète indien est de remettre la pensée à l’endroit en montrant que ce n’est pas l’accueil de la différence mais au contraire le refus de l’innovation, du mouvement même de la vie, qui est in-fidélité’’, écrit le philosophe sénégalais dans ’’Comment philosopher en islam ?’’, son dernier ouvrage paru en octobre 2008 aux éditions du Panama et réédité depuis.
Iqbal est né dans la région du Pendjab, au sein d’une famille originaire du Cachemire. ‘’Son père fait partie de ces musulmans indiens convaincus des bienfaits à tirer, pour l’islam même, de l’enseignement moderne qu’offre l’école britannique’’.
Juriste et philosophe, Iqbal ‘’fait œuvre de pionnier dans le développement d’une littérature moderne persane’’. En 1907, il rédige une thèse de philosophie consacrée à ‘’La Métaphysique en Perse’’ dont le sous-titre s’intitule : ’’Contribution à l’histoire de la philosophie musulmane’’
‘’Comme Afghani (Jamâl ad-dîn al-Afghânî, 1839-1897), mais de manière plus philosophique pourrait-on dire, Iqbal est en colère contre l’entêtement rétrospectif et l’attitude contemplative’’, selon Souleymane Bachir Diagne, qui a publié, en 2001, ‘’Islam et société ouverte, la fidélité et le mouvement dans la pensée de Muhammad Iqbal’’.
‘’Autrement dit, la réponse au défi des temps qui changent pour continuer, selon les exigences d’aujourd’hui, l’intention et la dynamique libératrices de la religion dans les domaines de la justice sociale, de l’égalité des hommes et des femmes, du respect du principe de pluralisme, bref, la nécessaire +reconstruction de la pensée religieuse de l’islam+ suppose la mise à jour d’une pensée du temps comme devenir créateur, d’une cosmologie qui soit émergence continue, élan vital’’, explique encore l’auteur.