Aucune place, aucune rue, aucun établissement scolaire ou autres édifices publiques ne porte son nom ; et pourtant, il fut un éminent poète et jurisconsulte – et indéniablement, l’un des plus illustres fils de Saint-Louis ; en témoigne son surnom ‘’goor gathia thiaka ndiaye’’ (celui qui repose au Cimetière baptisé ’’thiaka ndiaye’’), et ce témoignage très objectif du chercheur Amar SAMB, mentionné dans son ouvrage intitulé ‘’Essai sur la contribution du Sénégal a la littérature d’expression arabe’’ (*), remontant à 1972 et dont voici un extrait :
Je cite : « A Saint-Louis encore, vivait à la fin du 19ème siècle, un très grand chantre du Prophète, nommé Madior Cissé (Mame El Hadj Madior Goumba CISSE) (décédé en 1907 ?). Il était le contemporain d’El-Hadji Malik Sy, d’Ahmadou Bamba, de Doudou Seck et de Khâli Madiakhaté Kala, les pionniers de la poésie sénégalaise d’expression arabe. Son petit-fils, qui porte lui aussi le nom de Madior [Serigne El Hadj Madior CISSE], écrivain, vit encore à Saint-Louis où il dirige une association religieuse, qui a une discipline si rigoureuse que les groupements rivaux ont donné à ses membres le surnom de ‘’Militaires’’. C’est une association, brûlante de piété et de ferveur, d’une cohésion parfaite, d’une ponctualité étonnante, charitable, d’un modernisme et d’un sens d’organisation surprenants, avec une efficacité sans tapage. Ce petit-fils (Serigne Madior CISSE) a donné à l’IFAN un ouvrage en droit musulman de son grand-père. C’est un livre volumineux : 300 pages manuscrites, le copiste étant un Maure nommé Ahmad ibn Muhtâr El Yadâli. En tête du livre, l’auteur a donné ses coordonnées : « Muhammed Mâlik fils d’Abdallah fils d’’Umar [descendant du Prophète (PSL)], de rite malékite, de confrérie qâdrite, de wird donné par Ahmed Sâlum – un Mauritanien – natif de Saint-Louis » … . Après deux pages d’introduction, on lit : « Or, la science étant la plus grande faveur que (Dieu) le Clément ait accordée à l’homme, après la foi, pour l’honorer et le distinguer des animaux, puisque Celui qui est trop élevé pour être comparé à un orateur a dit au ‘’plus Parfait des Anciens et des Modernes’’ [le Prophète (PSL)] : « Prêche au nom de ton Seigneur qui créa ! Qui créa l’homme d’un grumeau (caillot de Sang). Prêche ! Ton Seigneur étant le Très Généreux, qui enseigna par la plume et enseigna à l’homme ce qu’il ignorait (Coran, XCVI, de 1 à 5) ; ou encore « Le Bienfaiteur a enseigné la Prédication. Il lui a enseigné l’Exposé (à s’exprimer clairement) » (Coran, LV, de 1 à 4) ; ou bien encore, « Seuls les Savants redoutent Allah, parmi ses serviteurs » (Coran, XXXV, 27) ; ou encore, « Si vous ne savez pas, interrogez les ‘’Détenteurs de l’Edification’’ (les gens du Rappel) ! » (XVI, 43) ; ou enfin, « Sont-ils égaux ceux qui savent et ceux qui ne savent point ? (Coran, XXXIX, 12) ; pour ne citer que ces versets traitant clairement de ce sujet, j’entreprends la composition de ce livre. Le Prophète (PSL) a déclaré : « L’acquisition du savoir est un devoir pour tout musulman. ». D’après ‘Abdallah ibn ‘Umar, le Prophète (PSL) entra dans la mosquée où il trouva deux groupes de fidèles, l’un faisant son oraison (dzikr), l’autre se livrant à l’étude. Alors, il déclara : « Tous les deux groupes font le bien. Mais je préfère l’un d’eux, c’est-à-dire celui qui prie et invoque Dieu le Très-Haut. Si Celui-ci (Dieu) le veut, il exaucera leurs vœux, sinon, les prières ne seront pas entendues ; [par contre,] l’autre groupe étudie et enseigne, or je n’ai été envoyé que pour enseigner ». Et il prit part dans ce dernier groupe. [Ailleurs,] Le Prophète a dit : « Le bien, c’est un droit à défendre, et le mal, c’est une chicanerie. Si Dieu veut du bien à un homme, il l’incite à étudier le droit selon la loi religieuse. ». Il (PSL) a dit encore : « Les meilleurs de ma communauté sont les savants et les meilleurs des savants sont les juristes. ». Pour toutes ces raisons, continua Madior (Goumba) Cissé, « j’ai reçu parmi les leçons les plus utiles et les plus instructives, celles qui sont les plus importantes et qui constituent la priorité des priorités. Ce sont celles qui sont relatives à la Pureté légale et à la prière, celles qui présentent plus de certitude dans les sciences religieuses, car grâce à elles, les hommes peuvent marcher dans le droit chemin ou – sans elles – s’égarer. Le vrai culte ne peut aller avec l’ignorance des conditions et des modalités dans lesquelles on doit le pratiquer … ».
