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L’homme et la nature : quand le mythe de l’homme tue l’humanisme par Alassane Kitane

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L’humanisme ne saurait être circonscrit à l’épanouissement des facultés intellectuelles et morales de l’homme, dans le seul souci de l’accomplissement intégral de l’homme.  L’humanisme véritable est avant tout écologique, l’homme est dans la nature pour échanger avec elle et non pour uniquement l’exploiter et la  surexploiter. La communion avec la nature doit être l’aboutissement ultime de tout humanisme. Claude Lévi-Strauss a dit : 

On a commencé par couper l’homme de la nature, et par le constituer en règne souverain ; on a cru ainsi effacer son caractère le plus irrécusable, à savoir qu’il est d’abord un être vivant. Et, en restant aveugle à cette propriété commune, on a donné champ libre à tous les abus. Jamais mieux qu’au terme des quatre derniers siècles de son histoire, l’homme occidental ne put-il comprendre qu’en s’arrogeant le droit de séparer radicalement l’humanité de l’animalité, en accordant à l’une tout ce qu’il retirait à l’autre, il ouvrait un cycle maudit, et que la même frontière, constamment reculée, servirait à écarter des hommes d’autres hommes, et à revendiquer, au profit de minorités toujours plus restreintes, le privilège d’un humanisme, corrompu aussitôt né pour avoir emprunté à l’amour-propre son principe et sa notion ». Anthropologie structurale deux, Plon, 1973,

Le racisme, l’ethnocentrisme, l’anthropocentrisme se nourrissent tous du mythe et de la déification de l’homme. En opposant l’homme et l’animal, on a cru qu’on faisait la gloire de l’homme, et on n’a pas reculé dans l’affabulation. Ainsi, d’exagération à exagération, on a abouti aux pires mégalomanies de l’homme, à un anthropocentrisme qui a fini par se retourner contre lui. 

Nous Africains avons le devoir historique de montrer au reste du monde qu’on peut respecter la nature sans être forcément irrationnel, qu’on peut exploiter l’émotion comme un supplément ou même un moment ( au sens hégélien du terme) de la rationalité. L’homme et la bête : il y a une bête en nous et pourtant nous avons réussi à la dompter sans violence, nous l’avons acclimatée aux exigences fondamentales de la morale sans jamais l’écraser. Pourquoi devrions-nous être si cruels avec la bête en dehors de nous, dans la nature ?

 Cet homme qui, par des procédés aux confins de l’art et la mystique, communie avec l’hippopotame nous apprend que partout où l’homme a été sur cette terre, il a trouvé un moyen d’échanger avec la nature pour en tirer profit sans l’agresser de façon arrogante. L’homme n’est pas maître et possesseur de la nature, il est un élément intégral de cette nature.  Et même les religions révélées qui présentent l’homme comme le vicaire ou prince de Dieu sur terre, ont toutes prescrit à l’homme le devoir de protéger la nature, de s’épanouir avec et dans elle, jamais contre elle. 

Nous Africains, sommes prompts à nous émouvoir du cirque fait ailleurs, pourtant dans tous les recoins du continent, on trouve toujours des hommes communier, chanter, danser avec la nature. Le ?ubbalo, le ?ominka,   le charmeur de serpents, etc. ont, de tout le temps, produit des spectacles de haute facture.  Les acteurs du tourisme qui peinent à relancer ce secteur devraient regarder du côté des populations rurales. Nos enfants ont beaucoup à apprendre, à découvrir et à assimiler. Il faut leur faire connaître l’énorme patrimoine culturel immatériel et matériel qui sert de soubassement à nos sociétés.

Alassane K KITANE

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