Dans un texte publié le 11 décembre 2021 sous le titre « LE GRAND TIMONIER DU SINE », nous avons expliqué comment ce qui est perçu comme « Dynastie Faye-Sall » est tombé dans son propre piège en voulant « réduire l’opposition à sa plus simple expression ».
Nous développerons des lignes de cette chronique, ce vendredi, à partir de 16 heures, dans notre live, à l’occasion du 10e anniversaire de l’Alternance démocratique du 25 mars 2012.
Porté au pouvoir par les socialistes, il a, durant les premières années de son magistère, multiplié les références à Abdou Diouf. L’ex-patron de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) a eu, grâce au leader de l’Apr, tous les honneurs d’un chef d’Etat à la retraite. Ce fait postule une double implication : rassurer les socialistes dans Benno bok yakaar et faire rendre gorge aux Wade, par un jeu de communication tendant à mettre entre parenthèses le règne des Sopistes.
Au bout de quelques années, l’Alliance des forces de progrès (Afp) de Moustapha Niasse, qui a connu une partition en 2015 avec la fronde animée par Malick Gackou, s’est presque consumée dans l’Alliance pour la république. Quant au Parti socialiste, il a connu un démembrement en désertant toute ambition présidentielle pour se laisser caporaliser par l’Apr. Au lendemain du congrès socialiste de 2014, c’est Me Aïssata Tall Sall qui claque la porte. Ensuite, l’emprisonnement de Khalifa Sall, suivi de plusieurs responsables de Dakar notamment, amorce l’octobre de la vie du doyen des formations politiques d’Afrique francophone, avec le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci). C’est à quelques encablures des locales de janvier 2022 que les socialistes se rendent compte qu’ils ont été enfarinés, puisque dans les investitures, l’Apr a fait montre d’une gourmandise gargantuesque.
Après avoir réduit ses alliés à leur « plus simple expression », isolé Karim Wade au Pds et obtenu le silence de Idrissa Seck, Macky Sall retrouve ses frères libéraux et théorise un obscur « libéralisme social », qu’il aurait hérité du pape du Sopi, alors que ce prêt-à-porter idéologique, qui sert des desseins machiavéliques, n’est qu’une notion épouvantail. Wade lui-même a longtemps été un militant socialiste, avant que Léopold Sédar Senghor ne lui inspirât la création d’un « parti de contribution », d’obédience travailliste. Or « travaillisme » et « libéralisme » sont deux notions antinomiques. D’ailleurs, une querelle intellectuelle entre ces deux notions sera la principale cause du départ du Pr. Serigne Diop et Cie, qui ont été exclus du Pds, dans les années 80.
En fait, en se réclamant du « libéralisme-social », Macky Sall vise à endiguer la concurrence du Parti démocratique sénégalais. Par cette démarche, il décroche le soutien de tous les pontes du Pds historique qui n’admettent pas le leadership de Karim Wade. Au final, de Idrissa Seck à Modou Diagne Fada, en passant par Me Ousmane Ngom, Oumar Sarr, Me Souleymane Ndéné Ndiaye, Samuel Sarr, Baïla Wane, Me Madické Niang…, ils sont tous aujourd’hui plus ou moins proches du président Macky Sall.
En écartant de la course, à la florentine, Khalifa Sall et Karim Wade, Macky Sall n’a pas, pour autant, réussi à réduire « l’opposition à sa plus simple expression ». Loin s’en faut ! Ousmane Sonko, dont la mouvance était à l’état embryonnaire en 2017, est devenue une réalité politique par une opération du Saint-Esprit. Le pharaon, en tuant les petits hébreux, était-il averti de la destinée de Moïse ? Les évènements connus par le Sénégal en février-mars 2021, du fait de l’arrestation du leader de Pastef, qui a exacerbé les contrecoups socio-économiques des mesures barrières propres à stopper le Coronavirus et à faire le lit du populisme, doivent amener Macky Sall à comprendre que la nature a horreur du vide.
Hélas, l’on a l’impression que le président de la République n’a pas tiré les leçons politico-historiques des précédents malheureux vécus en mai 68, février 1988, avant la présidentielle de 2012 et en février-mars 2021.
Etudiant maoïste, Macky Sall, qui ne supporte pas la contradiction, a le goût du « Parti unique ». Et il a commencé cette dictature dans son propre parti, régi par « une structuration horizontale », en éliminant tous ses potentiels dauphins. Même la Primature a été supprimée pour repositionner la Présidence de la République comme l’unique centre de diffusion d’un leadership de type autocratique.
C’est ce que Senghor a fait dès 1963. Mais de cette année, le Sénégal a connu de graves convulsions, qui ont failli emporter le régime de l’Union progressiste sénégalaise (Ups) en ma i68.
Après avoir restauré la Primature en juillet 1970, le poète-président posa d’autres actes qui conduisirent au muli-partisme limité, puis intégral sous le principat de Abdou Diouf.
Espérons qu’en restaurant le poste, Macky Sall crée enfin les conditions de son départ, qui est devenu une demande sociale.
MONSIEUR LE PRESIDENT, LES SENEGALAIS SONT FATIGUES ! Plus fatigués aujourd’hui, qu’à l’époque de Kéba Mbaye et de Senghor !
Joyeux anniversaire et longue vie, Monsieur le Président !