Ce juriste [Mame Madior (Mâlik) Goumba CISSE] est aussi l’auteur de deux longs poèmes où il chante les louanges du Prophète (PSL). Le premier compte plus de 230 vers ; c’est la célèbre Badî’yya, parce qu’il débute par le mot Badî’u … . Madior Mâlik (Goumba) Cissé qui a écrit bien avant les El Hadj Malik, les Ahmadou Bamba, s’est immortalisé par cette grande ode qui fait encore l’admiration de tous les lettrés sénégalais. … Saint-Louis peut bien s’enorgueillir d’avoir produit trois grands poètes lyriques : Bou-el-Mogdad, Madior (Goumba) Cissé et Ahmed Ayâne Sy ». Fin de citation (AMAR SAMB).
Voilà, à l’évidence, le portrait ramassé d’un illustre fils du Sénégal que la République a superbement oublié ; mais malgré tout cela, Dieu a perpétué son nom dans la postérité, comme il l’a promis aux bienfaisants (muhsinîne) ; ses petits-fils (dont Son Eminence Serigne El Hadj Madior CISSE) et leurs descendants (dont votre serviteur) ont superbement perpétué son œuvre dans la mission de restauration de la religion que le ‘’vénéré khalife, Serigne Babacar SY, avait confiée à notre maître, en 1955, grâce à la pugnacité et à l’exigence de la perfection dont la ‘’Dahira mutahabbîna fillahi’’ a fait son credo – cette ‘’association religieuse’’ exemplaire dont Amar SAMB a fait l’apologie tantôt, et qui est actuellement sous la direction éclairée de Imam Mouhammad Abdallah CISSE et de ses illustres frères (**). Oui, Dieu ne perd pas la récompense des bienfaisants :
(114) Accomplis la prière aux deux extrémités du jour et à certaines heures de la nuit. Les bonnes œuvres dissipent les mauvaises. Cela est une exhortation pour ceux qui réfléchissent. (115) Et sois patient. Car Allah ne laisse pas perdre la récompense des bienfaisants (11. Hud : 114-115 – Hûd). (128) Certes, Allah est avec ceux qui Le craignent avec piété et ceux qui sont bienfaisants (16. Les Abeilles : 128 – An-Nahl). (148) Allah, donc, leur donnera la récompense d’ici-bas, ainsi que la belle récompense de l’au-delà. Allah aime les gens bienfaisants (3. La Famille d’Imran : 148 – Al-Imrân). (108) Et Nous perpétuâmes son renom dans la postérité … (110) Ainsi récompensons-Nous les bienfaisants (37. Les Rangés : 104-110 – As-Saffât). Ainsi, Inchallah, tant que le soleil ne sera pas éteint, un de ses descendants portera le flambeau de l’Islam, mais dans la Tidjaniya qui est véritablement le parachèvement de la doctrine soufie – la voie du Mahdi et donc le pôle d’intégration de toutes les confréries. (***)
Docteur Mouhamadou Bamba NDIAYE
Ancien Interne des Hôpitaux de Dakar
Pédiatre à Thiès
Recteur de l’Université Virtuelle ‘’La Sagesse’’ de la Fondation Serigne Babacar SY Ihsaan – Bienfaisance (Thiès).http://sites.google.com/site/
(Disciple et ‘’Témoin’’ de Son Eminence Serigne El Hadj Madior CISSE, et petit-fils de Mame El Hadj Madior Goumba CISSE).
REFERENCES :
(*) Extrait de ‘’Essai sur la contribution du Sénégal à la littérature d’expression arabe’’. Mémoires de l’Institut Fondamental d’Afrique Noire. N°87. Amar SAMB. IFAN-Dakar, 1972.
(**) ‘’Communauté de ceux qui s’aiment en Dieu’’ (Dahira mutahabîna fillahi), relevant de Son Eminence Serigne El Hadj Madior CISSE – Qu’Allah l’agrée ! http://ihsaane.org
(***) De la khadriya à la Tidjaniya : 12 siècles pour le parachèvement de la doctrine soufie. http://sites.google.com/site/