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L’OBSERVATOIRE. Habré en pile ou face

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Hissène Habré s’est réveillé ce matin à Dakar. Il n’est pas exclu qu’il ait mieux dormi hier soir que depuis la nuit de vendredi à samedi. Des raisons de perdre le sommeil, l’ex-Président du Tchad en avait assurément. Il était à quelques heures d’un vol spécial que des voix, de par le monde, avaient considéré comme celui au bout duquel M Habré devait entrer dans l’anti chambre de la mort.

 

Condamné par contumace dans son pays lors d’un procès sans aucune crédibilité, menacé d’expulsion par les autorités de son pays d’accueil, Hissène  Habré s’est rapidement trouvé au centre d’une controverse entre Dakar et la communauté internationale, avec le rarissime privilège, dans son cas, d’être redevenu le protégé de toutes les organisations de défense des droits de l’Homme. De bourreau, présumé auteur de « tortures, crimes et assassinats, ayant fait des milliers de victimes tchadiennes », celui dont on dit qu’il dirigea le Tchad dans un règne de terreur aurait échappé à « une mort certaine » chez lui grâce à la mobilisation de personnalités de divers horizons.

 

Le chef de l’Etat est revenu sur sa décision d’expulser le plus célèbre hôte du Sénégal. Est-ce le résultat de la mobilisation anti-expulsion ici et ailleurs ? On peut le croire. Des familles maraboutiques se sont mobilisées et Wade se serait même fait remettre les bretelles sur le dossier. Le débat est parti pour durer plusieurs autres jours ou semaines. Le Ministre d’Etat, ministre des Affaires Etrangères a annoncé l’ouverture dès ce lundi, de discussions pour la suite à donner au dossier. Depuis vendredi, des voix s’étaient élevées pour s’interroger sur les raisons de la subite décision du Président Abdoulaye Wade, de renvoyer M Habré chez lui.

 

Deux camps de sceptiques s’étaient formés. Celui des adversaires politiques du Chef de l’Etat avaient diagnostiqué une « tentative de détourner l’attention des Sénégalais, du contexte très tendu » hérité des journées du 23 et 27 juin dernier. D’autres observateurs avaient plutôt suspecté une manœuvre du Président de la République destinée à mettre tout le monde devant ses responsabilités. Que l’Union Africaine assume d’avoir mis le Sénégal dans une situation de « juger ou extrader ». Que l’Union européenne qui avait promis de financer le procès se décide à concrétiser son engagement. Pour tenir compte des injonctions de l’UA face à la défaillance de l’UE, Wade aurait cherché à mettre tout le monde mal à l’aise. Opération réussie en partie.

 

Les autorités sénégalaises avaient-elles vraiment  l’intention  de se débarrasser de Habré, ainsi que le projet en a été annoncé ?  L’ex-Président tchadien a eu le temps, en vingt années de présence sur le sol sénégalais, de s’enraciner dans le tissu social. La preuve en a été donnée par les manifestations de désapprobation parties de Ouakam et qui auraient pu se poursuivre dans d’autres cités influentes du pays. Un chef religieux a même fait comprendre à Wade qu’il prendrait l’expulsion de Habré comme la sienne propre.

 

Si c’est pour tenir compte de tout cela et en même temps éviter d’être en porte-à-faux avec la communauté internationale que Wade à fait dans le bluff de l’expulsion, on peut considérer qu’il vient de se prendre les pieds dans un autre piège. Ceux qui se félicitent que le Sénégal ait renoncé à expulser le décidément très encombrant hôte, attendent Dakar à l’inévitable solution par la Belgique.

 

Bruxelles avait demandé l’extradition aux fins de juger Hissène habré, à la suite de plaintes de victimes. Le Sénégal avait résisté à cette charge, obtenant même de la Cour Internationale de Justice (CIJ)  qu’elle n’engage pas de procédure, ainsi que demandé par la Belgique, puisque « l’ouverture du procès était imminent ». Le prétexte était que pour le Président Abdoulaye Wade, il « est hors de question de faire juger un Africain par une juridiction nationale européenne ». Au terme de la confrontation avec Bruxelles, Dakar avait obtenu de la CIJ, un délai de six mois pour agir. C’est ce lundi 11 juillet 2010 que ce délai expirait. Pour donner un semblant de réponse aux exigences de la communauté internationale, le Chef de l’Etat prend la décision la plus controversée. Une extradition aurait nécessité un temps d’exécution plus long. Il n’est pas dit que Dakar et son hôte pourront faire l’économie d’un retour du dossier là où le souhaite Bruxelles. Entretemps le Sénégal se sera illustré par une incohérence dans ses démarches. Cela, vu du dehors.

SUDONLINE.SN


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