Mouammar Kaddafi a déclaré s’être promené incognito dans la capitale libyenne alors que le CNT, qui n’est toujours pas parvenu à localiser le dictateur, parle de tenir des élections dans les huit mois.
Kaddafi se prendrait-il pour Henri V à la veille de la bataille d’Azincourt dans la fameuse pièce de Shakespeare ? Après avoir annoncé que l’entrée des rebelles libyens dans son quartier général ne constituait qu’une manœuvre tactique de ses forces, l’ex-« Guide » provoque une nouvelle fois les insurgés dans un message audio diffusé mercredi par la chaîne Arrai basée en Syrie. « Je me suis promené incognito, sans que les gens me voient, et j’ai vu des jeunes prêts à défendre leur ville », a-t-il affirmé. Comment a-t-il fait pour que personne ne le reconnaisse ? Ses sempiternelles lunettes noires ne suffisant sans doute pas à le dissimuler aux yeux de ses concitoyens – sans compter qu’elles sont sûrement bien peu pratiques pour trouver son chemin de nuit – Kaddafi s’est-il déguisé en femme ou en barbu ? La question reste entière…
Après avoir relaté ses exploits nocturnes, Mouammar Kaddafi en profite pour rendre un hommage appuyé à tous les Libyens qui soutiennent sa cause, et appelle « les habitants de Tripoli, les tribus, les jeunes, les vieux à sortir dans les rues » et « nettoyer Tripoli des rats ». De son côté, le Conseil national de transition (CNT) fait preuve d’un style assez différent. Il prévoit ainsi la mise en place d’élections rapides dans une Libye libérée de la dictature de Kaddafi. « Dans huit mois se tiendront les élections législatives (…) et présidentielle. Nous voulons un gouvernement démocratique et une Constitution juste », a affirmé Mustapha Abdeljalil, le numéro un de l’organe politique de la rébellion dans les lignes du journal italien La Repubblica.
Le chef de la rébellion a également affirmé la volonté du CNT de voir d’ériger un pays sur de nouvelles bases. « La « nouvelle Libye » doit être un pays différent du passé, et fondé sur les principes de liberté, égalité et fraternité », a-t-il dit, soulignant que les Libyens refuseraient désormais d’« être isolés du monde comme nous l’avons été jusqu’à maintenant ».
« Procès équitable »
Le développement des relations internationales sera donc une priorité pour le futur gouvernement. « La Libye de l’après-Kaddafi aura des relations spéciales avec les pays qui ont soutenu notre combat de libération depuis le début. Parmi ceux-ci figure bien évidemment l’Italie », a déclaré Mustapha Abdeljalil. En ce qui concerne le sort de Mouammar Kaddafi, il devrait être jugé « dans le cadre d’un procès équitable » sur le sol libyen, selon la volonté de nombreux insurgés.
« Nous voulons qu’ils (Kaddafi et ses proches) soient pris vivants et traités différemment de la façon dont le colonel traitait ses adversaires. Lui restera dans les mémoires seulement pour les crimes, les arrestations et les assassinats politiques qu’il a commis », a dit-encore le chef du Conseil de transition dans les lignes du quotidien italien.
Guma Al-Gamaty, coordinateur au Royaume-Uni pour le CNT, a affirmé mercredi que le nouveau gouvernement libyen « honorera les contrats passés par le colonel Mouammar Kaddafi ». De quoi rassurer l’entreprise ENI, premier producteur étranger de pétrole en Libye.
« Nous n’avons pas de craintes pour Eni en Libye. Mais nous sommes inquiets pour le futur proche », a annoncé Paolo Scaroni, le patron du groupe, dans un entretien publié dans le journal italien Corriere della Sera mercredi. Le PDG d’ENI a également déclaré avoir rencontré le CNT au grand complet le 3 avril dernier. « Depuis nous avons des contacts constants, intenses et quasi-quotidiens », révèle-t-il.
(Avec AFP)