Brouter, encore brouter, toujours brouter, et ensuite déféquer, voilà la logique fondamentale qui fonde la transhumance. Comme la panse est au cœur du système gastrique des ruminants, beaucoup ne pensent qu’au ventre !
Après avoir fait la pluie, le beau temps, l’hivernage certains responsables ont une sainte horreur des sécheresses électorales. Beaucoup de leaders politiques n’envisagent pas une carrière dans l’opposition. Ils ne s’imaginent que derrière les lambris du pouvoir. Une lame de fond contestant se fait jour au Sénégal, réclamant plus de constance dans les appartenances. Certes, les idéologies sont déclarées mortes, mais quand même…
C’est la nouvelle transhumance. Ce terme est né un peu après 2000, quand, subitement, après la défaite du président Abdou Diouf, de larges franges du Parti socialiste ont rejoint avec armes et bagages la nouvelle majorité du président Abdoulaye Wade. Ce n’est pas tant le mouvement qui dérange, mais plutôt les motivations que ses auteurs mettent en avant. Ils disent vouloir retourner leur veste par patriotisme. Quel condescendance vis-à-vis d’un pays qui a mis un terme à la carrière politique de l’homme qui était être censé le plus rusé et diplômé « du Cap au Caire ».
Abdou Fall, ancien ministre de la Santé dans le gouvernement libéral, ancien président du groupe parlementaire de la même obédience, dernièrement ministre d’Etat à la présidence de la République.
Kalidou Diallo, dernier ministre de l’Education nationale sous l’ère Wade ; ancien puissant patron d’un syndicat toujours dédié à la vindicte contre les régimes en place. Khoureïchi Thiam, lui aussi ancien ministre, le dernier de la…Pêche sous le régime du Pds…
Tous ont une particularité. Ils théorisent, -chacun à sa manière- leur volonté d’aller militer auprès des nouveaux vainqueurs. « Il faut aider le président de la République », disent-ils tous en substance.
Qui sont-ils ? Abdou Fall (son parti, la Cds fondu dans le Pds en 1998), qui a eu le flair de partir avant l’heure, mais que n’a-t-il pas dit ? A un moment, il dirigeait la colonne chargée d’enfoncer les positions de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck. Aujourd’hui, il déclare urbi et orbi que ne pas soutenir le président Macky Sall, est quasiment une forme de démence anti-patriotique. Quel pays !
Kalidou Diallo, qui motive sa transhumance par le fait que les responsables du Pds ne l’ont pas assez soutenu après le décès de son fils aîné. C’est quand même fort de café ! A la tête d’une association de réflexion sur l’éducation en Afrique, il a récemment été reçu par Macky Sall qui, déjà penché vers la recherche d’un second mandat, sait que le Fouta sera déterminant.
Pour sa part, Khoureïchi Thiam, déjà englué dans des déboires liés aux licences de pêche, est le moins heureux. Que n’a t-il pas fait ? Les militants du parti présidentiel de sa région d’origine disent qu’ils ne veulent pas –alors pas de lui. Démentiel !
En 2000, la plupart disaient que ce sont leurs guides religieux qui les enjoignaient d’aller soutenir le nouveau régime. Cette fois-ci, les arguments sont plus subtils… Comme les chats aux sept vies, ils retombent toujours sur leurs pattes. Les nouveaux transhumants de 2012 invoquent le patriotisme, l’ancrage dans un terroir ou des pressions familiales, des alliances stratégiques, pour justifier leur reniement. C’est une verrue pour la démocratie sénégalaise.
Nettali
